L’histoire du Thrash est vraiment passionnante en soi. Certes, je ne suis certainement pas l’observateur externe le plus objectif qui soit, puisque je baigne dans les remous de ce jacuzzi musical torride depuis ma plus tendre adolescence, mais je ne peux m’empêcher de penser qu’il s’agit là de la frange de l’extrême à la légende la plus envoutante qui puisse exister.
Outre les groupes référence que nous connaissons tous, le genre est peuplé d’OS en tous genres, dont certains ont acquis avec le temps un statut culte mérité ou pas, mais il n’est pas rare de tomber sur un exemple oublié, ou tout simplement passé à côté de notre vigilance pour cause de mauvaise distribution.
En ces temps reculés, trouver un label investi n’était pas chose facile, et il arrivait souvent qu’après un premier LP, les choses se gâtent…
C’est plus ou moins la mésaventure qu’ont connue nos héros Canadiens du jour, puisque après plusieurs démos et un premier longue durée, leur avancée stoppa net, pour connaître un très long hiatus…
Si long d’ailleurs qu’on les pensait perdus pour le compte, égarés dans les arcanes de l’oubli du temps, mais c’était sans compter sur un label de passionnés comme Xtreem Music pour les extirper de leur condition subie et immérité.
AGGRESSION, c’est donc une histoire Québécoise dont le point d’origine remonte à 1985, l’année de leur première démo, vite suivie par une cassette live et une seconde présentation un an plus tard. Battant alors pavillon ASYLUM pendant quelques mois, le combo formé par les guitaristes fous Sasquatch et Burn put enfin exprimer ses vues sur un Thrash violent et hargneux en 1987, grâce au label Banzai records qui distribua leur premier album The Full Treatment, qui leur permis de tourner dans de meilleures conditions et avec un répertoire un peu plus étoffé.
Et si les choses avaient suivi leur cours normal, nos cinq cousins du Nord de l’Amérique auraient dû poursuivre leur travaux, et peut être sortir ce fameux LP composé en 1986, Forgotten Skeleton, qui finalement laissa sa place un an plus tard à The Full Treatment…Mais comme parfois, A et B ne mènent pas forcément à C, il leur faudra attendre la bagatelle de dix-huit années pour que cet album voit enfin le jour, en 2004, via Great White North Records.
Depuis, encore une longue période de silence, quelques concerts de reformation qui ne menèrent à rien, dont une participation au Montreal Massacre Festival pour « promouvoir » la tranche de passé enfin exhumée. Le hiatus s’étendra jusqu’en 2015, et trouvera finalement sa conclusion dans la parution d’un nouvel effort, celui que vous écouterez une fois cette chronique lue, puisque évidemment, je suis là pour vous en convaincre…
Depuis leurs débuts très influencés par les cadors inévitables de SLAYER, POSSESSED et autres KREATOR, les Canadiens dont le line up d’origine ne trouve plus écho que dans le leadership de Denis "Sasquatch" Barthe ont évolué vars un Thrash subtilement teinté de Death soft, ce qui rend leur musique encore plus efficace, rapide et dangereuse.
Et pour éviter des effets de manche dispensables, admettons-le de suite, Fragmented Spirit Devils est une excellente surprise qui justifie tous les efforts de maintien à la surface fournis par le groupe. Non contents de proposer la plupart du temps un Thrash féroce et solide, le quintette touche un peu à tout, se permettant même des allusions Heavy dignes du meilleur de la NWOBHM, et même quelques glissements Hardcore absolument délicieux dans la forme et le fond.
Il semblerait donc que la sortie de la compilation Fractured Psyche Demons l’année dernière et la tournée en soutien qui s’ensuivit leur aient aiguisé les crocs, puisqu’ils reviennent enfin avec un LP officiel qui dame largement le pion à bien des ensembles revivalist pourtant assez affûtés.
