Il paraîtrait que le Metal progressif tourne en rond. Bon, un peu péremptoire comme jugement, mais en partie valable. S’il est certain que les cadors du genre ne font pas vraiment évoluer les choses (DREAM THEATER en étant l’exemple le plus symptomatique), d’autres, plus en amont, font ce qu’ils peuvent pour affranchir le genre de ses carcans les plus contraignants et de ses figures de style les plus imposées. Alors au bout du compte, le bilan n’est pas si négatif que ça, pour ceux évidemment qui se donnent la peine de fouiller plus loin que le bout de leur dossier de téléchargement.
En guise de contre-exemple de ce fatalisme un peu condescendant, je cite une fois de plus nos voisins transalpins qui continuent d’incarner une certaine vision de la bravache créative, en alignant des groupes toujours plus originaux et iconoclastes, qui n’ont cure des us et coutumes. Parlons-en encore, aujourd’hui et demain, mais plutôt cet après-midi en évoquant le cas singulier d’une troupe du passé, dont le destin est provisoirement entre les mains de mes amis de Dooweet.
Le dossier VIRIDANSE ne date pourtant pas d’hier, mais est resté bloqué dans les archives de la mémoire italienne depuis les années 80, avant que ses rédacteurs ne l’exhument pour lui redonner un nouvel éclairage. Histoire de replacer les choses dans leur contexte, sachez que ces italiens ont commencé leur aventure en 1983 après avoir clôturé celle de BLAUE REITHER, entamée quelques temps plus tôt. Flavio Gemma et Paolo Boveri ont donc poursuivi leurs expérimentations sonores, publiant deux EP, Benvenuto Cellini et Mediterranea, entre 1983 et 1985, se permettant même de tenir la scène durant l’énorme festival « Rock Against The Mafia » organisé en 1986 à Palerme. Depuis…
Silence. Rideau.
Et puis, une résurrection il y a quelques années (2014), histoire de donner un nouveau chapitre à cette légende bizarre, aux confluents d’influences aussi disparates que diablement complémentaires. Un nouvel album éponyme en 2015, puis une nouvelle période de création intense pour nous offrir deux ans plus tard cet Hansel, Gretel E La Stregga Cannibale, tout autant inspiré des frères Grimm que du Folklore Européen du moyen âge. Hansel, Gretel et une sorcière anthropophage, quel drôle de combinaison pour un drôle d’album, et un drôle de concept. Basé évidemment sur les contes de fées qui nous enchantent ou nous effraient (parfois les deux à la fois) depuis notre enfance, ce nouvel album de VIRIDANSE se veut honnête et souhaite rétablir quelques vérités à l’encontre d’un style narratif parfois dénaturé. Ici, pas de héros, pas de vilain, mais surtout, pas de héros. Selon la bio fournie, le concept pose les points et soulève les questions suivantes : « (l’histoire de)Hansel et Gretel représente une fausse image, ils sont cupides et impitoyables. Ils sont humains, subjugués par les pouvoirs et sont arrogants avec les personnes faibles. Et par-dessus tout, est-ce que les enfants sont vraiment innocents? Nous sommes tous aveuglés par une liberté qui est faussée, par des illusions qui sont représentées par des maisons en pâte d'amandes et sucreries. Nous, en tant qu'humains, sommes engloutis et corrompus par des illusions qui nous rendent victimes et par la même occasion des bourreaux, de l’environnement qui nous entoure. Le fantastique est souvent une réalité vue dans un miroir sans dogme, c'est une aventure émotionnelle qui dénonce une société rigide et erronée »
Dès lors, les textes écrits par Gianluca Piscitello s’accordent très bien de la musique abstraite et puissante de Flavio Gemma. Car si nous parlons bien de Rock/Metal progressif, la musique de VIRIDANSE s’abreuve à bien d’autres sources, et n’a pas oublié celles de sa jeunesse. D’ailleurs, leur page Facebook ne cache rien de leur passé mouvant et cite la New-Wave, le Post Punk, l’Alternatif des 90’s, mais aussi le Post Rock, et le Post à peu près tout. Difficile donc de faire le tri parmi ces pointages histoire de se rassurer et de les classer avec précision, mais comme tel n’est pas le but, le problème ne se pose pas.
