Genocides in the Name of God

Corpsia

29/04/2017

Autoproduction

Des génocides au nom de Dieu ? Au nom des Dieux serait plus judicieux, mais à vrai dire, la problématique ne date pas d’hier, à croire que les religions organisées ont été créés à ce propos. Le débat est vaste, et le Metal, genre athéiste et apolitique par excellence (mis à part quelques énergumènes qui se réclament d’un satanisme pas toujours très adulte ou de doctrines néfastes…) s’en repait pourtant avec une grande régularité, histoire de dénoncer deux ou trois travers bien mal placés…Titre d’album donc très justifié, tout particulièrement lorsqu’il  émane d’un groupe dont le pays d’origine est justement placé sous l’égide d’une foi démesurée.

Les CORPSIA sont effectivement brésiliens, de Londrina pour être plus précis, et existent depuis 2012, ce qui leur a permis de sortir une première démo il y a deux ans, Order From Chaos, leur offrant ainsi une exposition en dehors de leurs frontières. Evoluant sous la forme d’un trio (Daniel Scaloni  - batterie, Gabriel Arns Stobbe – guitare/chant et Lucas Landin - basse), le groupe se complait donc dans une formule très efficace de Thrash old-school, fortement marqué par ses influences, qu’il ne daigne même pas citer tant elles sont évidentes. Enregistré aux studios High Voltage, Genocides in the Name of God bénéficie d’une production tout à fait honnête au regard des standards passés du style, ce qui lui confère une patine délicieusement rétro qui enjolive des compositions simples, efficaces et souvent percutantes. Toutefois, et malgré les racines du trio, inutile de vous attendre à une débauche de décibels bestiale, car les CORPSIA ne sont pas là en tant que gardiens de l’héritage national des SEPULTURA ou SARCOFAGO. Non, leur identité serait plus à chercher du côté des voisins nordiques des USA, dont ils empruntent le vocable musical d’il y a trois décennies. Et la référence qui crève les yeux et les tympans est bien celle que vous imaginez…

SLAYER, vous avez dit SLAYER ? Bonne réponse, puisque les riffs estampillés 88/90 de Jeff et Kerry servent de base aux morceaux des brésiliens, qui utilisent les mêmes ficelles de staccato avec une aisance naturelle, sans pour autant atteindre le degré de mimétisme d’un EXUMER. Ici, c’est l’hommage qui prime sur le plagiat, même si certains arrangements semblent tout droit sortis de South Of Heaven ou Seasons In The Abyss. Mais l’avantage des CORPSIA, et qui leur permet de se démarquer, c’est cette voix très Hardcore qui émane du gosier de Gabriel, et qui rapproche la musique d’un Crossover à peine déguisé, sans pour autant s’éloigner des préceptes Thrash les plus usités. De temps à autres, les clins d’œil appuyés sauront réjouir les initier, à l’image de l’intro en arpèges de « Holochrist », qui louche grave du côté « Seasons In The Abyss » où il va tomber. Sans prôner une originalité de toute façon déplacée, le trio s’en sort avec les honneurs et des lauriers, en nous convaincant de son talent sans le forcer, et surtout, sans chercher à atteindre un but un peu trop élevé. Et après une intro assez bien troussée, que Max et Andreas n’auraient pas reniée, « Purgatory Scum » explique plus ou moins ouvertement en moins de quatre minutes tous les arguments qui vont être développés, sans jouer la subtilité. Thrash modéré donc, très harmonieux, et respectueux de la frange la plus abordable du genre, pour une grosse demi-heure de cavalcade saccadée et de breaks à l’étouffé, pour un nouvel album revival qui vaut largement le coup d’être apprécié. Certes, on aimerait parfois que la retenue s’estompe, et que l’opération opte pour une folie passagère nuancée, mais il est difficile de trouver le moindre reproche à émettre envers des morceaux de la trempe de « Prophecy », qui nous ramène en plein Thrash boom de son tempo échevelé et de ses riffs finement découpés.

Précision, hargne et volonté, telles sont les armes de Genocides in the Name of God, qui en fustigeant les religions en profite pour placer ses pions. L’échiquier est d’ailleurs d’un noir et blanc assez peu contrasté, puisque les pistes s’enchainant sans faiblir privilégient l’homogénéité, ce qui pourra en contrarier certains qui auraient attendu plus de variété. Mais ainsi va le Thrash vintage, qui préfère se fondre en un bloc pour mieux fracasser, plutôt que jouer d’une ouverture déplacée. Je conseillerai à tous les esthètes de se diriger vers les morceaux au mid tempo lourdaud, qui une fois encore se souviennent très bien des litanies gravissimes de Tom Araya et consorts, et spécialement vers « Execution », lourd comme le pas d’un condamné vers la potence à la corde effilée. C’est dans ces moments-là que les brésiliens montrent leur potentiel, qui s’accommode fort bien de BPM dégressifs, et qui leur permet d’instaurer une délicieuse tension. Et comme ces intermèdes sont entrecoupés d’interventions divines (savourez l’allusion via « The Rite », vous la comprendrez sans chercher), la fin de l’album s’avère être la plus passionnante, puisqu’elle offre enfin une véritable alternance, et ne se contente plus de ruer dans des brancards déjà salement endommagés. D’ailleurs, l’un des meilleurs morceaux s’y cache aussi, « Snakes », qui comme le serpent biblique sinue pour nous inciter au péché de violence, et y parvient sans trop forcer. On pense même à un croisement diabolique entres les meilleurs instants de SLAYER et TESTAMENT, tant la persuasion Heavy le dispute à la speederie en furie.

Genocides in the Name of God se termine sur une dernière pesée bien lestée, « Returns », qui ose la redondance d’un riff que les MORTAL SIN auraient pu piquer à King et Hanneman, et une fois ses derniers effluves évaporés, le parfum d’un Thrash de tradition perdure dans nos naseaux enflammés. Je ne mentirai toutefois pas en affirmant que les CORPSIA ont signé l’album nostalgique de l’année, mais force est de reconnaître qu’ils ont du mordant, et que leur premier méfait va salement se faire remarquer. Ce LP inaugural confirme le bien que l’underground pensait de ce trio lusophone, qui loin d’être aphone, sait faire parler son Thrash pour se faire entendre. Limité à cinq cents copies, le CD est disponible en autoproduction depuis avril, mais avec un peu de chance, quelques exemplaires subsistent à la vente. Dépêchez-vous de vous le procurer si une bonne dose de nostalgie vous envahit, et si vous déplorez que les combos actuels ne sachent plus jouer l’extrême avec raison et de modestes ambitions.

Ceci dit sans aucune ironie, et avec toute la franchise que cette réalisation mérite.


Titres de l'album:

  1. Purgatory Scum
  2. Prophecy
  3. Genocides in the Name of God
  4. Violence
  5. Holochrist
  6. Execution
  7. The Rite
  8. Snakes
  9. Blood Sacrifice
  10. Returns

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par mortne2001 le 14/11/2017 à 17:37
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