Là je le sens bien, vous croyez sans doute que je vais vous parler d’une série à succès qui vient d’achever son ultime saison. Mais non, sorry guys and girls, je ne m’étendrai pas sur le docteur Mamour ni aucune de ses collègues féminines.
De plus, outre le jeu de mot phonétique, sachez que dans l’argot commun, graze anatomy, évoque une pratique salace de couple. Genre votre girlfriend se glisse sous la douche, vous la suivez, et vous commencez à vous frotter les parties intimes sur son arrière-train. Pas classe, mais ludique, et parfois, ça peut dégénérer en quelques chose d’intéressant. Encore faut-il être deux pour ça. Pas plus.
Deux, comme les deux mecs qui un jour se sont unis sous la bannière BUFFALODE, non pour nous faire ramasser la savonnette, ni pour nous asperger de gel douche, mais plutôt pour nous recouvrir le corps de Fuzz dégoulinant, suintant comme une journée d’été sans déo. Deux anglais qui visiblement n’ont cure d’une quelconque forme d’évolution musicale, et dont le dernier calendrier acheté devait être un truc d’occase datant de 1972/1973.
Mais comme ils assument, et même qu’ils revendiquent, pas de souci, j’adhère, et j’adore évidemment…Presque.
Que peut-on bien faire à deux ? Une guitare et un chant (Chris Thompson) et une batterie (Scott Nairn), structure qui commence à devenir un classique depuis l’explosion des WHITE STRIPES, et qui depuis les italiens de ZEUS ! connaît une certaine hype, l’économie étant la philosophie la plus en phase avec notre époque.
Economie de personnel donc, et de moyens fatalement, mais pas d’investissement ou de motivation. Ce duo venant de Lincoln, UK connaît la chanson, et se plaît même beaucoup à la chanter à répétition, dans un nuage de fumée d’opiacées. Un truc qui sent bon la lourdeur d’un Heavy Blues à la BLUE CHEER ou d’un Heavy tout court à la SABBATH, un peu plus joyeux, et un peu plus porté sur les calembours que les incantations sataniques.
Pas vraiment occulte le truc, plutôt déjà culte, et rien que les jeux de mots des titres des morceaux vous indiqueront la marche à suivre.
De biais évidemment, surtout après avoir bien smoké. SWEET SMOKE ? Manque la flûte, cette satanée flûte à la Jon Anderson qui ici de toutes façons, aurait été écrasée par le poids d’une association entre une guitare épaisse et une batterie l’étant tout autant, alors aucune raison de pleurer les fleurettes perdues, ici on groove. C’est tout.
Les mecs n’hésitent pas, et citent, dans le texte. BLUE CHEER, KING CRIMSON, SABBATH, MELVINS, PRIMUS, Hendrix, CLUTCH, LED ZEPPELIN, WHORES., BLACK KEYS, NIRVANA, KYUSS, QOTSA, de quoi poser des bases et ne prendre personne en traître. Niveau infos, pas grand-chose par contre, à part des allusions à un premier EP paru l’année dernière, quatre titres d’une sortie éponyme qui déjà, voulait les choses opaques et pourtant lumineuses à la fois.
Une façon de jouer le psychédélisme à leur manière, de malmener de gros riffs fuzzés (oui, ils adorent tout ce qui fuzze, que voulez-vous que j’y fasse…), pas de quoi se relever la nuit en hurlant à l’épiphanie, mais largement de quoi se sevrer de gros son jusqu’au petit matin blafard encombré de cendriers pleins.
C’est donc Stoner, par facilité, pas mal Noisy, par excès, mais des excès modérés, puisque Graze Anatomy garde prise sur un certain sens de la composition logique et mélodique, même si ces harmonies sont planquées sont un épais mur de fumée, qui semble sortir des amplis Orange, un peu surboostés.
On commence par les points forts, à savoir ce son massif et compact qui sent bon les studios d’antan, et ce mélange entre les générations, un peu comme si CACTUS et BLUE CHEER tapaient le bœuf avec Josh Homme et toutes les générations de Stoner guys qui pensent qu’enregistrer dans le désert vous permet de capter l’essence des esprits anciens matérialisés dans le corps de serpents qui ondulent sous le soleil de plomb. Une guitare volubile, qui joue le rôle d’une basse en pleine crise de schizophrénie, et une batterie qui cogne sec, et qui frappe sans remord, et surtout, sans discontinuer. Une manière d’adapter l’urgence de « Summertime Blues » aux exigences lysergiques d’HAWKWIND, tout en laissant dérouler les cinq minutes presque à chaque fois.
Ou non, mieux. Reprendre les choses là où le Grunge les avait laissées avant de devenir huge, pour permettre aux MELVINS de devenir les nouveaux SONIC YOUTH du Sud. De l’Angleterre évidemment.
On continue avec les points faibles. Une homogénéité de ton qui parfois le confine à la répétition, et des thèmes recyclés d’une chanson à l’autre, sans vraiment moduler ni même changer. Aucun effort, mis à part sur quelques morceaux qui osent des secondes différentes, comme « Discorduroy », qui se veut un peu plus léger et mémorisable, et qui a d’ailleurs été choisi en sorte de single pour annoncer l’arrivée de l’album. On imagine bien d’ailleurs les deux allumés flanqués de vestes et pantalons en velours côtelé, la matière la plus résistante à défaut d’être la plus séduisante.
Mais nous ne sommes plus dans les 70’s, et arborer ce genre de déguisement en dehors d’un film avec Christian Bale est plutôt dangereux, niveau crédibilité.
« Graze Anatomy », le title-track est lui aussi un poil différent, et un poil (de barbe) plus soyeux, et ose un motif un peu plus Bluesy et moins gravy pour nous faire danser.
C’est parfois salement calqué sur un SAB’ pas encore trop fatigué (« Stalagmight, Stalagmight Not »), mais c’est souvent lourd comme le pas de Iommi avant de monter sur scène pour livrer son office (« Maybe I'm a Mollusc », et c’est tout à fait possible).
En fin de parcours, nous avons même droit à un réflexe plus inhabituel et enjoué, avec un « Mary Mary Arbitrary », qui groove sévère, et qui s’éloigne un peu de ce Heavy psychédélique un peu trop collant. Inflexions joyeuses, chant toujours aussi lointain mais plus investi, et batterie qui ose enfin quelques envolées de baguettes qui nous font sursauter, pour un final qui finalement, comme on dit laisse une impression meilleure, et plus nuancée…
Sinon, on ne va pas se mentir. Les BUFFALODE avec Graze Anatomy ne défrichent aucun terrain, et se contentent de s’embourber dans le Blues Rock fuzzé, avec application et dévotion j’en conviens, mais avec un petit manque d’innovation. Les morceaux se ressemblent et l’album prend des airs d’immense jam de quarante minutes qui revient sans cesse aux mêmes licks…enfin vous voyez le trip en gros…
Alors, on peut écouter sans le regretter, parce qu’ils font quand même pas mal de barouf juste à deux, mais la prochaine fois, fumez moins et variez plus les gars.
Ça évitera à nos têtes de pencher en avant en signe d’endormissement…
Titres de l'album:
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