Les plaisanteries les plus courtes sont les meilleures ? Généralement oui, et il suffit de se fader quatre-vingt-dix minutes de comédie française pour le comprendre. Mais parfois, des blagues montées de toute pièce et destinées à être éphémères s’éternisent un peu, mais ne provoquent pas de grimace gênée pour autant. Prenons par exemple l’histoire improbable des GANGRENA GASOSA. Fondé à la base pour ouvrir un des shows des RATOS DE PORAO, le groupe s’est finalement retrouvé embarqué dans une histoire de longue haleine (chargée bien sûr), qui dure encore aujourd’hui, au point d’aboutir à la genèse d’un quatrième LP, chose que ses concepteurs n’auraient sans doute pas imaginée il y a presque trente ans. Il faut dire que ces olibrius n’avaient pas toutes les armes en main. Joyeux fouteurs de merde, ils auraient selon la légende ruiné un plateau de télé national durant une interview (mais où les programmateurs avaient-ils la tête ???), attiré le mauvais œil sur leur combo fétiche des RATOS, vu leurs membres se tirer un par un, certainement effrayés par les manifestations surnaturelles pourrissant leur quotidien, et dû affronter les forces obscures de la Santeria pour pouvoir garder les pieds sur terre et la tête sur les épaules. Gag jusqu’au bout, cette formation prend pourtant son art du délire au sérieux, permettant aux mondes opposés de GWAR et de BRUJERIA de se percuter de plein fouet dans les étoiles d’une religion désorganisée. Un nouveau big-bang est-il pour autant à craindre ? Vu l’énergie développée par ces tarés, la chose est possible, mais il y a fort à craindre qu’il n’engendre pas la vie cette fois-ci, mais bien une nouvelle forme de mort…
La mort de la morosité, c’est un fait, établi. Avec une imagerie à rendre fous de jalousie les DEATH SS et notre très respecté GRAND ORCHESTRE DU SPLENDID, les brésiliens ont mis le paquet sur l’apparence, adoptant les accoutrements de quelques grandes figures de la religion vaudou. Se targuant d’être le seul groupe de Sarava Metal de la création (contraction de trois mantras de la religion afro-brésilienne « sa », le pouvoir de Dieu, « ra », le mouvement de la terre, et « va », l’énergie), cette assemblée de décalés et d’arrachés du bulbe ne respecte pas grand-chose, et certainement pas les conventions Thrash un peu trop figées pour leur philosophie décalée. L’identité des membres de cette assemblée ? Eder Santana - chant (Omulu), Ge Vasconcelos - percussions (Pomba Gira Maria Mulambo), Angelo Arede - chant (Zé Pelintra), Renzo Borges - batterie (Exu Mirim), Diego Padilha - basse (Tranca Rua da Almas) et Minoru Murakami - guitare (Exu Caveira), qui sous couvert des rôles qu’ils ont endossés côtoient et défient l’au-delà d’une musique aux forts relents non de Samba, mais de percussions afro-brésiliennes (presque) parfaitement intégrées à un contexte purement Crossover (assez) bien remué. Et autant l’avouer, l’euphorie est (quasiment) à portée de main, même si l’ensemble dégage une petite impression de déjà entendu au bout de quelques morceaux. Il serait parfois possible de penser à une hybridation pas si contre-nature que ça entre le SEPULTURA de Roots, et le Chico Science d’Afrociberdelia, le tout pimenté d’une sauce corsée à la TOXIC HOLOCAUST et BEASTIE BOYS, pour une ambiance de DC Comics délocalisée à Rio de Janeiro, et une fiesta d’enfer, menée tambour battant par des SLIPKNOT locaux vraiment pas méchants. Ici, les masques ne servent pas forcément à masquer un manque d’inspiration, même si la paillardise de l’entreprise peut lasser de ses systématismes et autres abus de fantaisies rythmiques qui sont avouons-le assez bordéliques (« Farda Preta de Caveira »).
