Tout le monde à des phobies. Rationnelles ou non, contrôlables ou pas, mais tout le monde craint quelque chose. Les clowns, les araignées, les chiffres impairs, le vendredi 13, le noir, les blettes, Christophe Maé ou la première dame. La question est de savoir jusqu’à quel point vous pouvez affronter vos peurs pour ne pas en devenir dépendant. John Huston avait d’ailleurs sorti un film pas terrible sur le sujet en 1979, avec Paul Michael Glaser, mais là n’est pas le propos. Le propos est ailleurs, et réside en votre capacité à résister à la violence musicale et au chaos organisé en rythmique. Et de fait, résisterez-vous au dernier EP de PHOBIA, le plus culte des incompris de la cause Grind, qui depuis 1990 essaie de se faire une place au soleil du boucan ? Historiquement, les américains ne font pas partie des trésors culturels, statut réservé aux pionniers anglais. Et avec un premier LP paru en 1998 seulement, ils ne peuvent rivaliser avec les NAPALM DEATH ou CARCASS pour le leadership mondial de la vélocité velue. Mais en se construisant patiemment une discographie digne de ce nom, entachée de six LP et d’un nombre incalculable de splits et EP, les originaires d’Orange County ont fini par gagner le respect, par l’entremise d’œuvres comme Means of Existence ou 22 Randoms Acts of Violence. Ils ont même tenté le coup de la compilation presque exhaustive en 2016 avec le joli coffret 4CD Decades of Blastphemy, et son jeu de mot habile, mais c’est plutôt sur Lifeless God que nous en étions resté, il y a deux ans, qui n’ont été comblés par aucune sortie, digne de ce nom ou pas. C’est donc avec un grand plaisir masochiste que nous les retrouvons aujourd’hui avec un nouvel EP dans la musette, ce Generation Coward qui ne perd pas son temps en conjectures et qui décale les jointures.
Sommes-nous donc devenus une génération de couards ? Après tout, nous vivons dans une société qui a peur de tout, sans aller jusqu’à la phobie. Nous avons peur des migrants, de la crise, de la catastrophe environnementale programmée, de partir en vacances sans faire nos vaccins, du lendemain, de l’augmentation du prix du pain, etc…Alors oui, nous sommes peut-être finalement de gros peureux qui refusent de faire face à la réalité, mais comptez sur les PHOBIA pour nous la jeter en pleine face. Evidemment, les plus téméraires et équilibristes préfèreront toujours écouter MISERY INDEX, TOTAL FUCKING DESTRUCTION, les plus furieux INFEST et FULL OF HELL, et les traditionnalistes NAPALM DEATH. Mais il y a quelque chose de pur dans le classicisme de PHOBIA qui m’a toujours beaucoup plu, et qu’on retrouve encore sur ces treize morceaux balancés comme de la purée. Une façon d’envisager le Grind sous un angle inamovible, d’accepter que le Crust en soit le parent légitime, et d’imposer les blasts comme seule échappatoire. Mais avec des riffs souvent mémorisables, chose rare dans le style, ces quatre marsouins (Calum Mackenzie - basse, Bruce Reeves - guitare, Shane Mclachlan - chant et Danny Walker - batterie), en sus d’un groove patent sous la couche de derme de l’ultraviolence, et une ligne de conduite qui n’a pas changé depuis ses débuts, parviennent toujours à maintenir un niveau de qualité que certains de leurs concurrents pourraient leur envier. Bien sûr, il est question de Grind ici, de celui qu’on pratique depuis l’agonie des années 80, où l’originalité n’a pas droit de cité, mais il est toujours jouissif de l’entendre pratiqué comme aux plus grandes heures de BRUTAL TRUTH et NASUM, avec cet esprit avant-gardiste en moins, mais cette efficacité constante dans les assauts et agressions.
Pas de quoi se relever la nuit pour vérifier si Mick Harris n’avait pas manqué un temps sur « You Suffer », mais largement de quoi vous occuper jusqu’à la sortir du prochain LP des californiens. Et « Cynic Bastard » en intro de confirmer que Generation Coward va tenir la route, spécialement avec une entame aussi lourde, et qui est aussi le titre le plus long du EP avec ses plus de deux minutes. Riffs lourds, ambiance quasiment Death Metal pour quarante-cinq secondes de confusion avant que la fureur Crust ne reprenne ses droits. Le reste oscille entre la minute et la poignée de secondes, qui sont parfois d’une fureur hors du commun (« Haters Be Hating When Ya Living Good », sept secondes, « Bozo of Grind », neuf secondes, intermèdes cocasses et cathartiques), mais c’est lorsque le quatuor lâche la vapeur à fond pour faire dérailler la locomotive qu’il se montre le plus probant (« Internet Tough Guy », l’humour est bien là, mais ça impressionne quand même), ou lorsqu’il balance des riffs saignants qui déteignent sur les murs (« Aspiration Lost »). L’heure n’est donc pas à la recherche de l’inconnu, mais bien à l’exutoire bien foutu, et ces treize morceaux, qu’on aura déjà entendu avant même de les avoir écoutés en sont un bon, surtout lorsque toutes les exagérations sont possibles et que le paroxysme est atteint (« Excretion »). Quelques samples pour distraire avant de repartir comme en 40 (« PC Fascist Fuck off »), des machins qui foncent bille en tête pour être soudainement interrompus par des chœurs de stade de foot (« Miserable Awakening », bizarre, mais accrocheur), et un final Heavy et méchant en diable (« Condemned to Tell »). Bon sinon, qui a peur du grand méchant loup ?
