Free Angel Express

American Tears

23/10/2020

Deko Entertainment

Je vais poser deux ou trois trucs ici avant que vous ne déposiez réclamation. Malgré ce qu’on pourrait croire eu égard à la pochette de cet album et son label, AMERICAN TEARS n’est PAS un groupe de Hard Rock mélodique ou d’AOR. Ça n’est pas non plus un jeune groupe fondé dans les années 2010 comme on pourrait le penser en regardant sa discographie la plus récente. Il ne s’adresse pas forcément non plus aux meutes hardantes qui espèrent d’un disque qu’il les fera headbanguer jusqu’au bout de la nuit. Une fois ces quelques précisions bien intégrées, nous pouvons donc passer à l’analyse du produit en question. Loin d’un Hard Rock mélodique auquel nous sommes coutumiers dans ces colonnes, AMERICAN TEARS pratiquerait plutôt ce qu’on désigne sous le terme péjoratif de Pomp Rock, ce Progressif de la fin des années 70, que les ELP et autres évolutifs techniques aimaient graver sur vinyle pour offrir à leur fans des plans interminables et clairement phagocytés par les claviers. Une fois cette donnée portée à votre connaissance, vous avez le choix de continuer ou pas à lire cette chronique, qui risque de vous dévoiler un contenu vous laissant indifférent. Car le projet est né lui aussi dans les années 70, et a produit trois albums pour la major Colombia, Branded Bad en 1974, Tear Gas en 1975 et Powerhouse en 1977. Il faut donc chercher l’inspiration de ces musiciens dans le Rock progressif des seventies, même si le projet relancé il y a quelques années pourrait laisser penser à une adaptation à des exigences plus modernes. Mark Mangold, claviériste responsable de la renaissance du groupe en 2018 a depuis enregistré quelques disques plus ou moins recommandables, dont Hard Core en 2018 et White Flags en 2019, et c’est très logiquement par souci de régularité que le bonhomme s’en revient en 2020 avec un troisième LP post-reformation sous les bras.

Cette fois ci, Mangold (DRIVE SHE SAID, TOUCH) s’est entouré d’autres pointures dont Alex Landenburg (STRATOVARIUS, KAMELOT, RHAPSODY) à la batterie et Barry Sparks (ex-UFO, DOKKEN) à la basse, accueillant aussi en tant que guests Doug Howard (TOUCH, UTOPIA, EDGAR WINTER BAND) et Charlie Calv (ANGEL, SHOTGUN SYMPHONY). Un line-up de première classe donc, pour un sixième LP officiel, et une nouvelle fois, il n’est pas surprenant de constater que ce Free Angel Express est un train drivé par une locomotive de claviers, comme à la grande époque des combos progressifs des années 70. Il est donc inutile de vous attendre à un déferlement de mélodies west-coast posées sur un tapis de velours rythmique, puisqu’ici, le propos est synthétique, itératif, insistant et redondant, mais si vous faites l’effort de vous plonger dans cet album, vous nagerez en eaux créatives vraiment puissantes au courant porteur, pour finalement atterrir sur une plage au sable fin et à la végétation luxuriante. D’ailleurs, Mangold, pour ne laisser planer aucun doute n’impose qu’un seul morceau dit « normal » en ouverture de ce nouvel effort, le single « Sledgehammered » qui n’a pas grand-chose à voir avec Peter Gabriel, mais qui pourra vous amadouer de son énergie Pop-Rock eighties légèrement futuriste sur les bords. Ensuite, il vous faudra accepter la philosophie même du concept, avec deux titres frôlant les vingt minutes à eux deux, et qui vous entraîneront sur la piste d’un progressif ancien remis au goût du jour d’une production plus moderne. Cette dernière, assez atypique confère à la batterie une patine synthétique qui peut surprendre et dérouter, mais nivelle justement les instruments pour qu’ils s’accordent au clavier sans le dénaturer. C’est donc assez particulier, mais on retrouve du ELP, du IQ parfois, du YES des années 80, un peu de MARILLION en plus vulgarisé, et « Free Angel Express/Resist/Outta Here » de nous faire glisser dans le temps, entre 84 et 86, lorsque les mastodontes des années 70 devaient faire quelques concessions eighties pour ne pas être largués.

Mais ici, tout est précis, calculé, et ce côté un peu froid pourra rebuter les amateurs de sensations fortes et de jeu spontané. Heureusement pour nous, tout n’est pas ici qu’élitisme instrumental et musique pour un cénacle restreint, puisque Mark se répand parfois dans une Pop riche qui peut compter sur le jeu de batterie hallucinant de Landenburg pour être encore plus efficace. En témoigne « Not For Nothing », au tempo bancal et constamment sur la brèche, qui laisse libre cours à Mark pour manipuler ses synthés avec force et dextérité. Mais soyez bien conscients que la guitare ici est polie, rarement aux avant-postes, et qu’elle ne se laisse que très peu distordre pour ne pas rendre le projet trop agressif. « Glass » sonne par exemple comme du MIKE AND THE MECHANICS un peu plus tendu, et seul « Roll The Stone » pourra à la rigueur vous rappeler les tubes les plus accessibles du RUSH d’il y a quelques décennies. D’un autre côté, les accès de fièvre classiques tombent toujours à pic pour relever le niveau de puissance d’un album assez calme, et c’est avec plaisir qu’on découvre la déconstruction de « Blue Rondo » qui en appelle clairement à une rencontre entre le YES de tradition et l’écurie de Magna Carta. Beaucoup de percussions, des accents un peu jazzy, mais surtout, des giclées de claviers qui sont parfaitement conscients d’être le centre d’attention, sonnant parfois comme manipulés par Jon Lord ou Ken Hensley (« Can’t Get Satisfied »). Le tout sur plus d’une heure et vingt minutes de musique, timing qui pourra paraitre salement rédhibitoire, ce que je comprends tout à fait.

