« Tiens, j’ai dégoté un excellent Bourgogne, tu me tends ton verre ? »
« Heu…T’as pas une bière plutôt ? »
(Mine déconfite de l’hôte, qui se rend compte que la finesse parfois n’apporte rien de plus à l’amitié).
Ne méprenez pas mes propos. J’ai aimé la bière, et bien fraîche et de qualité, c’est un vrai délice, mais un bon Bourgogne, c’est quand même autre chose, une chose qu’on apprend avec l’âge et une wonderbox « La Route de l’œnologie » offerte par des amis lorsque vous dépassez la trentaine. Mais nous avons tous quelque part commencé par la bière, celle qu’on allait acheter à l’épicerie du coin pendant une heure de permanence, au collège, histoire de faire comme si, et d’adopter la panoplie intégrale du petit hard-rockeur de province qui fait encore ses bracelets à clous lui-même. Tiens, je poussais même le vice jusqu’à faire mes badges moi-même, un ami m’ayant appris la délicate technique, et je pouvais donc m’enorgueillir de faire partie d’une famille, une vraie, qui se sevrait de décibels et de pochettes chamarrées, avec de jolies femmes dénudées ou des monstres bigarrés sortant des abysses de l’enfer. Il en va des artistes comme des fans, certains cherchent désespérément à coller à leur époque, d’autres définissent les courants à venir, tandis qu’une poignée d’irréductibles n’a de cesse de regarder en arrière en se disant que la musique d’avant était quand même plus bandante que celle de maintenant. C’est un point de vue que je partage parfois, souvent, lorsque j’ai la chance de tomber sur un album de Thrash old-school méchamment bien troussé, ou un pamphlet Heavy Metal plus rutilant que la première Harley de Rob Halford. Mais nous ne parlerons pas de JUDAS PRIEST aujourd’hui, plutôt d’autres contemporains, plus mélodiques, mais tout aussi hargneux. Nous parlerons d’IRON MAIDEN, de THIN LIZZY, nous parlerons de la NWOBHM, celle qui a traumatisé toute une génération de metalheads, cette NWOBHM qu’un peuple du nord remet au goût du jour à intervalles réguliers. Les suédois n’ont vécu cette vague que par procuration, avec quelques gouttelettes dans les années 80, mais l’ont adoptée comme dogme bien des années plus tard, lorsqu’ils se sont découvert un don unique pour réactualiser des sons de l’époque, avec le flair qu’on leur connaît. Et alors que le quatrième album de SCREAMER sort enfin, il est largement temps d’adopter ce postulat de façon définitive : les suédois sont les meilleurs nostalgiques et les plus crédibles que l’Europe compte dans ses rangs depuis quinze ans.
SCREAMER, c’est la bière de luxe. Une bière blonde à l’épaisseur de la brune, avec le goût de la blanche, soit le mélange le plus fatal des brasseries Hard-Rock du Nord de l’Europe. Un subtil panaché d’Angleterre, de la Belgique et de la Suède, pour un enivrement light qui ne laisse pas sur le flanc, mais le cœur léger. Fondé en 2009 du côté de Ljungby, ce quintet enfin stabilisé (Andreas Wikström - chant, Anton Fingal & Dejan Rosić - guitares, Fredrik Svensson Carlström - basse et Henrik Petersson - batterie) s’appuie aujourd’hui sur une discographie conséquente, avec pas moins de trois LP (Adrenaline Distractions, 2011, Phoenix, 2013, Hell Machine, 2017), auxquels vient s’ajouter ce petit dernier, Highway of Heroes, à la pochette sublime de passion rétrograde et de graphisme malicieux. Un mélange de mythologie grecque et d’animation à la Disney époque Tron, pour un disque synthétique, qui résume les quelques années de transition séparant les glorieuses 70’s des hédonistes 80’s. Une sorte de prolongement dans la continuité, une logique dans le passéisme, mais surtout, un flair incomparable pour se concentrer sur une poignée d’œuvres qui ont défini un son, et parvenir à trouver le sien, de façon définitive après des années de tâtonnement. Produit par Gustav Hjortsjö (BULLET), mixé par Tomas Skogsberg au Sunlight Studio, et masterisé par Patrik W. Engel au Temple Of Disharmony, Highway of Heroes profite du savoir-faire de trois pointures pour se déguiser en autoroute du plaisir, celles qu’on dévale à plus de cent-trente kilomètres heure, l’autoradio bloqué sur une vieille cassette de SATAN ou de MAIDEN. Efficace comme un riff de basse de Steve Harris, violent comme un couplet de Paul Di’Anno, tranchant comme un unisson entre K.K et Glenn, mélodique comme une approche de Steve Ramsey et Russ Tippins, ce quatrième LP d’une brièveté presque impudique (trente-quatre minutes à peine, j’ai connu des suédois plus généreux) pourrait presque voir sa philosophie résumée à un seul de ses titres, le tonitruant mais souple « Caught In Lies », qui termine l’album en bourrasque mélodique de premier choix, comme une excellente bière corsée qu’on avale d’un trait.
