Jameson Walters aka Athenar est le genre de gars sympa que tout le monde connaît pour être allé chez lui boire une bière, et qui vous secoue toujours d’une de ses dernières créations, pour le simple plaisir du partage. Car le bonhomme est altruiste musicalement parlant, et nous offre régulièrement des albums simples, directs, chaleureux et gentiment paillards. Mais attention. Qui dit paillard ne dit pas forcément grossier ou vulgaire. Car Jameson est très à cheval sur la selle, au point d’y avoir incrusté un pommeau à l’effigie de CELTIC FROST.
MIDNIGHT, son vecteur d’expression principal renaît donc, deux ans après la calotte Let There Be Witchery, et je ne peux m’empêcher d’être admiratif de la passion manifesté par l’américain, qui tous les deux ans nous sort de son chapeau de sorcière un nouveau manifeste à l’usage des parias et autres rejetés de la société. Et on a beau connaître le principe, les astuces, et même le prestige lorsque la magie s’évapore, on se fait toujours avoir en craquant pour cette rythmique simple, ces riffs généreux, et cette production épaisse comme le dossier à charge d’un politique.
Athenar, responsable de tous les instruments, est un peu la famille RAMONES du Black/Thrash à lui tout seul. Un HELLHAMMER solitaire, les sens en avant, et la guitare constamment branchée sur la gégène. Un obsédé du riff gras, un admirateur sincère de Tom Warrior, un whizz kid qui nettoie plus noir que tous ses petits camarades, mais qui ne perd jamais de vue son objectif : jouer carré, trouver des gimmicks accrocheurs, et des thèmes l’étant tout autant, et une fois encore, avec Hellish Expectations, l’américain dépasse toutes les attentes, et sert encore bouillant l’album le plus spicy de sa carrière.
Hellish Expectations est à l’image de sa pochette. Gentiment blasphématoire, complètement jouissif, evil dans le sens comics du terme, et surtout, gai, enjoué, puissant et bien allumé. On connaît depuis longtemps les penchants de Jameson, qui d’année en année confirme son statut d’icône vivante de la culture Rétro-Thrash, tout comme Rogga Johansson assume son titre de légende de la scène Death old-school. Aussi prolifiques l’un que l’autre, les deux musiciens partagent cet amour du DIY, mais acceptent aussi le soutien d’un gros label pour diffuser leur musique le plus loin possible. Et bien sûr, Metal Blade fera encore tout ce qui est en son pouvoir pour propulser Hellish Expectations au sommet des playlists de ces plateformes d’écoute légale.
Dans le genre MOTORHEAD pour cramés du bulbe qui ne s’estiment pas encore assez atteints, MIDNIGHT se pose toujours là, et parvient même à greffer la mémoire de Lemmy au cœur sombre de Tom Warrior pour produire un gigantesque barouf Frankenstein à la limite du Punk Thrash le plus vicieux et païen. « Nuclear Savior » témoigne de l’amour porté pour ce proto-Thrash de la première moitié des années 80, et nous explose les valseuses d’une batterie hors contrôle et d’une guitare moulinant comme une machette dans la jungle.
Le résultat est une fois encore sans appel : MIDNIGHT règne sans partage sur la scène nostalgique de ces vingt dernières années. Le guitariste/bassiste/batteur/chanteur/auteur/compositeur n’a rien perdu de sa verve, et continue de cavaler comme un dératé, en sortant de la pièce bien avant que vous n’y soyez entré. En moins de trente minutes - pour garder la chaleur - Hellish Expectations nous chauffe les arpions comme un petit enfer personnel de poche, et nous ramène directement à la brutalité souriante des années de recherche dans l’extrême.
Aujourd’hui évidemment, eu égard aux styles bruitistes ayant émergé bien après le passage de la vague européenne et des bourrasques Thrash américaines, cet album paraîtra gentil, décontracté, et réservé à un public qui ne crache pas sur un brin de fantaisie à la AT WAR/WARFARE. Mais là où la plupart des disques du genre s’empêtrent dans la soue d’une bestialité stérile et noisy, MIDNIGHT décore ses structures sommaires d’ornementations ouvragées, ce qui nous permet d’apprécier le mid tempo d’un insistant « Mercyless Slaughtor », plus efficace qu’un tour pendable de VENOM en pleine confiance.
Difficile d’être plus clair quant au contexte, et aux intentions d’un musicien qui reste dans sa zone de confort, mais qui s’y sent tellement bien qu’il n’a pas à faire un pas de plus pour conserver notre affection. MIDNIGHT, plus propre que ses confrères sud-américains, plus joyeux que ses alter-ego US, reste un personnage/one-man-band terriblement attachant, au discours bref et concis.
Pas de problème de redite donc, et un arrière-goût BATHORY/HELLHAMMER/VENOM, la quintessence de cette décennie d’expérimentations, qui voyait les instrumentistes se battre pour être le plus vilain, le plus méchant, et le plus approximatif.
Alors certes, on sait ce qui nous attend, mais lorsqu’on déguste un bourguignon, on n’espère pas y trouver des crevettes ou du quinoa. On se régale du bœuf, on sauce avec son pain, on s’en met plein la panse et plein la tronche, et on digère plus tard, affalé comme un gros phoque.
Maigrir ou se réjouir, il faut choisir. C’est déjà fait.
Titres de l’album:
01. Expect Total Hell
02. Gash Scrape
03. Masked and Deadly
04. Slave of the Blade
05. Dungeon Lust
06. Nuclear Savior
07. Deliver Us to Devil
08. Mercyless Slaughtor
09. Doom Death Desire
10. F.O.A.L.
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