Mais rejeter cet album pour ses prétentions classiques, ou parce qu’il ne gravite pas dans la galaxie Hard-Rock serait une injustice flagrante. Mark Mangold a une fois encore méchamment soigné sa copie, et nous livre un excellent cru, témoignage de son vécu dans les seventies, lorsque ce style était encore roi. Pas question ici de longues plages démonstratives ou contemplatives, mais bien de véritables chansons, ciselées, animées par des mélodies pures (« Woke »), certes d’un autre temps, mais toujours appréciables en 2020 pour qui n’a pas oublié ses classiques. Je peux aussi comprendre que cette dominance de tonalités synthétiques a de quoi rappeler le pire des années 80, mais Mark a toujours ce touché incroyable pour les faire sonner énergiques, s’approchant d’une Pop de haut niveau (« So Glow »), qui n’est pas sans évoquer le MARILLION le plus expérimental des années 90. Il est par contre assez surprenant de constater que le bonus-track « Tusk (Blood On The Ivory) » a été réservé à la version digitale, le contraire eut été plus logique, mais au final, et avec un peu d’efforts, il est relativement facile d’apprécier ce sixième chapitre de la saga AMERICAN TEARS, à condition de ne pas être obnubilé par des questions de puriste « Metal ».

                                                                                                                                                                                                        

Titres de l’album:

01. Sledgehammered

02. Set It On Fire

03. Free Angel Express/Resist/Outta Here

04. Not For Nothing

05. Glass

06. Everything You Take

07. Roll The Stone

08. Blue Rondo

09. Can’t Get Satisfied

10. Woke

11. Shadows Aching Karma

12. So Glow

13. Rise To The Light

14. Tusk (Blood On The Ivory)


Facebook officiel


par mortne2001 le 05/11/2020 à 15:13
78 %    852

Commentaires (0) | Ajouter un commentaire

pas de commentaire enregistré

Ajouter un commentaire


Derniers articles

Winter Rising Fest 2024

Simony 20/11/2024

Live Report

Mars Red Sky + Robot Orchestra

mortne2001 17/11/2024

Live Report

Benighted + Anesys

mortne2001 02/11/2024

Live Report

Dool + Hangman's Chair

RBD 25/10/2024

Live Report

Rendez-vous

RBD 21/10/2024

Live Report
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
Simony

Oui j'ai mes commentaires qui se mettent en double des fois....   

21/11/2024, 09:20

Orphan

"...jouer un concert en Arabie Saoudite. Un honneur absolu et un privilège. Les loups du nord apporteront la tempête hivernale à Riyad !"Un véritable honneur absolue de jouer en Arabie Saoudite, la ou les apostas sont condamnés &agra(...)

21/11/2024, 08:46

Jus de cadavre

Est-ce qu'ils seront au Anthems Of Steel 2025 ? Pardon Simo   

20/11/2024, 22:29

Simony

Et ils seront au Anthems Of Steel 2025 !

20/11/2024, 17:30

Simony

Et ils seront au Anthems Of Steel 2025 !

20/11/2024, 17:30

Saul D

La relève de Manowar ( vu le look sur la photo)?

20/11/2024, 14:08

Tourista

Quand on se souvient du petit son des années 80...  Mais la prod ne fait pas tout, ça reste du pilotage automatique.   C'est pas avec un truc pareil que je vais me réconcilier avec eux, et ça fait 20 piges que ça dure. 

19/11/2024, 21:57

Jus de cadavre

Album jouissif ! Le pied du début à la fin !

15/11/2024, 17:19

MorbidOM

J'avais pas vu cette chronique. J'étais au soir avec Ulcerate et je n'ai pas du tout regretté...Le lieu : il y a forcément un charme particulier à voir ce genre de concert dans une église, surtout que le bâtimen(...)

15/11/2024, 09:51

MorbidOM

@Gargan : ils n'ont pas pu jouer l'année dernière 

15/11/2024, 08:01

Gargan

Oh purée les « clins d’œil » au Hellfest et à Glaciation  

15/11/2024, 07:18

Gargan

Encore Magma!

14/11/2024, 20:20

Tourista

Le who's who des tueurs en série. Un plus gros budget pour l'artwork que pour le clip, assurément.  (...)

14/11/2024, 09:20

Humungus

Ca c'est de la pochette !

13/11/2024, 09:18

Tourista

Ben voyons. Le mec qui planque des jetons sous la table !

12/11/2024, 17:51

Gargan

QUADRICOLOR 

12/11/2024, 13:23

Humungus

Pas mieux.3 lettres : ÂME.

12/11/2024, 11:14

Tourista

5 lettres : MAUVE. 

12/11/2024, 06:50

Buck Dancer

J'imagine que c'est sans Alex Newport, donc, pour moi, zéro intérêt cette reformation.

11/11/2024, 16:15

Humungus

NAILBOMB ?!?!?!?!Putain de merde !!! !!! !!!J'savais pas qu'ils étaient de nouveau de la partie !!!Du coup, je regarde s'ils font d'autres dates...Ils sont à l'ALCATRAZ où je serai également !Humungus = HEU-RE(...)

11/11/2024, 10:09