Funeral Winds & Crimson Sky

Krolok

21/12/2021

Osmose Productions

KROLOK, fondé en 2011 nous propose avec son deuxième album, de jeter un regard vers le passé, lorsque les ruines et l’obscurité régnaient sur les paysages désolés. Je ne suis pas foncièrement contre, d’autant que le Black a souvent tendance à se retourner pour observer sa propre histoire, imposante, noire come la nuit, et internationale. Né dans les pays nordiques, le mouvement s’est ensuite répandu comme un sort ancien dans le monde entier, et il n’est guère étonnant que la Slovaquie ait été envoutée elle aussi. Et quatre ans après Flying Above Ancient Ruins, qui déjà flottait tel un corps désincarné au-dessus des ruines musicales d’un héritage lourd à porter, Funeral Winds & Crimson Sky reprend les mêmes concepts, mélange la brume, le vent, la solitude et les cieux pourpres pour nous entraîner dans un monde de désolation harmonique et de Black atmosphérique de premier choix.      

Mené de gant clouté de fer par HV aka Vlado Moravcik, KROLOK plonge donc la mémoire la première dans les souvenirs, et le leader de ce trio incorruptible s’est même permis une sacrée allusion à son propre parcours, en proposant sur ce nouvel album une réinterprétation d’un titre de son ancien groupe, HELCARAXE, composé en 2003. On trouvait ce morceau sur l’une des démos du groupe, et 2021 lui offre donc un éclairage tamisé nouveau, qui s’intègre parfaitement à l’ambiance développée sur ces six morceaux longs et envoutants, au son rachitique, aux basses absentes, et aux arrangements gentiment désertiques sur les bords.

Pourtant, aussi économique soit le traitement, KROLOK parvient une nouvelle fois à nous embarquer dans son voyage au long-cours sans sombrer dans le lo-fi inécoutable ou le raw-Black complaisant. Certes, les synthés ludiques ne sont pas vraiment portés sur la grandiloquence, certes la distorsion sort d’un vieux dix watts à la membrane fatiguée, certes la basse doit se contenter de ses fréquences les plus médiums, certes le chant se fond dans un écho brûlant et classique, mais le tout dégage un parfum nostalgique qui nous renvoie au meilleur de l’économie MASTER’S HAMMER ou aux débuts d’IMMORTAL, avec ce son si sec, et cette absence de perspectives d’évolution.

Prônant des valeurs de Black atmosphérique amateur sur fond de traditionalisme poussé, Funeral Winds & Crimson Sky reprend à son compte les canons historiques et les dogmes en vogue dans les années 90, avant que le genre ne se sente pousser des ailes et des prétentions artistiques grandioses ou un décorum de cirque clinquant. Ici, tout est brut, immédiat, les riffs rappellent le pire du Bestial Thrash sud-américain des eighties, ou même parfois les licks les plus évidents du Hard-Rock le plus formel, mais une fois les pièces du puzzle assemblées, une noblesse décharnée se dégage de l’ensemble, comme une célébration païenne du fond des temps qui remonte à la surface de la mémoire.

Jouant avec les tempi, imposant des cassures à la BATHORY Viking, KROLOK reste fidèle à son éthique, et propose de longues digressions évolutives, basées sur des humeurs, toutes maussades et grises. Etonnamment catchy lorsque le ton l’impose, « The Reptile Abyss Beneath Dowina » s’incruste dans les neurones et contamine le libre arbitre, nous poussant à taper du pied et à headbanguer sur une musique pourtant peu propice aux expressions physiques. Là est l’art du trio slovaque, ne jamais se corrompre, mais s’autoriser quelques gimmicks plus populaires, tout en restant collé à des principes de nihilisme sonore.

Le son, qui tient autant de la démo élaborée que du EP sorti à la sauvette sur un micro-label renforce cette sensation de voyage dans le temps et de secret bien gardé, et l’un dans l’autre, on se laisse séduire par ce mysticisme en brouillard de l’âme, nous immergeant dans une partie de l’histoire du Black Metal qui aujourd’hui encore, fascine tellement la jeune génération.       

  

Les gros morceaux, dont « Black Lore Of The Fens » ou le final « Funeral Winds & Crimson Sky » nous immergent dans les débuts des scènes suédoise et norvégienne, avec cette envie de se rapprocher de tout ce qui est laid et granuleux, pour éviter que le grand public ne cherche à percer les mystères des arts anciens. On aime ces progressions qui prennent leur temps pour imposer un point de vue, ces claviers bourrés d’écho et de delay, et ce chant enterré dans le mix dont les litanies effraient la plèbe, et on apprécie particulièrement l’absence totale de compromis.

  

KROLOK parvient donc à faire du presque vieux avec de l’antique, et sans s’inscrire dans une démarche artistique nostalgique, à retrouver l’essence même d’un genre qui à ses débuts, n’avait cure des astuces de production, ou d’une quelconque dextérité instrumentale. Bande son idéale de l’absence d’espoir actuelle, Funeral Winds & Crimson Sky est l’illustration d’une époque évoluant à l’aveugle, sachant très bien ce que l’avenir lui réserve de plus funeste, mais qui en accepte les conséquences avec une grimace de dégoût sur le visage.

Mais un dégoût lucide.

              

                                                                                                                                                                                          

Titres de l’album:

01. Black Lore Of The Fens

02. Towards The Duskportals

03. The Reptile Abyss Beneath Dowina

04. Path To The Haunted Ruins

05. Unveiled Subterranean Treasures

06. Funeral Winds & Crimson Sky


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par mortne2001 le 20/12/2021 à 15:42
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