Michel Denisot se balade dans les couloirs d’un studio quelconque, et tombe soudainement sur une pauvre stagiaire trop polie pour l’ignorer. Soudainement gonflé par ses certitudes comiques, Michel l’arrête gentiment, la regarde les yeux pleins de malice, et lui sort tout de go :
« Vous avez vu la dernière femme de Gilbert Montagné ? »
(Air gêné de la pauvre fille qui ne sait pas comment se dépêtrer de ce traquenard)
« Heu…non ? »
« Lui non plus ».
Michel ne sourit même pas, et continue son chemin dans les couloirs de ce studio quelconque.
Pourquoi me direz-vous ? Parce que je n’ai pas pu résister, au vu du titre du nouvel album des suédois énervés de JÄRNBÖRD. Films pour les aveugles ? Des mélos qui braillent (pun intended) ? Des comédies musicales au son en 19.1 relevé avec un caisson de suprabasses qui font trembler la colonne vertébrale ? Les SWANS nous avaient déjà fait le coup des bandes-originales pour les aveugles, maintenant, ce sont les films. Audio description, c’est jouable, ce bon Gilbert nous ayant déjà affirmé être un fervent fan de ciné.
Et pourquoi pas après tout ? L’image est tellement surfaite de nos jours…Le cœur s’attache à des valeurs moins tape à l’œil, ou alors…on s’en fout ? JÄRNBÖRD a juste voulu faire le malin avec ce titre et cette pochette sortie d’un épisode très court de « Message à caractère informatif ». Du Hardcore, on retient le côté politisé, mais il ne faut pas oublier l‘humour de la scène qui n’est jamais la dernière à manier l‘ironie. Ces quatre suédois ont déjà une petite carrière derrière eux, un ou deux longs, quelques formats courts, mais 2025 pourrait bien être l’année de leur adoubement par le public Hardcore. Ce nouvel album réservé pour janvier prochain (bonne année, bons nénés) sera donc l’explosion dont leur réserve de gaz avait besoin, et embrasera tous les fans de brutalité à la nordique.
Pince sans rire et terriblement efficace.
Regardez-moi la tronche des gus. Propres, presque nets, le cheveu bien taillé, la barbe sculptée, le t-shirt coloré, la mine enjouée. On leur donnerait le caprice des dieux sans confessions, si l’un d’entre eux ne portait pas un short beaucoup trop court et résolument anti sexy. Mais leur musique, bombastic, avec un son qui emporte le pavillon, est l’argument massue qu’ils opposent à ceux les prenant pour des clowns. Ces mecs-là savent jouer le genre, mais ils savent aussi le détourner pour éviter le sempiternel 25 titres/25 minutes. Ici, on joue condensé, pour ne lâcher qu’une dizaine de morceaux, mais tous indispensables.
Entre le classicisme de blasts qui déboulent sur « Gärning Och Lidande » et la révolte Hardcore de « Vi Ska Ätas, Vi Ska Dömas » (« Nous mangerons, nous serons jugés », ou alors Reverso a fondu un fusible), l’alternance diabolique de « Rockar med Mammon », qui ose un mid tempo souillé par des tactactactacpoum et une basse à la Shane Embury, le tracklisting est sévère, mais heureux. Et du coup, nous aussi.
Si vous voulez tester le truc, un single est déjà disponible. « Okomplicerad » est d’ailleurs un point d’entrée très crédible au monde de ces suédois pas si froids. Entre cette inévitable HM-2 qui lacère les tympans, et ce rythme Crust qui rappelle le meilleur du nordique, sans oublier un chant un peu bancal qui couine comme une collégienne à une séance de dédicace d’un boys-band à la mode, le tableau est complet, et les malheureux à moitié sourds.
JÄRNBÖRD fait partie de cette école de pensée qui respecte les genres les plus extrêmes, mais qui les fait évoluer dans le bon sens. Certes, je ne cracherai jamais sur un album de Grind traditionnel, mais avec un poil de modernité et quelques trouvailles ludiques, le genre se permet des aventures plus complexes, plus lysergiques, et totalement apocalyptiques.
