KROLOK, fondé en 2011 nous propose avec son deuxième album, de jeter un regard vers le passé, lorsque les ruines et l’obscurité régnaient sur les paysages désolés. Je ne suis pas foncièrement contre, d’autant que le Black a souvent tendance à se retourner pour observer sa propre histoire, imposante, noire come la nuit, et internationale. Né dans les pays nordiques, le mouvement s’est ensuite répandu comme un sort ancien dans le monde entier, et il n’est guère étonnant que la Slovaquie ait été envoutée elle aussi. Et quatre ans après Flying Above Ancient Ruins, qui déjà flottait tel un corps désincarné au-dessus des ruines musicales d’un héritage lourd à porter, Funeral Winds & Crimson Sky reprend les mêmes concepts, mélange la brume, le vent, la solitude et les cieux pourpres pour nous entraîner dans un monde de désolation harmonique et de Black atmosphérique de premier choix.
Mené de gant clouté de fer par HV aka Vlado Moravcik, KROLOK plonge donc la mémoire la première dans les souvenirs, et le leader de ce trio incorruptible s’est même permis une sacrée allusion à son propre parcours, en proposant sur ce nouvel album une réinterprétation d’un titre de son ancien groupe, HELCARAXE, composé en 2003. On trouvait ce morceau sur l’une des démos du groupe, et 2021 lui offre donc un éclairage tamisé nouveau, qui s’intègre parfaitement à l’ambiance développée sur ces six morceaux longs et envoutants, au son rachitique, aux basses absentes, et aux arrangements gentiment désertiques sur les bords.
Pourtant, aussi économique soit le traitement, KROLOK parvient une nouvelle fois à nous embarquer dans son voyage au long-cours sans sombrer dans le lo-fi inécoutable ou le raw-Black complaisant. Certes, les synthés ludiques ne sont pas vraiment portés sur la grandiloquence, certes la distorsion sort d’un vieux dix watts à la membrane fatiguée, certes la basse doit se contenter de ses fréquences les plus médiums, certes le chant se fond dans un écho brûlant et classique, mais le tout dégage un parfum nostalgique qui nous renvoie au meilleur de l’économie MASTER’S HAMMER ou aux débuts d’IMMORTAL, avec ce son si sec, et cette absence de perspectives d’évolution.
Prônant des valeurs de Black atmosphérique amateur sur fond de traditionalisme poussé, Funeral Winds & Crimson Sky reprend à son compte les canons historiques et les dogmes en vogue dans les années 90, avant que le genre ne se sente pousser des ailes et des prétentions artistiques grandioses ou un décorum de cirque clinquant. Ici, tout est brut, immédiat, les riffs rappellent le pire du Bestial Thrash sud-américain des eighties, ou même parfois les licks les plus évidents du Hard-Rock le plus formel, mais une fois les pièces du puzzle assemblées, une noblesse décharnée se dégage de l’ensemble, comme une célébration païenne du fond des temps qui remonte à la surface de la mémoire.
Jouant avec les tempi, imposant des cassures à la BATHORY Viking, KROLOK reste fidèle à son éthique, et propose de longues digressions évolutives, basées sur des humeurs, toutes maussades et grises. Etonnamment catchy lorsque le ton l’impose, « The Reptile Abyss Beneath Dowina » s’incruste dans les neurones et contamine le libre arbitre, nous poussant à taper du pied et à headbanguer sur une musique pourtant peu propice aux expressions physiques. Là est l’art du trio slovaque, ne jamais se corrompre, mais s’autoriser quelques gimmicks plus populaires, tout en restant collé à des principes de nihilisme sonore.
Le son, qui tient autant de la démo élaborée que du EP sorti à la sauvette sur un micro-label renforce cette sensation de voyage dans le temps et de secret bien gardé, et l’un dans l’autre, on se laisse séduire par ce mysticisme en brouillard de l’âme, nous immergeant dans une partie de l’histoire du Black Metal qui aujourd’hui encore, fascine tellement la jeune génération.