C’est pas nous, c’est pas nous. Et PHOBIA continue sa route dans les sous-bois, au cas où mère-grand s’y cache pour lui piquer son panier à provisions.
Titres de l’album :
1. Cynic Bastard
2. Haters Be Hating When Ya Living Good
3. Imbecile
4. Bozo of Grind
5. Internet Tough Guy
6. Excretion
7. Cut Throat
8. PC Fascist Fuck off
9. Aspiration Lost
10. Falsification
11. Miserable Awakening
12. To Be Convinced
13. Condemned to Tell
Haaaa le Rock est tout sauf négociable !! Merci pour cette belle critique.Chazz (2Sisters)
17/01/2025, 22:44
Non putain ça fait chier ! Je m'en fout de revoir Rob derrière le micro de mon groupe préféré d'amour !
17/01/2025, 17:03
J'ai cru comprendre que Zetro se retirait pour problème de santé.J'espère que ça ira pour lui.En tout cas avec Dukes sur scène, ça va envoyer le pâte.
16/01/2025, 18:21
Super nouvelle pour moi, le chant de Zetro m'est difficilement supportable. Celui de Dukes n'a rien d'extraordinaire mais il colle assez bien à la musique et le gars assure sur scène.
16/01/2025, 12:15
Eh beh... Étonné par ce changement de line-up. Vu comment Exo était en forme sur scène ces dernières années avec Souza ! Mais bon, Dukes (re)tiendra la barque sans soucis aussi.
16/01/2025, 10:22
Super. L'album devrait être à la hauteur. Beaucoup de superbes sorties sont à venir ce 1er semestre 2025. P.S. : le site metalnews devrait passer en mode https (internet & connexion sécurisé(e)s) car certains navigateurs le reconnaisent comme(...)
15/01/2025, 12:58
Je viens de tomber dessus, grosse baffe dans la gueule, et c'est français en plus!Un disque à réécouter plusieurs fois car très riche, j'ai hâte de pouvoir les voir en concert en espérant une tournée pour cet album assez incr(...)
14/01/2025, 09:27
Capsf1team + 1.Je dirai même plus : Mettre cela directement sur la bandeau vertical de droite qui propose toutes les chroniques. En gros faire comme pour les news quoi : Nom du groupe, titre de l'album et entre parenthèse style + nationalité.
13/01/2025, 08:36
Oui en effet dans les news on voit bien les étiquettes, mais sur la page chronique on a juste la première ligne de la chro, peut-être que ce serait intéressant de le mettre dans l'en-tête.
13/01/2025, 07:59
Capsf1team : tu voudrais que l'on indique cela où exactement ? Dans l'entête des chroniques ? En début de chronique ?Aujourd'hui le style apparait dans les étiquettes que l'on met aux articles, mais peut-être que ça ne se voit pas d&(...)
12/01/2025, 17:38
Poh poh poh poh... ... ...Tout le monde ici à l'habitude de te remercier pour la somme de taf fournie mortne2001, mais là... Là, on peut dire que tu t'es surpassé.Improbable cette énumération.Et le pire, c'est qu'a(...)
12/01/2025, 14:27
Jus de cadavre, putain mais merci pour la découverte Pneuma Hagion. C'est excellent! Du death qui t'envoie direct brûler en enfer.
11/01/2025, 12:16
Merci pour tout le travail accompli et ce top fort plaisant à lire tous les ans. Moi aussi je vieilli et impossible de suivre le raz de marée des nouvelles sorties quotidiennes... Suggestion peut-être à propos des chroniques, est-ce que l'on ne pourrait pas indique(...)
10/01/2025, 09:12
J'aurais pu citer les Brodequin et Benighted que j'avais bien remarqués en début d'année, aussi, mais il faut choisir... Quant au Falling in Reverse, cette pochette ressemble trop à une vieille photo de J-J Goldman dans les années 80, je ne peux p(...)
09/01/2025, 19:49