Troisième album pour les espagnols d’INJECTOR, LE groupe qui monte aux pochettes toujours impeccables. Et deux ans après le massif Stone Prevails qui nous assommait de son heure de jeu, les originaires de Carthagène s’en reviennent avec une attaque encore plus puissante, car plus concise. Conscients que douze morceaux pour soixante minutes de musique était peut-être une combinaison un peu roborative, le quatuor a donc condensé son propos, et l’a synthétisé pour atteindre les trois-quarts d’heure mythiques, cette norme que les eighties ont imposée. Et la coïncidence est décidément trop belle, puisque Haunt of the Rawhead est sans doute ce que le groupe a pondu de plus caractéristique de l’âge d’or du Thrash, sans renoncer à ses prétentions artistiques et techniques. Et ce qui permet aux ibères de se différencier de la concurrence est justement cette association entre puissance brute et délicatesse instrumentale, jonglant entre les approches pour soigner des compositions qui ne perdent rien en impact. Loin donc de la redite pénible des adorateurs du veau d’or BIG4, les membres d’INJECTOR associent une foi Heavy Metal indéfectible à une fascination pour l’agression américaine de la période 86/89, ce qui nous donne un résultat approchant la perfection, et au moins assez solide pour renvoyer les potes dans les cordes de la norme agaçante.
D’ailleurs, le groupe ne tarde pas à affermir ses positions, en lâchant en entame le diabolique « March to Kill », que l’OVERKILL le plus en forme aurait adoré interpréter. Et c’est avec un gigantesque pavé de cinq minutes sur la tronche que nous sommes accueillis dans les couloirs de ce troisième album, un album qui dès ses premières secondes parvient à unir la passion Rock n’Roll de MOTORHEAD et la jonction groove de PANTERA. A la limite d’un Heavy Thrash jouant avec les frontières, ce premier morceau est de ceux qui vous prennent à la gorge immédiatement, nous faisant penser à une version turbocompressée de METAL CHURCH, ou à un HEATHEN des derniers temps, en version beaucoup plus inspirée.
Enregistré, mixé et masterisé aux studios SUP, Haunt of the Rawhead est donc un gigantesque jeu de cache-cache dans une forêt quelconque, sorte de Predator musical qui nous laisse nous faire traquer par une bestiole Thrash aux muscles bandés et à la silhouette inquiétante, et une fois encore, les quatre soldats métalliques (Dani MVN - guitare/chant, Danny B - guitare, Mafy - basse/chant et Anibal - batterie) ont suivi leur entraînement à la lettre pour nous offrir la couverture dont nous avions besoin. Et alors que la production sature de plus en plus d’être polluée par des sous-produits confondant respect et plagiat pur et simple, INJECTOR propose sa propre version de la nostalgie, en l’agrémentant d’une approche plus contemporaine que ses adversaires. Avec un axe basse/batterie gonflé aux stéroïdes, deux guitares qui ne riffent pas dans le vide, une utilisation pertinente des chœurs, des breaks nombreux et judicieux, et des interventions en solo fluides, ce troisième chapitre de la saga se montre non seulement persuasif, mais aussi séduisant. Sans jouer le jeu Techno-Thrash un peu dangereux, les quatre compères n’hésitent pas à agrémenter leurs agressions de petites astuces instrumentales (sifflantes, polyrythmie, lignes de chant en contretemps), sans négliger le facteur le plus important : le riff. Et cet album en est truffé, spécialement lorsque les compositions prennent leur temps pour distiller leur propos.
Ainsi, alors que l’aplatissant « Unborn Legions » continue le travail de sape et impose un break totalement foudroyant, « Into The Black » commence déjà à emprunter des chemins de traverse, avec sa basse à la Dave Ellefson en intro, et son ambiance lourde et oppressante. Avec une utilisation fort pertinente d’arpèges en son clair soutenus par une batterie énorme et aux fills prolixes, le groupe joue le contraste et vient provoquer TESTAMENT sur son propre terrain, renvoyant le dernier album des américains dans les bacs à solde. Mais il faut attendre la mi-album pour savourer le premier morceau réellement épique, « Rhythm Of War », qui dès ses premières secondes laisse la basse purement Heavy rouler sur le côté pour laisser les guitares égrener des licks traditionnels, mais envoutants. Belle césure à l’hémistiche que nous proposent les espagnols, qui se montrent vraiment convaincants en terrain lourd, dès lors qu’ils acceptent le legs bluesy d’un PANTERA en pleine possession de ses moyens. On pense même aux magiques EXHORDER dans ces moments-là, et surtout, à la première division de la nouvelle école Thrash européenne, un peu plus audacieuse que la moyenne. Avec un chanteur au timbre assuré qui n’hésite pas à grogner lorsqu’il le faut, et une réelle complémentarité des deux guitares, Haunt of the Rawhead propose un équilibre très stable entre hier et aujourd’hui, multiplie les allusions aux meilleurs instrumentistes des eighties/nineties (MEKONG DELTA et BELIEVER sont cités indirectement sur « Arcane Soul » qui change de rythme comme de t-shirt) sans jamais perdre de vue son but, à savoir de nous faire virevolter la tignasse.