Les gros morceaux, dont « Black Lore Of The Fens » ou le final « Funeral Winds & Crimson Sky » nous immergent dans les débuts des scènes suédoise et norvégienne, avec cette envie de se rapprocher de tout ce qui est laid et granuleux, pour éviter que le grand public ne cherche à percer les mystères des arts anciens. On aime ces progressions qui prennent leur temps pour imposer un point de vue, ces claviers bourrés d’écho et de delay, et ce chant enterré dans le mix dont les litanies effraient la plèbe, et on apprécie particulièrement l’absence totale de compromis.
KROLOK parvient donc à faire du presque vieux avec de l’antique, et sans s’inscrire dans une démarche artistique nostalgique, à retrouver l’essence même d’un genre qui à ses débuts, n’avait cure des astuces de production, ou d’une quelconque dextérité instrumentale. Bande son idéale de l’absence d’espoir actuelle, Funeral Winds & Crimson Sky est l’illustration d’une époque évoluant à l’aveugle, sachant très bien ce que l’avenir lui réserve de plus funeste, mais qui en accepte les conséquences avec une grimace de dégoût sur le visage.
Mais un dégoût lucide.
Titres de l’album:
01. Black Lore Of The Fens
02. Towards The Duskportals
03. The Reptile Abyss Beneath Dowina
04. Path To The Haunted Ruins
05. Unveiled Subterranean Treasures
06. Funeral Winds & Crimson Sky
Alors, j'ai vu les prix et, effectivement, c'est triste de finir une carrière musicale emblématique sur un fistfucking de fan...
20/02/2025, 19:08
J'avoue tout !J'ai tenté avec un pote d'avoir des places le jour J...Quand on a effectivement vu le prix indécent du billet, v'là le froid quoi...Mais bon, lancé dans notre folie, on a tout de même tenté le coup...
20/02/2025, 18:52
Tout à fait d'accord avec toi, Tourista. En même temps, on a appris qu'Ozzy ne chanterait pas tout le concert de Black Sabbath. Du coup, faut essayer de justifier l'achat d'un ticket à un prix honteux pour un pétard mouillé.
20/02/2025, 09:27
Tout est dit.Que ce soir devant 50 personnes dans une salle de quartier ou dans un festival Hirax et en particulier Katon assuré à l'américaine. Parfait.L'album précèdent reste terrible. A voir celui ci.
19/02/2025, 17:51
Hell Yeah!!! Voilà ce que j'appelle une bombe bien métallique.P.S: Il serait bien que ce site passe en mode sécurisé: https car certains navigateurs refusent son ouverture car il est considéré comme malveillant.
19/02/2025, 16:32
Pareil, vu au Motoc l'année dernière plus par curiosité qu'autre chose : et bah c'était excellent ! La passion qui transpire, la nostalgie d'une époque aussi et puis cette énergie !
17/02/2025, 21:39
Oui, Keton de Pena est une légende encore vivante avec son Thrash reprenant pas mal les codes du Heavy. Il y met cette ambiance jubilatoire en forte communion avec les fans (il a dû vous faire le coup du drapeau). Je l'ai vu deux fois il y a une dizaine d'années, c&a(...)
17/02/2025, 13:18
Vu pour la toute première fois en live l'été dernier.Il était grand temps pour moi au vu que j'adore ce groupe...Le concert était laaaaaargement au-dessus de ce que j'en attendais : Ambiance, prestation, joie communicative, ultra-res(...)
17/02/2025, 06:50
C'est un groupe assez ancien en fait, ils ont bien vingt ans de carrière derrière eux. Martin Mendez les a recrutés pour son propre groupe parallèle à Opeth, White Stones, car il est installée à Barcelone. Ils avaient commenc&eacut(...)
15/02/2025, 18:14
Âge oblige, j'ai connu à fond cette époque et elle était formidable. Evidemment, aujourd'hui, il y a internet mais le gros avantage du tape-trading, c'était que, par défaut, un tri s'effectuait, copie après copie (de K7). Aujourd(...)
14/02/2025, 05:50
AAAAh Benediction... Toujours un plaisir de les retrouver. Et en live c'est du bonheur (efficacité et bonne humeur!)
13/02/2025, 18:38
Dans son livre "Extremity Retained", Jason Netherton met en lumière l'importance énorme que ce phénomène a eu lieu dans la naissance de la scène. Tous les acteurs isolés dans leurs coins du monde échangeaient par ce moyen, et cela le(...)
12/02/2025, 01:30