Toujours aussi souples dans la dureté, les suédois ont peaufiné leur son, et ont donc atteint leur stade de maturation. On sent sur ce nouvel effort un désir de compiler toutes les qualités déjà énoncées sur les trois précédents, d’arrondir les angles, pour se retrouver hissé dans le quatuor de tête des leaders de la vague old-school suédoise. Rien ne dépasse, aucune aspérité, la production est ronde comme le visage d’une adolescente sous des néons à la Michael Mann, et les guitares fixées et obnubilées par le Hard-Rock de l’orée des années 80, lorsque le PRIEST en définissait le polissage sur British Steel. Ainsi, l’entame « Ride On » rappelle évidemment la précision surnaturelle et chirurgicale du combo anglais, avec ses riffs au millimètre, tout en laissant trainer quelques allusions à la puissance allemande via des chœurs vraiment efficaces, mais pas pochtron pour autant. Car malgré cette attirance pour la base et les éléments les plus simples, les SCREAMER n’en sont pas pour autant de simples brailleurs, et connaissent leur LIZZY par coeur. On trouve toujours un peu de tout dans leur musique, des accents plus soft à la Ozzy, des emphases plus métalliques à la ACCEPT, quelques rapides œillades à la science romantique des SCORPIONS, soit une connaissance encyclopédique du Rock joué Hard d’une époque lointaine, que personne n’a pu oublier. Ils en signent même un hymne absolu à posteriori, avec « Shadow Hunter », qui transforme les poncifs et autres clichés en poses héroïques. Ne vous égarez toutefois pas sur le chemin de l’aveuglement, puisque ce que proposent les cinq musiciens n’a rien de novateur dans la nostalgie. On sent des réminiscences de RAM, des traces de STRIKER, parfois des touches fugaces d’ENFORCER, mais on finit par oublier les comparaisons sur l’air de « Rider Of Death », plus MAIDEN qu’Eddie se curant son énorme nez bandé, et occulter les similitudes en tapant du pied sur le tempo binaire de « Highway Of Heroes » (qui a de méchants faux airs de « Right Here in My Arms » de HIM sur l’intro).
Alors, bière ou Bourgogne ? Les deux, et c’est selon serais-je tenté de dire. On vieillit, mais on n’oublie pas. On savoure, mais on avale aussi d’un trait. Tout dépend des circonstances et des amis présents. Les SCREAMER en sont de charmants. Avec qui trinquer à la gloire du Hard Rock en toute sincérité.
Titres de l’album :
01. Intro
02. Ride On
03. Shadow Hunter
04. Rider Of Death
05. Sacrifice
06. Halo
07. Highway Of Heroes
08. Out Of The Dark
09. Towers Of Babylon
10. Caught In Lies
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21/11/2024, 08:46
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