Et entre ces longs pamphlets démonstratifs mais puissants, nous avons aussi droit à des charges plus virulentes, dont « Feed The Monster » est un parfait exemple. Emprunte SLAYER pour pas chassé ASSASSIN, le combo est fatal, et « Interstellar Minds » pousse encore le bouchon avec ses trois minutes pour offrir aux plus velus leur dose de grisant. Ne reste plus au final « Boundbreaker » qu’à écraser ce qui reste de doutes, et de poser les jalons d’une rythmique à la DESTRUCTION pour annihiler toute résistance.
Ce troisième album est donc le plus solide que les INJECTOR ont pu nous offrir, et sans conteste, le dernier grand jet de cette sombre année 2020 qui n’aura pas été avare en sorties violentes. De quoi rivaliser avec les cadors de l’année, WARFECT, THRASHWALL et GAMA BOMB, sans jouer à leur propre jeu. Et selon moi, le véritable Big4 de ces douze derniers mois.
Titres de l’album:
01. March To Kill
02. Unborn Legions
03. Into The Black
04. Dreadnought Race
05. Rhythm Of War
06. Arcane Soul
07. Feed The Monster
08. Interstellar Minds
09. Boundbreaker
Alors, j'ai vu les prix et, effectivement, c'est triste de finir une carrière musicale emblématique sur un fistfucking de fan...
20/02/2025, 19:08
J'avoue tout !J'ai tenté avec un pote d'avoir des places le jour J...Quand on a effectivement vu le prix indécent du billet, v'là le froid quoi...Mais bon, lancé dans notre folie, on a tout de même tenté le coup...
20/02/2025, 18:52
Tout à fait d'accord avec toi, Tourista. En même temps, on a appris qu'Ozzy ne chanterait pas tout le concert de Black Sabbath. Du coup, faut essayer de justifier l'achat d'un ticket à un prix honteux pour un pétard mouillé.
20/02/2025, 09:27
Tout est dit.Que ce soir devant 50 personnes dans une salle de quartier ou dans un festival Hirax et en particulier Katon assuré à l'américaine. Parfait.L'album précèdent reste terrible. A voir celui ci.
19/02/2025, 17:51
Hell Yeah!!! Voilà ce que j'appelle une bombe bien métallique.P.S: Il serait bien que ce site passe en mode sécurisé: https car certains navigateurs refusent son ouverture car il est considéré comme malveillant.
19/02/2025, 16:32
Pareil, vu au Motoc l'année dernière plus par curiosité qu'autre chose : et bah c'était excellent ! La passion qui transpire, la nostalgie d'une époque aussi et puis cette énergie !
17/02/2025, 21:39
Oui, Keton de Pena est une légende encore vivante avec son Thrash reprenant pas mal les codes du Heavy. Il y met cette ambiance jubilatoire en forte communion avec les fans (il a dû vous faire le coup du drapeau). Je l'ai vu deux fois il y a une dizaine d'années, c&a(...)
17/02/2025, 13:18
Vu pour la toute première fois en live l'été dernier.Il était grand temps pour moi au vu que j'adore ce groupe...Le concert était laaaaaargement au-dessus de ce que j'en attendais : Ambiance, prestation, joie communicative, ultra-res(...)
17/02/2025, 06:50
C'est un groupe assez ancien en fait, ils ont bien vingt ans de carrière derrière eux. Martin Mendez les a recrutés pour son propre groupe parallèle à Opeth, White Stones, car il est installée à Barcelone. Ils avaient commenc&eacut(...)
15/02/2025, 18:14
Âge oblige, j'ai connu à fond cette époque et elle était formidable. Evidemment, aujourd'hui, il y a internet mais le gros avantage du tape-trading, c'était que, par défaut, un tri s'effectuait, copie après copie (de K7). Aujourd(...)
14/02/2025, 05:50
AAAAh Benediction... Toujours un plaisir de les retrouver. Et en live c'est du bonheur (efficacité et bonne humeur!)
13/02/2025, 18:38
Dans son livre "Extremity Retained", Jason Netherton met en lumière l'importance énorme que ce phénomène a eu lieu dans la naissance de la scène. Tous les acteurs isolés dans leurs coins du monde échangeaient par ce moyen, et cela le(...)
12/02/2025, 01:30