Il y a des groupes comme ça, qui tracent leur route depuis des années, évoluant dans l’ombre sans que le grand public ne les remarque, restant coincés dans une sorte de respect tacite presque condescendant. Des groupes aux qualités indéniables, aux possibilités infinies, mais qui peinent à exploser sur la scène internationale pour cause de pas de chance, de musique un peu trop classique, ou d’une trop grande discrétion les honorant quelque part…Et les originaires de Pittsburgh d’ICARUS WITCH font clairement partie de cette catégorie, eux qui alignent pourtant des albums impeccables depuis leur création. Création ne remontant d’ailleurs pas à hier, mais bien à 2003, ce qui leur donne un parfum d’une cuvée de quinze ans d’âge, bonification que l’on sent d’ailleurs évidente sur leur dernière production. Nous étions sans nouvelles du groupe depuis six ans, nous demandant même s’il n’avait pas disparu dans les caves d’un ancien château abandonné, et Goodbye Cruel World nous rassure quant à l’état de santé de musiciens méritant beaucoup mieux que ce demi anonymat qui leur semblait promis depuis la parution en 2012 de Rise, déjà publié par Cleopatra Records. Entre-temps, pas mal de choses leur sont arrivées, et notamment quelques ajustements de personnel, puisqu’on trouve derrière le micro un nouveau venu, Andrew D'Cagna (COLDFELLS, INFIRMARY, IRONFLAME, NECHOCHWEN, OBSEQUIAE, SILVERBLOOD, UNWILLING FLESH, ex-ANGELRUST, BRIMSTONE COVEN, FOREST OF THE SOUL), au timbre de voix assez proche d’un Ian Gillan énervé, et s’intégrant parfaitement à la nouvelle/ancienne optique musicale du groupe qui semble avoir voulu se rapprocher de ses propres racines, celles qu’on découvrait il y a treize ans sur le fabuleux Capture The Magic. Alors, du coup, la magie est-elle encore présente ? A n’en point douter, et en faisant preuve d’un enthousiasme tout à fait justifié, on pourrait même extrapoler en désignant ce Goodbye Cruel World comme l’un des meilleurs albums du groupe.
Sans trahir ses dogmes d’origine, loin de là, le quatuor toujours mené par Jason "Sin" Myers (basse/claviers) et Quinn Lukas (guitare) aborde donc un nouveau virage dans sa carrière, en intégrant à l’équipe la frappe précise et lourde de Jon Rice (JOB FOR A COWBOY, SCORPION CHILD), batteur de session ayant apporté son assise à des morceaux toujours aussi flamboyants, se voulant point de jonction entre la période Jake E. Lee d’Ozzy, et les premiers efforts de DIO et DOKKEN, ce qui en dit toujours long sur l’ancrage nostalgique des américains. Et en effet, après écoute attentive des dix morceaux de ce nouvel effort, on trouve des signes patents de ces influences, mixés à la nature propre d’ICARUS WITCH. Et pour entériner un retour en grandes pompes, le groupe n’a pas lésiné, faisant appel au talent de Neil Kernon (QUEENSRŸCHE, JUDAS PRIEST, NILE) pour la pré-production, laissant ensuite le champ libre au magicien des consoles Erik Martensson (ECLIPSE, H.E.A.T.) pour peaufiner le mastering de l’œuvre. La guitare, la basse et la batterie ont été enregistrées par Shane Mayer (DEATHWHITE, POST MORTAL POSSESSION) aux Cerebral Audio Productions de Pittsburgh, tandis que le chant d’Andrew D'Cagna a bénéficié des soins du Sacred Sound Recording, ce qui vous permet d ‘apprécier ce nouveau répertoire dans des conditions optimales. Et au vu de la qualité des morceaux proposés, inutile de dire que tout ce luxe ne fut pas inutile, et que Goodbye Cruel World ressemble plus à un carton d’invitation pour des retrouvailles euphoriques qu’à une lettre de suicide, tant le groupe semble dans une forme olympique…Bien évidemment, le style est toujours là, ce mélange de standards NWOBHM et d’une approche américaine de la seconde moitié des eighties, mais les tonalités contemporaines évitent toujours de sombrer dans la parodie vintage venant souvent ruiner les réalisations du cru les moins ambitieuses. Car les ICARUS WITCH ne manquent pas d’ambition, comme en témoigne le morceau éponyme qui ouvre les hostilités, et qui prouve que l’énergie et l’envie sont toujours là. Le talent incroyable du guitariste Quinn Lukas est toujours aussi prépondérant, que ce soit en termes de riffs saignants ou de soli flamboyants, et on se retrouve face à une débauche de lyrisme, unissant la préciosité d’un QUEENSRYCHE, le dramatisme ciselé d’un HEIR APPARENT et la puissance d’un JUDAS PRIEST, le tout arrangé à la sauce US d’un Heavy Metal aux aspirations nostalgiques qui pourtant se fond admirablement bien dans son époque.
