Entre HAIL SPIRIT NOIR et moi, c’est une longue histoire d’amour. Si je n’ai abordé leurs albums qu’à partir de Mayhem in Blue, Pneuma et Oi Magoi m’avaient profondément marqués, à tel point que j’y avais vu un avenir autre pour le Black Metal le plus imaginatif, sorti des griffes de l’avant-garde pour explorer les possibilités progressives. Car une fois pour toutes, il convient d’affranchir les grecs de cette encombrante étiquette avant-gardiste. Non HAIL SPIRIT NOIR n’est pas à la pointe de l’abstraction, mais bien leader d’une scène à la créativité bouillonnante et aux idées multiples et valides.
Plus de dix ans au service de la cause, ça laisse des traces. Pas moins de six longue-durée pour définir un son, une approche et une éthique, et y parvenir avec une classe folle. Voilà peu ou prou résumé le parcours des résidents de Thessalonique, magnifique ville portuaire qui s’accorde très bien des accords joués par ses enfants chéris. En 2024, le sextet n’a pas vraiment changé de façon de procéder, même si ce sixième album est sans conteste leur plus agressif et plus violent. Plus proche d’un Black Metal atmosphérique et mélodique, mais toujours aussi farouchement attaché à sa liberté, Fossil Gardens pioche dans le passé pour occuper le présent, et éventuellement voir l’avenir arriver de façon sereine.
Mais rien n’a jamais été serein avec les grecs. Loin s’en faut.
Dimitris Douvras (ROTTING CHRIST, NIGHTSTALKER) et Magnus Lindberg (CULT OF LUNA), en charge de l’enregistrement, de la production et tout ce qui en découle, ont eu fort à faire au moment de trouver le bon son pour ce jardin des fossiles. Mais la doublette a peaufiné une production incroyablement dense et claire, qui convient à tous les morceaux, qu’ils soient plus contemplatifs, ou au contraire, plus impliqués. On le note dès les premières de « Starfront Promenade », qui une fois encore utilise des mélodies stellaires pour nous faire oublier la terre.
J. Demian (basse, guitare), Theoharis (guitare/chant), Haris (claviers), Foivos (batterie), Sakis Bandis (claviers), Cons Marg (chant) n’ont donc accordé aucune concession, produisant de fait l’un des travaux les plus fascinants de leur carrière. Le soin apporté aux détails, les transitions fluides, les contrastes prononcés trouvent leur apogée dans une mer de chœurs évanescents, semblant émaner d’un ciel chargé en civilisations extraterrestres. Avec son lot d’éléments Gothic Metal, sa mélancolie que l’on peut parfois prendre pour de la méchanceté sournoise, HAIL SPIRIT NOIR ne se contente pas de rester assis sur son trône, et continue de participer aux batailles, pourfendant de sa lame rutilante des ennemis sans pitié. Cet affrontement est parfaitement raconté par le gigantesque « The Blue Dot », qui en six minutes donne le sentiment d’exposer plus d’idées que des albums entiers.
Bien sûr, les influences sont toujours là, mais de mieux en mieux digérées et gérées. La grandiloquence, la transversalité, la théâtralité transforment Fossil Gardens en voyage intérieur à la recherche d’une autre vérité, moins évidente, et moins complaisante. Comme si notre ego était branché sur l’au-delà, l’au-delà des étoiles, des galaxies, et des civilisations anciennes.
Entre un PINK FLOYD débridé, un Devin Townsend inspiré, un SHINING moins empesé, et un MAYHEM très ouvragé, HAIL SPIRIT NOIR se nourrit à toutes les gamelles, et revient repu, mais les poils chargés d’histoire. « The Temple Of Curved Space », gros morceau habilement placé en deuxième de couverture tisse la toile gluante qui nous emprisonnera et nous obligera à écouter le message exposé, sans ambages, et avec une voix claire et puissante. Cette opposition entre sérénité et tourments est assurément l’élément clé de ce nouveau chapitre, qui joue sur les oppositions avec une intelligence rare, et souvent au sein d’un même titre.
Aussi puissant et dévastateur que n’importe quel album de Black contemporain, mais plus inventif que quatre-vingt-dix pour cent de la production, Fossil Gardens défie les KRALLICE, les DEATHSPELL OMEGA sans tomber dans le piège de leur avant-gardisme et de leur abstraction, et donne une belle leçon de créativité aux suiveurs.
« The Road To Awe », le plus gros segment, propose une synthèse passionnante des opinions musicales exprimées. Sous des atours dramatiques et une atmosphère intime, ce titre progressif à outrance jette les bases de la philosophie, et nous donne le tournis de ses guitares gelées et de son chant versatile. Entre Heavy incorruptible, Post-Punk larvé et opératique développé, « The Road To Awe » est une pierre angulaire de taille impressionnante, qui met la concurrence à mal en l’obligeant à viser cette perfection.
On connaît les travers des musiciens les plus ambitieux. Leur complaisance face à leurs idées les plus dispensables, leur façon d’étirer à volonté des thèmes qui auraient mérité d’être plus concis, mais force est d’admettre que HAIL SPIRIT NOIR ne nous a jamais déçus, car toujours maître de ses orientations et de leur concrétisation. Fossil Gardens n’échappe évidemment pas à la règle, et sans tenter le coup de la boule de cristal, j’ai le sentiment que ce sixième album a les moyens de devenir le grand classique d’une discographie déjà tellement riche.
« Fossil Gardens » me donne raison en conclusion, et nous laisse hébétés, hagards, et médusés par tant de talent. HAIL SPIRIT NOIR est toujours cette hydre à six têtes que l’on affronte par inconscience ou innocence, et qui finit toujours par vous mettre au tapis. Dans le meilleur des cas.
Titres de l’album :
01. Starfront Promenade
02. The Temple Of Curved Space
03. Curse You, Entropia
04. The Blue Dot
05. The Road To Awe
06. Ludwig In Orbit
07. Fossil Gardens
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