Pourtant avec trente ans de carrière derrière eux, les brésiliens savent parfaitement où ils veulent en venir, même si leur direction artistique semble encore un peu erratique, et légèrement Punk sur les bords (« Se Liga Doidão (Zé Droguinha) »). Leurs riffs manquent encore d’ampleur, et se font méchamment bouffer par ces percus qui ne s’arrêtent jamais, ou si peu, ce qui n’arrange pas les choses, tandis que les voix conjuguées d’Eder et Angelo sont à peu près aussi subtiles que les hurlements des fans de Pelé, Cafu, Hulk, Edu, Zizinho, ou Kaká, se lançant avec régularité dans des échanges verbaux un peu trop mis en avant. L’équilibre n’est donc toujours pas atteint, malgré trois longue-durée qui ont précédé (Welcome to Terreiro en 1993, Smells like a Tenda Spírita et son allusion fine en 2000 et surtout Se Deus é 10 Satanás é 666 en 2011), et on suit le tout plus comme une cérémonie rituelle surprise en pleine nuit plutôt que comme un véritable album de musique pensé et réfléchi. Non que leur musique ne soit euphorique, ce qu’elle est assurément, mais elle est tellement débridée qu’on a parfois beaucoup de mal s’y accrocher, comme un film pour les oreilles aux effets plus présents que le fond du scénario, qui reste encore à la porte à prendre le frais. Pourtant, les musiciens savent parfois trousser de jolies embardées purement Thrashcore (les premières secondes de « O Saci »), mais ils prennent un malin plaisir à les ruiner par des interventions de schizophrène et des chœurs qui se démènent. Dommage, parce que la démence générale est plutôt bon enfant, et que de temps à autres, dans un registre SLAYER sud-américain, ça fonctionne assez bien (« Fiscal de Cu »).
Et si l’aspect visuel de l’entreprise est sans conteste à la hauteur des ambitions, l’aspect musical est encore un peu trop brouillon pour ne fonctionner qu’à un degré auditif, ce qui handicape grandement le projet. Et si les intros et autres intermèdes sont plutôt bien troussés (« Ponto de Abertura »), les thèmes sont encore un peu trop génériques pour vraiment nous faire trembler. Mais dans un accès de mansuétude, on accordera le bénéfice du doute à l’entame assez dantesque et grotesque de « Gente Ruim », qui met les choses au point d’entrée, en laissant tous les intervenants s’installer progressivement, et à l’accès de furia de « Carnossauro Diet », que les GWAR auraient pu entonner en rentrant du boulot à la nuit tombée. Du Comic Metal donc, qui est finalement plus Punk que réellement Thrash, et encore un peu trop foutraque pour satisfaire les fans les plus pointilleux sur le discours et la méthode. Gente Ruim Só Manda Lembrança pra Quem Não Presta et son titre interminable est donc le genre de truc qu’on écoute une fois pour être au courant des déviances en cours dans un monde de fou, mais qu’on remise gentiment dès la première approche passée, de peur que nos voisins ne frappent à notre porte comme des damnés. L’âme des GANGRENA GASOSA l’est déjà de toute façon, mais dommage qu’ils l’aient bradée pour se contenter d’un foutoir à peine agencé plutôt que pour une explosion d’exubérance organisée. Le carnaval de Rio n’a pas encore à trembler de la concurrence de ces allumés, qui devront sans doute bosser un peu plus leur partition pour en dégager les cotillons et faire de la place à la raison. Celle du plus barge évidemment.
Titres de l'album:
"...jouer un concert en Arabie Saoudite. Un honneur absolu et un privilège. Les loups du nord apporteront la tempête hivernale à Riyad !"Un véritable honneur absolue de jouer en Arabie Saoudite, la ou les apostas sont condamnés &agra(...)
21/11/2024, 08:46
Quand on se souvient du petit son des années 80... Mais la prod ne fait pas tout, ça reste du pilotage automatique. C'est pas avec un truc pareil que je vais me réconcilier avec eux, et ça fait 20 piges que ça dure.
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