Ça faisait longtemps. D’une, qu’on attendait un premier album des américains de THE BROOD, et ensuite, que je ne m’étais pas envoyé un bon album de Punk Hardcore. Mine de rien, ça manque ces petites choses, on n’y prête pas attention, jusqu’à ce qu’on tombe sur un disque lapidaire qui nous ramène aux lampadaires des années 80, lorsque les groupes poussaient comme des champignons. En activité depuis 2011, ce quintet n’a pas vraiment cherché à accélérer les choses, et a produit à son rythme. Des démos, des simples, des EP’s, mais jamais de full-lenght, jusqu’à aujourd’hui.

Enfin, full-lenght, ok, mais dans des proportions Punk évidemment.

Armageddon Label s’est jeté sur le truc comme des touristes anglais sur un mug de Diana, l’emballant dans une campagne promo ad hoc. Le label ne tarit pas d’éloges sur cette nouvelle signature, qu’il annonce comme la news Hardcore de cette fin d’année 2024. Et je le comprends, oh oui. Je le comprends.

Enregistré par Steve Roche au Permanent Hearing Damage, masterisé par l’increvable Brad Boatwright à l’Audiosiege, flanqué d’un artwork et d’un logo dessinés par Max Mattoon, For the Dark fouille dans les poubelles du Hardcore à la recherche de la vérité américaine. Une vérité crue, qui ne fait pas plaisir à entendre, mais qui a le mérite d’être lucide. Revendiquant quelques influences fameuses (UK82, POISON IDEA, DIE KREUZEN, THE STALIN, TOTALITAR), THE BROOD profite d’un baptême piqué à David Cronenberg pour intriguer, manigancer, avant de porter l’estocade fatale. Une rythmique purement G.B.H, une dualité vocale male/femelle qui branche les prises dans le bon sens, et évidemment, des guitares qui se satisfont très bien d’un ou deux riffs par morceau.

Ancien et/ou membres de LOST CAUSE, WITCH HUNT, ENDLESS NIGHTMARE, CAUSTIC CHRIST, MISCHIEF BREW, THE PIST, et THE DISSIDENTS, les THE BROOD sont les enfants de D.R.I et GENOCIDE, les cousins des GERMS et d’AGNOSTIC FRONT, et l’équivalent Punk des MISFITS et des CRAMPS. Evidemment, tout ça tient dans un gobelet vide, et les idées restent simplissimes. Mais l’efficacité du truc est telle qu’on se laisse embarquer sans trop poser de questions, et ce, dès que le hit improbable « Sinkhole » vous fait trembler les arpions.

Ned Wells (chant), Janine St. Clair (basse/chant), Shawn St. Clair & Bill Chamberlain (guitares) et Erik A (batterie) sont des héros des temps modernes, qui restent dans l’ombre par pure humilité. Si la vitesse de l’ensemble donne des fourmis dans les pieds, si la tutelle de DISCHARGE est parfois très présente (« Long Gone »), si la production est aussi épaisse que rêche, l’énergie est incroyable, et la street attitude totalement crédible.

Le résultat ? Immédiate et inévitable. La bonne humeur revient au galop, et on oublie pour un instant la merde dans laquelle nous nous engluons depuis quelques années. Le monde est au plus mal, les menaces fleurissent comme des pissenlits, c’est la chienlit, mais on a bien le droit de tout foutre en l’air avec joie.

C’est le message propagé par cette bande de dégénérés, qui utilisent les codes les plus élémentaires du Rock n’Roll pour nous défoncer les tympans. Toujours fluide, jamais vraiment méchant, mais agressif comme un troupeau d’enfants en vacances de printemps, For the Dark est un plaisir mineur pour majeurs qui sont obnubilés par la chute de la société moderne, et qui en dénoncent les excès et le manque de perspectives.

Pour en arriver-là, il faut brailler. Alors, faites confiance à  Ned Wells et Janine St. Clair pour se sortir les tripes, mais aussi les doigts du fut. Valsant parfois près d’un Rock n’Noise digne des poids lourds de POISON IDEA (« October Dreams »), THE BROOD a tout compris à la philosophe Hardcore, et nous fait même regretter de ne pas avoir eu l’envie d’enregistrer plus qu’une poignée de morceaux bien avant.

Mais ne soyons pas bégueule, ce premier album est de ceux qui marquent. Au fer rouge, mais aussi aux acouphènes fourbes. Prenant toute son ampleur en concert, cette musique rageuse, entre Metal et Punk est un slogan qu’on balance durant une manif altermondialiste, mais aussi un gros mollard qu’on crachouille sur un CRS un peu trop zélé des fouilles.

Préparez les pavés, la bande organisée arrive. Elle est bordélique, peu rigoureuse, insistante dans ses revendications musicales, mais sincère. Hardcore à corps pour un renouveau qui ne viendra jamais. Ce qui ne nous empêche pas de gueuler. Après tout, la contestation est encore légale.                                                                                                                                                                                                     

Titres de l’album:

01. Sinkhole

02. Destroy Fuckers

03. Burning With The Sands Of Time

04. Shallow Graves

05. Enemy

06. The Best Parts Of You Died

07. Cut The Cord

08. Long Gone

09. Culture Of Piss

10. Broken Apart

11. October Dreams

12. Outsider Life

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