Mille Petrozza se fait grave chier. Il en a ras le bol d’être une légende depuis bientôt quarante ans, il est blasé par ses albums qui trouvent un écho formidable dans le cœur des thrasheurs européens. Il a beau avoir lâché une compile ultime, il regrette ses jeunes années passées à chercher LE son, à essayer d’incarner l’avant-garde de la violence germaine avec son pote Ventor, et aimerait bien remonter le temps pour retrouver ce frisson adolescent. Alors, dans les années 2010, il se tape un super trip en Indonésie, et atterrit à Jakarta, puis monte un petit groupe local avec des musiciens du cru, prenant bien soin d’adopter un pseudo pour que personne ne le reconnaisse et qu’on lui foute la paix avec les Pleasure to Kill et autres Endorama. Il se rebaptise Lik, garde sa guitare et travestit légèrement sa voix, et s’entoure de Dikdik Basstars Prasetiadi à la basse, Uus Ridwan à la batterie (personne ne sait si ce nom cache celui de Ventor ou pas, présent au moment des faits) et Rino Fast à la guitare, et fonde TREMOR, histoire de voir s’il est encore capable de titiller la sauvagerie malgré son grand âge. Un EP pour roder le truc (Awal Kebangkitan), et puis un premier album bien brutal (Penguasa en 2018), et voyant que sa barque vogue bien sur les flots Thrash, Mille insiste et enfonce le clou avec un second LP, encore plus radical que le premier, Evolusi Logika. Résultat, ça cartonne dans l’underground, ça jase en Indonésie, et Mille est super content de pouvoir à nouveau enfiler ses vieilles baskets pour jouer devant une centaine de personnes dans une petite salle de Jakarta.
Tout ceci est bien évidemment complètement faux, mais aurait pu être vrai avec un peu d‘imagination. Car ce combo indonésien correspond tout à fait à l’optique que notre bon vieux Mille aurait pu choisir pour mener un side-project extérieur, tant la musique présentée sur ce second forfait ressemble à du KREATOR de jeunesse bien énervé, et corsé d’épices locales. Mais tout ça n’enlève rien au mérite de ces sympathiques musiciens qui depuis quelques années prônent des valeurs de Thrash méchamment corsé de Death light. Après un premier LP ayant mis le feu aux poudres, les indonésiens de TREMOR reviennent louer le chaos en moins de trente-minutes, retrouvant l’impulsion de bestialité des années 80, lorsque la brièveté était encore synonyme de qualité et de brutalité.
Très influencé par le Thrash made in Ruhr, TREMOR parvient à unifier le sens de la mélodie du KREATOR de ces dernières années, la fluidité d’un MUNICIPAL WASTE et le radicalisme de PROTECTOR en un même élan, et nous décoiffer de compositions simples, mais lapidaires. Evoluant dans un registre de Thrash nostalgique tel que nous le connaissons depuis plus de dix ou quinze ans maintenant, le groupe mené par Lilik Wardiandi nous offre donc une tranche de vie locale, animée des pires intentions bruitistes, mais ne sombre pas dans la mélancolie aggravée par le manque de talent. En sept titres seulement, le groupe fait le tour de la question, et nous offre en ouverture le souple « Imbas » qui pose les bases de l’approche. Rythmique raisonnable, chant de vieille sorcière ayant un peu trop invoqué l’esprit de Terrible Certainty. Ça grogne donc à fond les ballons, ça riffe comme à la grande période de domination allemande, mais ça mélodise pour rendre le tout plus digeste sans accepter les compromis. En gros, ça KREATORise au maximum, en retrouvant cette énergie d’adolescence perdue au profit d’un professionnalisme que bien des combos envient, et ça nous entraîne loin dans le temps, avec en cadeau bonus des soli très capables, des ruptures bien mesurées, et des breaks opportunistes. Le tout tient méchamment débout, refuse l’originalité, mais pas l’accélération fulgurante qui nous rapproche du Thrashcore le plus virulent.
Pour vous éclater au son d’un headbanging un peu trop proche du mur, savourez l’implacable « Teror », hymne comme tout groupe digne de ce nom doit composer, empreint d’ASSASSIN, de DEATHROW, et même d’un peu de MASSACRA, histoire d’internationaliser le tout. Pas mal de parfum sud-américain, de la bestialité indonésienne passée à la râpe à fromage, mais du flair, de la décence, de la folie et de l’essence, un revival Thrash/Death de première bourre sans autre ambition que de vous faire perdre quelques pellicules et kilos en live. Toutefois, TREMOR ne reste pas insensible aux modulations, comme le démontre l‘évolutif « Evolusi Logika », qui lâche une intro développée avant de plaquer un riff redondant et effilé.