Et s’il fallait six ans pour accoucher d’une telle œuvre, le temps n’a pas été perdu en vain. Si la patte du groupe présente depuis ses premiers efforts est toujours aussi manifeste, les quelques points de rouille ont été enlevés et substitués par une présence rythmique incroyable, pouvant compter sur la solidité au kit de Jon Rice, qui nous offre un véritable festival dès le départ. On se prend même à rêver d’une version réactualisée et survitaminée des meilleurs LPs de MANILLA ROAD traduits dans un vocable nordique, ce que le mastering du roi Erik Martensson ne fait que confirmer. Et si les textes nous narrent les turpitudes d’un mégalomaniaque fictif, sous les traits d’un vampire psychique capable de contrôler les esprits pour parvenir à ses fins, proposant parfois un humour à froid qu’on retrouve sur le terrassant « Misfortune Teller » (et qui évoque avec minutie les obsessions IRON MAIDEN des premiers QUEENSRYCHE), la musique n’en est pas moins une affaire très sérieuse, toujours aussi précise et percutante, spécialement lorsque le tempo monte d’un cran pour nous replonger dans un pan de l’histoire du HM américain de la fin des années 80 (« Lightning Strikes », un tube que les scandinaves pourraient leur envier…), lorsque les METAL CHURCH cherchaient à élargir leur public et que la génération des LEATHERWOLF pointait le bout de son museau. Mélodies et hargne, telles sont donc les deux mamelles de ce sixième album, aux contours imperfectibles, qui en quarante minutes résume à merveille la carrière d’un groupe au talent incroyable, qui parvient toujours à garder un pied dans la nostalgie tout en assumant les impératifs de son époque. Sous des atours classiques, les morceaux n’en développent pas moins une somme considérable d’idées, singeant parfois le lyrisme de la vague germanico-brésilienne des ANGRA et VANDEN PLAS, pour remettre au goût du jour la fascination de DIO pour le moyen-âge et les chevaliers pourfendeurs de dragons (« Through Your Eyes »). Et entre un instrumental qui démontre s’il était encore besoin que les musiciens sont au-dessus de tout soupçon (« The Flood », une intro magique basse/guitare qui va laisser des traces), un sublime duo avec Katharine Blake (MEDIÆVAL BÆBES, MIRANDA SEX GARDEN) sur « Antivenom » histoire d’injecter un peu d‘émotion dans la débauche de sensations, et un final Heavy mélodique de toute beauté (« Until The Bitter End »), le bilan dépasse les espérances les plus folles, et replace les ICARUS WITCH à la bonne place sur l’échiquier mondial.
Sans vouloir tomber dans le dithyrambe excessif, Goodbye Cruel World est certainement le meilleur album de Heavy Metal classique que vous pourrez écouter en cette fin d’année, et il témoigne du talent incroyable d’un groupe mésestimé, qui mérite vraiment mieux que cette politesse condescendante auquel il a droit depuis des années. Espérons que cette fois-ci, les originaires de Pittsburgh se fassent remarquer à leur juste valeur, eux qui ont tant contribué à la réhabilitation d’un style désuet sans abuser de ficelles vintage trop usées.
Titres de l'album :
1. Goodbye Cruel World
2. Misfortune Teller
3. Lightning Strikes
4. Mirage
5. Through Your Eyes
6. The Flood
7. Silence Of The Siren
8. Possessed By You
9. Antivenom feat. Katharine Blake
10. Until The Bitter End
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