On pourrait à la rigueur assimiler la musique des italiens à du Post progressif teinté de rigueur Punk froide du début des eighties, le tout progressant sur des structures métalliques en équilibre, qui se tordent et se plient sous les impulsions violentes des musiciens.
Inutile donc d’évoquer les sempiternels GENESIS, YES, ou ELP pour parler d’eux, mais pas la peine non plus de piocher dans le portfolio contemporain des DREAM THEATER, PERIPHERY et autres PORCUPINE TREE. Le Rock de Hansel, Gretel E La Stregga Cannibale se reflèterait plutôt dans le miroir des MAGMA déformé par le regard biaisé des PUBLIC IMAGE LIMITED et autres PERE UBU, les exagérations en moins, et la probité instrumentale en plus.
Le monde décrit dans les sept (très) longues pistes de ce nouvel album est très étrange, très sombre et pourtant léger et ensoleillé à la fois, et si la cohérence est de mise dans la progression, la liberté impose ses dérivations et nous propose une translation assez unique qui nous perd dans les méandres d’un imaginaire débarrassé des contraintes de temps et d’espace.
Les pistes sont tout autant empreintes de folie italienne de la commedia dell’arte que de nonsense britannique typique, même si on pense parfois être revenu dans le temps pour y rencontrer quelques légendes du terroir français. En gros, un Rock élastique et cosmopolite, qui navigue au gré des humeurs de l’histoire qui le guident, et qui refuse les portes fermées.
Certains prononceront même des noms déplacés en tombant sur les dissonances crues de « Aria », comme ceux de KILLING JOKE ou des SWANS, et d’autres pourront même évoquer la vague Grunge des mid 90’s, tout autant que la scène Post Gothique métallique de la décennie suivante. En gros, un melting-pot savoureux et intrigant, qui vous donne plus que ce que vous en attendiez, sans forcément vous donner ce vous en espériez.
Mais les VIRIDANSE ne sont pas là pour vous caresser dans le sens des poils, mais bien pour les prendre à revers. C’est parfois sidérant d’étrangeté, comme le suggère l’ouverture éponyme de « Hansel, Gretel e la Strega Cannibale », qui sursaute d’un Rock direct et abrasif, hybride entre la scène Post Punk d’il y a trente ans et des riffs digne d’un SOUNDGARDEN des premières années. Il est aussi logique d’évoquer les JESUS LIZARD et KING CRIMSON en promenade digestive, ou une défiguration à la Lewis Carroll des préceptes de FUGAZI. Tout ceci vous étonne et vous bouscule ?
Tant mieux, c’est exactement l’effet voulu.
Dès lors, pas de problème à se sentir soufflé des respirations lourdes et presque Sludge de « Madre Terra », qu’un UFOMAMMUT déprimé aurait pu exhaler sur ses deniers albums (et ça n’est sans doute pas un hasard si on retrouve leur producteur collaboratif Lorenzo Stecconi derrière la console). Inutile de s’offusquer de même des dissonances extrêmes et Robert Smithiennes de « Il Grande Freddo », soudainement écrasées par une rythmique brisée à la MASTODON.
Et il n’est pas non plus indispensable de râler parce que leur « Arkham» évoque conjointement un HAWKWIND du petit matin spatial, noyé dans la distorsion, et des volutes théâtrales d’un Jaz Coleman bloqué dans un épisode de Twilight Zone musqué par PRIMUS.
Mais je vous l’accorde, le trip suggéré par Hansel, Gretel E La Stregga Cannibale n’est pas de ceux dont on revient indemne. On n’en revient pas totalement d’ailleurs. On préfère y rester, non parce qu’on y tourne en rond sans trouver la sortie, mais justement parce qu’il n’y a pas de sortie. Tel est l’apanage de ce progressif qui n’en est pas totalement, et qui est plus art de geste que geste technique.
Et si les enfants ne sont pas toujours complètement innocents, les musiciens sont souvent coupables. Et les membres de VIRIDANSE le sont d’avoir signé l’un des albums les plus énigmatiques et séduisants de ce début d’été.
Titres de l'album:
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