Dès qu’on parle de Grind, on perçoit une certaine condescendance dans le regard de son interlocuteur. Le genre a toujours été assimilé à un simple défouloir pour non-musiciens aussi bruitistes que débiles, et je trouve ce constat affligeant. Certes, le choc 80’s de Scum a été un peu difficile à encaisser, à une époque où le Hardcore se métallisait, et où le Hair Metal dominait la scène. Mais le côté avant-gardiste de la chose et son refus des convenances avait quelque chose de cathartique dans le monde si surfait des musiques amplifiées, qui se contentait alors en surface de donner la becquée à un public peu difficile, et surtout, facilement impressionnable. Alors, oui, Mitch Harris a toujours été un clown rigolo, mais in clown génial. D’accord, tous les musiciens de la scène ont fini par lui tourner le dos pour se lancer dans l’Indus, l’Ambient, l’expérimental où l’avant-garde, ce bon Mitch a fondé SCORN, a collaboré avec le génial et branque John Zorn, mais il n’empêche qu’en 2021, le genre est toujours valide, et plus surprenant, aventureux.
Il faut évidemment s’intéresser au Grind pour le connaître. Mais les fans le savent : cette succession de saynètes rapides et/ou impromptues a du sens, pour peu que la marionnette soit manipulée par un véritable expert. Et à ce petit jeu de dextérité manuelle et créative, les américains de FULL OF HELL sont toujours sortis grands vainqueurs.
J’ai encore en mémoire tampon le séisme provoqué par le séminal Trumpeting Ecstasy, et sa collaboration improbable avec la poupée blonde Nicole Dollanganger. 2017 n’est pas si loin, et pourtant, depuis, le quatuor d’Ocean City, Maryland a lâché un nombre impressionnant de formats, splits, compilations luxueuses et autres cris primaux que Janov lui-même pourrait leur envier. L’aventure FULL OF HELL a même connu un épisode plus long que d’ordinaire, avec l’ajout d’un quatrième LP en 2019, Weeping Choir qui a du faire pleurer bien des chorales gospel. En à peine douze ans de carrière, le groupe a su s’imposer par une force de caractère incroyable, et par son mélange pas si contre nature de Death, de Grind, de Noise, de Harsh Noise, d’Ambient, et autres trips dont on ne revient jamais indemne. Adeptes des fulgurances qui donnent froid dans le dos, des dissonances et des stridences, mais aussi des évolutions de poche graves comme des hurlements de Lee Dorian, les FULL OF HELL incarnent aujourd’hui le point de jonction le plus parfait entre la scène japonaise la plus infâme et CONVERGE, représentant en quelque sorte l’étape d’évolution du Mathcore la plus crédible. Avec un peu d’imagination évidemment.
Et alors que CONVERGE prépare son nouveau retour, FULL OF HELL grille les feux et la priorité pour imposer ce terrifiant Garden of Burning Apparitions au milieu du trafic. L’analogie routière n’est pas gratuite, puisque ce cinquième album pourrait se concevoir comme le rond-point de la carrière des américains. Celui qui laisse partir dans toutes les directions, mais qui se sa puissance concentrique ramène tout le monde aux origines et à la suite. Il synthétise toutes les tendances, des génériques en longue-durée aux épisodiques en splits ou EP, et présente un reflet assez fidèle de la personnalité de ce groupe unique, que beaucoup ont tenté d’imiter, mais que personne n’est arrivé à égaler. Et en écoutant « Reeking Tunnels », je comprends parfaitement pourquoi. Il n’y a qu’eux pour pondre un titre aussi accrocheur unissant dans la même haine les PIXIES, SONIC YOUTH, CARCASS et DILLINGER ESCAPE PLAN sans avoir l’air populiste ou je-m’en-foutiste. Ce riff en lick gluant et catchy, ce chant sardonique à la CARCASS, ces lignes mélodiques qui évoquent le DEP d’Ire Works, ces petits plans de guitare qui montent et descendent comme une idée Jazz foireuse, tout FULL OF HELL est là, et bien plus encore. A vous de savoir pourquoi, mais pas comment.
Surtout que le hit de l’improbable est immédiatement suivi par une saillie Noise dont les américains sont spécialistes, encore plus depuis qu’ils ont collaboré avec le taré notoire Masami Akita, tête pensante malade de MERZBOW.
En vingt minutes à peine, Garden of Burning Apparitions n’a rien de surprenant dans l’univers de FULL OF HELL. Il est exactement ce que l’on est en droit d’attendre d’un groupe de cet acabit, et les leaders continuent de l’être, au grand désespoir des suiveurs. Basé sur un principe rythmique éprouvé, animé par une dualité vocale toujours aussi convaincante, chaotique mais logique, il ne fait que creuser le sillon toujours plus profondément pour semer une réputation largement méritée. Alors que la majorité des acteurs Grind se contentent de resucées des classiques en alignant trente morceaux pour quinze minutes de bruit, les américains vont plus loin, défient l’écurie Ipecac sur son propre terrain, et parviennent même parfois à tutoyer Mike Patton lui-même (« Asphyxiant Blessing »).
Je comprends tout l’amour que j’ai pour ce groupe lorsque je constate une fois encore que chaque morceau a sa propre identité. Loin d’une simple suite d‘humeurs plus ou moins badines, ce nouvel album parvient à repousser les limites en faisant mine de ne pas s’en approcher, mais des crises de colère comme « Murmuring Foul Spring », des mines anti-personnel aussi solides et incendiaires que « Eroding Shell » démontrent que le Grind a encore quelque chose à dire, pourvu qu’il ne soit pas qu’un simple prétexte.
Totalement irrésistible, ce résumé court du long parcours du groupe est un ajout de taille à l’œuvre. Il permet de l’envisager sous tous les angles, et de parvenir à cette conclusion inéluctable : les FULL OF HELL sont tellement en avance sur leur temps qu’ils vont finir par être en retard sur le passé. Ça ne veut probablement rien dire, mais j’ai trouvé que ça sonnait bien dans le contexte.
Titres de l’album:
01. Guided Blight
02. Asphyxiant Blessing
03. Murmuring Foul Spring
04. Derelict Satellite
05. Burning Apparition
06. Eroding Shell
07. All Bells Ringing
08. Urchin Thrones
09. Industrial Messiah Complex
10. Reeking Tunnels
11. Non-Atomism
12. Celestial Heirarch
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