En soufflant le gelé et le bouillant, le quatuor s’autorise des choses pour le moins incongrues, comme ce « Flickan i Snön » qui sonne comme du BLACK FLAG bourré reprenant du DEAD KENNEDYS flingué. Aucune limite n’est donc autorisée, tout est permis, les chansons à boire, les chaussons dans le noir, et surtout, cette irrésistible envie de créer une œuvre unique, dans la plus droite lignée des iconoclastes scandinaves.
Anders Schärberg, Joakim Unger, Dan Widing et Niklas Ehrlin nous permettent donc de commencer l’année avec le sourire, alors que nous savons déjà qu’elle sera immonde, encore plus que ses grandes sœurs décédées. On s’accroche, et on invite un ami malvoyant à la première du remake de « Emmanuelle ». Les yeux resteront vitreux, mais la quequette va durcir. Bienvenue au festival des cannes.
Titres de l’album:
01. Gärning Och Lidande
02. Ormens Väg På Kvarnberget
03. Filmer För Blinda
04. Rockens Heraldik
05. Vi Ska Ätas, Vi Ska Dömas
06. Rockar Med Mammon
07. Okomplicerad
08. Flickan i Snön
09. Dött Format
10. Nu Kör Vi
Alors, j'ai vu les prix et, effectivement, c'est triste de finir une carrière musicale emblématique sur un fistfucking de fan...
20/02/2025, 19:08
J'avoue tout !J'ai tenté avec un pote d'avoir des places le jour J...Quand on a effectivement vu le prix indécent du billet, v'là le froid quoi...Mais bon, lancé dans notre folie, on a tout de même tenté le coup...
20/02/2025, 18:52
Tout à fait d'accord avec toi, Tourista. En même temps, on a appris qu'Ozzy ne chanterait pas tout le concert de Black Sabbath. Du coup, faut essayer de justifier l'achat d'un ticket à un prix honteux pour un pétard mouillé.
20/02/2025, 09:27
Tout est dit.Que ce soir devant 50 personnes dans une salle de quartier ou dans un festival Hirax et en particulier Katon assuré à l'américaine. Parfait.L'album précèdent reste terrible. A voir celui ci.
19/02/2025, 17:51
Hell Yeah!!! Voilà ce que j'appelle une bombe bien métallique.P.S: Il serait bien que ce site passe en mode sécurisé: https car certains navigateurs refusent son ouverture car il est considéré comme malveillant.
19/02/2025, 16:32
Pareil, vu au Motoc l'année dernière plus par curiosité qu'autre chose : et bah c'était excellent ! La passion qui transpire, la nostalgie d'une époque aussi et puis cette énergie !
17/02/2025, 21:39
Oui, Keton de Pena est une légende encore vivante avec son Thrash reprenant pas mal les codes du Heavy. Il y met cette ambiance jubilatoire en forte communion avec les fans (il a dû vous faire le coup du drapeau). Je l'ai vu deux fois il y a une dizaine d'années, c&a(...)
17/02/2025, 13:18
Vu pour la toute première fois en live l'été dernier.Il était grand temps pour moi au vu que j'adore ce groupe...Le concert était laaaaaargement au-dessus de ce que j'en attendais : Ambiance, prestation, joie communicative, ultra-res(...)
17/02/2025, 06:50
C'est un groupe assez ancien en fait, ils ont bien vingt ans de carrière derrière eux. Martin Mendez les a recrutés pour son propre groupe parallèle à Opeth, White Stones, car il est installée à Barcelone. Ils avaient commenc&eacut(...)
15/02/2025, 18:14
Âge oblige, j'ai connu à fond cette époque et elle était formidable. Evidemment, aujourd'hui, il y a internet mais le gros avantage du tape-trading, c'était que, par défaut, un tri s'effectuait, copie après copie (de K7). Aujourd(...)
14/02/2025, 05:50
AAAAh Benediction... Toujours un plaisir de les retrouver. Et en live c'est du bonheur (efficacité et bonne humeur!)
13/02/2025, 18:38
Dans son livre "Extremity Retained", Jason Netherton met en lumière l'importance énorme que ce phénomène a eu lieu dans la naissance de la scène. Tous les acteurs isolés dans leurs coins du monde échangeaient par ce moyen, et cela le(...)
12/02/2025, 01:30