Filth Encrusted

Soul Grinder

23/06/2023

Autoproduction

L’un de mes power-trios préférés revient me conter fleurette sur fond de lyrics tordus et autres instincts vicieux en règle. Je ne cacherai pas que le premier album de cette troupe, The Prophecy of Blight – que j’avais chroniqué en ces colonnes – m’avait fait bonne impression, et même si depuis, ma mémoire m’avait joué des tours en enfouissant cette découverte dans ses recoins les plus sombres, le souvenir est vite remonté à la surface dès « Melting Spree » lancé.

En effet, comment ne pas se rappeler de la voix incroyable d’April Dimmick, bassiste/chanteuse fantasque aux cheveux verdâtres et au maquillage assez approximatif ? Impossible, je vous le concède, et si le style n’a pas vraiment évolué en quatre années, il a atteint un point de maturation qui le rend quasiment imperfectible.

C’est ainsi que Filth Encrusted nous agresse dès sa pochette, avant de nous ruiner les tympans de son Heavy/Thrash sale, fielleux, revanchard et nerveux. Le tout est toujours aussi bien emballé, et à la manière d’un boucher qui vous en met toujours un peu plus, ce second long offre beaucoup, pour une mise minime. A cheval entre Heavy et Thrash, le trio complété par Kevin Ross à la batterie et Alex Avery à la guitare poursuit donc sa route sans manières, avec l’impolitesse crasse des déviants fiers de leurs travers.

La recette est toujours aussi efficace, et se situe quelque part entre ZNÖWHITE, DETENTE, HELLION et quelques autres female-fronted-bands des années 80. La nostalgie est donc de rigueur au moment de se sevrer de ces neuf morceaux tous aussi grincheux et solides, et le résultat ne se fait pas attendre : l’envie d’arborer un make-up louche et de se planter quelques clous dans les poignets vous gagne rapidement.

Loin du joke-band pour épater la galerie friande de comedy-acts éculés, SOUL GRINDER est à prendre au premier degré du second degré, à l’image de tous ces artistes des années 80 qui ne crachaient pas sur un brin de fantaisie ornementale. LIZZY BORDEN, EZO, TWISTED SISTER, WASP, DOOM, SARCOFAGO, j’en passe et de beaucoup plus gratinés, mais SOUL GRINDER n’est pas groupe à se cacher derrière des influences faciles. Non, le trio exhibe, démontre, impose et repose, sur des principes stables, et sur une connaissance aigue des us et coutume d’il y a trois ou autre décades.

Toutefois, le son de cet album est contemporain, et l‘approche est personnelle. Pas question de refourguer deux ou trois riffs moisis en agitant sa tignasse, mais plutôt de jouer des morceaux écrasants avec la confiance aveugle de ceux qui connaissent leurs qualités. Ainsi, selon l’humeur, le groupe peut se placer en convergence d’un Thrash lourd et oppressant et d’un Metal sombre à la METAL CHURCH (« Filth Encrusted »), ou au contraire, se caler près d’un Heavy plein de panache et sans tâche (« Siege Breaker »).

Mais quel que soit l’angle de vision, le résultat est toujours le même : on se laisse séduire par cette simplicité de surface qui repose sur une science du riff exacte, et sur une rythmique volubile et solide. Les deux compères d’April connaissent donc leur boulot, et permettent à leur frontwoman de vociférer comme une sorcière rancunière depuis Salem, sans négliger les backing-tracks qui se montrent extrêmement fiables. De fait, se retrouver en plein cœur de la violence de « Overload » n’a rien d’étonnant, même si en version Speed/Thrash, le groupe se montre plus léger et abordable. Un peu DESTRUCTION en version green hair, un peu HELLION en mode décoiffé et salement énervé, Filth Encrusted évoque la crasse qui s’accumule dans les tuyaux et les conduits, et rend surtout hommage à sa ville d’adoption, Portland, refuge de tous les désaxés les plus sympathiques de l’underground.

La sensibilité est même tolérée, du moment qu’elle soit sincère et amère. De fait, « Plague Pilgrim » dessine un cortège de pèlerins dévorés par la lèpre, au pas lourd, et à la douleur très graphique. A l’aise dans les registres les plus divers, et sur les durées les plus étendues, SOUL GRINDER est un spectacle d’Halloween de toute beauté, et une maison de fous dans laquelle il fait bon flipper. Quoi que les hôtes se veulent rassurants, en lâchant leurs riffs les plus accrocheurs et pertinents (« Chosen », hit d’outre-tombe pour noctambules zombiphiles), et en maintenant l’attention en alerte jusqu’au bout de la nuit.

Cette nuit dure quarante-trois minutes, mais passe comme dans un mauvais rêve. Les inflexions hystériques d’April Dimmick sont toujours aussi irrésistibles, et atteignent une sorte d’apogée dans la plénitude cruelle sur l’impitoyable « All is Dust ».

Après avoir viré la femme de ménage, et les ouvriers venus remettre la bâtisse sur pied, SOUL GRINDER a donc encore une fois cédé aux sirènes de la débauche et de la folie douce. Mais cet album, aussi récréatif soit-il, ne cache nullement le talent de trois musiciens/compositeurs qui assurent dans les grandes largeurs, et qui ne se contentent pas d’un Horror-Metal cheapos et mal foutu.

DEATH SS et HELLION sur la même stage, pour un show dément et décadent. C’est un peu la formule idéale pour décrire ce deuxième album, encore plus maboule que le premier.

 


Titres de l'album :

01. Melting Spree

02. Siege Breaker

03. Your World Is Ours

04. Filth Encrusted

05. Overload

06. Plague Pilgrim

07. Chosen

08. All Is Dust

09. Foul River


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par mortne2001 le 25/09/2023 à 17:12
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