Alors, inutile de tourner autour du pot, Evolusi Logika comme son titre l’indique est une évolution logique sur le parcours de ce groupe éminemment sympathique. Entre Thrash formel et classique (« Mati Suri ») avec basse claquante, et crossover de type Heavy malmené (« Murka »), TREMOR se montre sous un jour plutôt flatteur, et suffisamment bref pour que les nuages ne l’assombrissent pas trop. Alors, non, Mille n’a rien à voir là-dedans ; mais admettez que l’anecdote aurait pu être croquignolesque. Et puis, on peut bien fantasmer de temps en temps, c’est un des rares plaisirs encore gratuits.
Titres de l’album:
01. Imbas
02. Dunia
03. Teror
04. Evolusi Logika
05. Mati Suri
06. Murka
07. Terali Besi
Un report ? Je crois que j’y reviendrai l’an prochain mais deux jours afin de mieux profiter. J’en connais qui ont du moins apprécier le camping avec l’orage du dernier soir
16/05/2025, 06:52
Avec Massacra legacy, ça commence nettement à avoir plus de gueule ! Reste à voir la suite des annonces. Mais je crois que je vais plus préférer le Westill le mois suivant au même endroit cette année, déjà Elder et Wytch Hazel de confi(...)
13/05/2025, 07:48
Mea culpa....J'avais pas vu la news en première page - j'ai été directement te répondre.
12/05/2025, 14:33
S'il est du même acabit que le The Cthulhian Pulse: Call From The Dead City sorti en 2020, Mountains of Madness risque d'être un allday listening pour moi.J'ai hâte, bordel !
12/05/2025, 13:44
J'étais passé totalement à côté de cette petite pépite de Death Suédois!Vieux moutard que jamais!Puteraeon glisse de belles ambiances lovecraftiennes sur cet album et les arrangements apportent un plus à l'ensemble.
12/05/2025, 13:42
Necro est sympa, avec de bons passages groovy et d'autres où le groupe envoie du bois.Pas sûr de l'écouter durablement, d'autant plus que le prochain Puteraeon sort le 30 avril prochain.
12/05/2025, 13:40
Sentiment mitigé pour ma part Le chant de Johan Lindqvist n'atteint pas un pouïème de ce qu(...)
12/05/2025, 13:38
Au vu de la dernière vidéo-ITW en date du gonze sur ce site, pour ce qui est de "feu sacré", il a toujours l'air de l'avoir le mec.Je pars donc confiant.
08/05/2025, 09:17
@ MobidOM :oui, pas faux pour la "captation d'héritage" ! :-/ En même temps, s'il a encore le feu sacré et propose un truc pas trop moisi... De toute façon la critique sera sans pitié si le truc ne tient pas la(...)
07/05/2025, 11:52
Ah ce fameux BRUTAL TOUR avec Loudblast / MASSACRA / No Return et Crusher en 95 ! LA PUTAIN de bonne époque
07/05/2025, 11:04
@ Oliv : Montpellier étant une ville et une agglomération plus petite que Lyon, il n'y a véritablement de la place que pour deux petites salles orientées Rock-Metal-Punk-etc, à ce qui me semble après vingt-cinq ans d'observation. Au-delà,(...)
06/05/2025, 20:29
"Death To All", à chaque fois que je les ai vu ils avaient un line-up tout à fait légitime (dont une fois tous les musiciens qui ont joué sur "Human", à part Chuck bien sûr)Et puis la phrase "Chris Palengat pr(...)
06/05/2025, 20:28
Je ne vois pas beaucoup l'intérêt, et je ne comprends pas pourquoi ils n'ont pas attendu les trente ans de l'album l'an prochain. Ces dernières semaines je me retape les premiers, et ça reste un bonheur.
06/05/2025, 19:29
Vénérant ces albums et n'ayant jamais vu la vraie incarnation de Massacra, hors de question de louper ça (si ça passe à portée de paluche, pas à Pétaouchnok). Un peu comme un "Death To All"...
06/05/2025, 17:11