Dans l’option Thrash Canadien, inutile de le nier, les AGGRESSION tiennent plus des RAZOR que de nos chouchous de VOÏVOD. Leur Thrash brutal est éminemment rapide, violent, méchant, avec ce petit plus de savoir-faire que possèdent les héros d’époque qui n’ont jamais oublié pourquoi ils ont un jour choisi de faire plus de bruit que les autres.
Avec ses quarante minutes de musique pour dix morceaux, Fragmented Spirit Devils et son titre fleurant bon le Death des nineties incarne l’archétype de l’album de Thrash quasiment parfait, ce qu’il pourrait être d’une certaine façon. Et après une intro inquiétante et inquisitoire (« As Play In The Fields Of Satan »), nous rentrons dans le vif du débat avec un lapidaire et grave « Chapel Of Horrors », qui résonne d’un tocsin funèbre pour une messe en gravité majeure, durant laquelle auraient pu officier conjointement les MESSIAH et RIGOR MORTIS. Riffs qui circulent dans les allées pour faire la quête, doublement des parties vocales pour un rendu brutal, et cavalcade d’une rythmique qui ne s’en laisse pas compter, et les BPM non plus. Tout ça donne le la, comme ces multiples breaks menaçants qui accentuent encore plus la fournaise, et le quintette enchaîne sans temps mort sur le mid tempo diabolique de « Unleashing The Ghost » qui dégénère très vite en mash-up de SLAYER et RAZOR, pour une débauche de méchanceté presque gratuite qui ne rechigne pas à tâter du Death à la MORBID ANGEL via quelques passages en blasts bien sentis.
Et après un interlude baignant l’acoustique d’un TESTAMENT dans un dialogue de goules dément, chœurs évangéliques ironiques à l’appui (« Insanity Without Indulgence »), AGGRESSION continue la sienne via le truculent « Halo of Maggots » qui une fois de plus joue la carte de l’outrance Gore à la RIGOR MORTIS de « Demons ». Cette bonne humeur et cette soif de jouer font plaisir à entendre, mais toute cette énergie n’empêche pas les Canadiens de se faire plaisir en noyant le poisson pour un long « Furnace Creek » qui ose enfin un peu de mélodie pour mieux la fracasser après quelques minutes sur un platane Thrash solidement planté dans le sol.
Et comme ces gueux ne peuvent s’empêcher de nous prendre à revers, ils osent l’exercice Heavy à la NWOBHM sur un « Dark Shadow Crossing » qui lui non plus ne tarde pas à s’échauffer l’esprit et accélérer la cadence, tout en maintenant l’emprise sur un refrain fédérateur très Bay Area.
AGGRESSION se fend même d’une auto citation, en reprenant dans le texte un de leurs plus vieux morceaux qu’on trouvait déjà sur leur première démo, « Evil Pox », qui tranche de son Thrash épais et médium avec la démence ambiante.
Et comme décidemment ils ne font rien comme tout le monde, ils invitent sur le final Manny Charelton de NAZARETH à venir planter des soli sur leur reprise improbable du « Razamanaz » du même groupe, qui offre à Fragmented Spirit Devils une porte de sortie surprenante, mais groovy en diable et à la fermeture boogie délectable.
Avec ce second « véritable » album en…trente ans, les Canadiens renouent avec leur propre histoire, mais aussi avec celle d’un style musical qui décidemment nous réserve toujours son lot de surprises. Fragmented Spirit Devils agit donc comme une métonymie parfaite, et en mettant de côté les prétentions critiques trop littéraires, incarne le comeback d’un groupe mineur qui a retrouvé une troisième jeunesse, et qui fait la nique à bien des gamins qui pensaient avoir tout compris.
C’est sans doute pour ça aussi que j’aime tant le Thrash…Parce que ça reste une affaire de sales drôles, et qu’à presque cinquante ans, on peut toujours revivre son adolescence sans avoir à remonter dans le temps.
Titres de l'album:
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