Fenix

Daeria

24/09/2018

Autoproduction

Espagne, terre d'un Heavy Metal puissant, d'un Hard-Rock racé, et ce, depuis les années 80. Cette passion indéfectible n'a pas montré de fléchissement depuis les années 80, et on peut résolument affirmer que la défection des groupes locaux n'est pas encore pour demain...Les amateurs d'une musique riche, franche et mélodique peuvent donc se réjouir de voir débarquer sur la scène internationale les barcelonais de DAERIA, groupe constitué d'anciens DÖRIA, qui viennent de sortir leur premier album pérennisant la tradition nationale d'un Heavy Metal aux forts relents mélodiques et au tranchant incisif comme une dague en plein cœur du false Metal. Quintette originaire donc de Barcelone ( Angel Ortiz – chant, Víctor Vázquez & Eimel Trejo – guitares, Laura Moral – basse et Joel Marco – batterie), DAERIA s'est donc unifié en 2010, et a patiemment travaillé pour obtenir le son si pur de ce premier longue-durée, qui se place dans une lignée de Metal hautement harmonique aux riffs classiques, le tout agité d'une énergie toute ibère nous ramenant aux grandes heures d'un JUDAS PRIEST hispanique, ou d'un ANGRA délocalisé derrière les Pyrénées. Mais qui dit classique ne dit pas banal, et les compositions présentées sur cet introductif Fenix vont faire se hérisser le poil des aficionados du Hard-Rock du soleil, qui n'est jamais le dernier à réchauffer les cœurs et faire se dresser les poings. Sorti en autoproduction, Fenix dispose d'un son gigantesque parfaitement ancré dans son époque, et distille les hits comme Midas transformait le plomb en or, pour nous offrir une bonne heure de testostérone mâtinée d'une touche de sensibilité latine. Refrains fédérateurs, couplets haut en décibels, breaks fins et soli malins, DAERIA connaît son boulot, et fait tourner l'usine à plein régime, pour un beau résumé de trente ans de sidérurgie Hard-Rock, qui continue aujourd'hui de passionner les foules et de nous mettre des coups de boule.

Mais qu'est-ce qui différencie ce disque du reste de la production actuelle? Son mixage au poil qui laisse de la place à tout le monde? Le niveau de ses instrumentistes qui atteint presque la perfection? Ses chansons simples mais vraiment entêtantes aux motifs accrocheurs? Un peu tout ça à la fois, et sincèrement, en tant que chantre de l'originalité et du décalage à tout va, votre serviteur à pourtant méchamment craqué sur ce Heavy rondement mené, amoureusement ciselé, sorte de mélange entre un ACCEPT vraiment remonté, un PRIMAL FEAR soudainement apaisé, un IRON MAIDEN revitalisé, un ANGRA déchaîné, et un MYRATH expurgé de ses atours orientaux prononcés. Le mélange vous sied? Tout va donc bien dans le meilleur des mondes, puisque le cocktail proposé par cette livraison enflammée est fort en alcool de distorsion, mais allégé par des couches de sirop en vocalises sucrées, mais véritablement investies. Saluons évidemment le travail incroyable accompli par le chanteur Angel Ortiz, qui en plus d'être très photogénique sait se servir d'un micro, imitant parfois quelques légendes de la glotte sans véritablement les piller. Timbre chaud, un peu rauque, qui s'accorde parfaitement du choix de s'exprimer dans sa langue natale très Rock, attitude, petits tics aigus qui s'intègrent parfaitement, et savant numéro qui n'en fait pas trop mais qui harangue le chaland de ses vers charmants. Et si Angel mérite ce premier plan, que dire de ses lieutenants Víctor Vázquez & Eimel Trejo qui tirent tous azimuts, décochant des salves de licks plombés, mais taillés finement pour ne pas écœurer, avant de se faire plaisir en sextolets incendiés pour propulser les chansons dans une dimension supérieure. Ajoutez à ceci de sobres volutes de synthé en contrepoint, histoire d'aérer, et une rythmique solide qui sait frapper et moduler, et vous obtenez un quintette sûr de son fait qui n'a pas hésité à tout lâcher.

Tout lâcher oui, mais avec beaucoup de finesse et d'intelligence. Un simple coup d'oreille au duveteux et précieux « Vacío » et son intro toute en séduction suffit à comprendre que nous n'avons pas affaire à des bûcherons, mais bien à des artisans forgerons, qui ne confondent pas puissance et précipitation, et qui savent nuancer la violence d'émotion. Une fois encore, c'est Angel qui brille et qui retient ses cordes vocales pour leur faire caresser une mélodie fatale, mais il partage le premier rôle avec le batteur Joel Marco, qui s'en donne à cœur joie dans les triples croches et autres syncopes, pour tenter de proposer autre chose qu'une frappe carrée et féroce. Bien sûr, les brûlots d'usage sont tous là, à commencer par le morceau éponyme, qui en plus de cinq minutes nous plonge les oreilles dans un bain bouillant de Heavy Metal entraînant, toujours à la lisière d'un Hard-Rock plus méchant que la moyenne, et brillamment modernisé par une optique subtilement alternative mais pas du tout opportuniste. Et comme les barcelonais n'en sont pas à un paradoxe près, ils flirtent avec les conflits, et enchaînent un titre soft avec une véritable déclaration d'intention, ce « Solo » à l'orée d'un Power Metal domestiqué mais pas castré, qui ose la montée du tempo pour prouver que nous n'avons pas affaire à des rigolos, mais bien à de vrais héros. Et si d'aventure vous cherchiez une dualité légèreté/pesanteur, je ne saurais que trop vous conseiller de vous repaître goulument de « Reina de Corazones », choisi pour être illustré d'une excellente vidéo, et qui manipule avec flair l'art du contre-pied, nous balançant à gauche d'un binaire survolté, pour mieux nous surprendre à droite d'une mélodie aérienne et racée. Mais tel est l'ADN des espagnols, qui survolent un panorama couvrant une surface étendue, et qui jouent brillamment avec les limites pour ne jamais verser dans le radotage de bas étage.

Et entre un « Héroe » qui ose une intro digne d'un DREAM THEATER sous amphétamines, avant de plaquer un riff pur NWOBHM, un « Lestat » syncopé comme le pas d'un vampire s'approchant du cou de sa victime, la guitare en avant et la cadence grandissante, et le final « Gea » qui semble remercier toutes les deux croches l'ACCEPT de Restless And Wild, Fenix a des allures de créature ailée née de cendres encore incandescentes, et qui prend enfin son envol pour déployer sa majesté. Un disque qui agrémente le classicisme d'une touche de contemporanéité bienvenue, et qui prouve s'il en était encore besoin que les espagnols sont toujours les maîtres sur leur propre terrain. Un album à écouter d'urgence pour se convaincre que le Heavy Metal est encore une tendance, et surtout, pour s'abreuver de chansons dynamiques et parfois atypiques, qui placent les DAERIA en pole position d'une nouvelle génération barcelonaise qui a les crocs !     

 

Titres de l'album :

                           01. Fénix

                           02. Cosmos

                           03. Laberinto

                           04. Luz de Luna

                           05. Vacío

                           06. Solo

                           07. Reina de Corazones

                           08. Héroe

                           09. Lestat

                           10. Gea

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par mortne2001 le 03/11/2018 à 14:05
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