Si les suédois jouent comme des suédois, que les norvégiens jouent comme des américains, qui sort gagnant de la confrontation ?
Vous.
En effet, ce premier album du collectif HORRIFIER est plus proche d’un massacre audiophile organisé que du pitoyable film du même nom, mais pose quand même la question de l’expression de genre. Après une première maquette puis un split, le groupe d’Oslo nous gratifie finalement d’un premier longue-durée qui sent bon les tripes périmées, et qui rend hommage, à sa façon, à la scène putride américaine de la fin des années 80.
Et il est assez plaisant de bouffer un ragoût de restes qui ne donne pas la sempiternelle impression d’avoir été préparé au studio Sunlight. Avec une pochette sobre mais efficace, une technique suffisante, et une imagination fascinée par AUTOPSY, OBITUARY et autres pourfendeurs de viande fraîche, HORRIFIER nous honore d’une table bien dressée, à la nappe ensanglantée et aux serviettes déjà utilisées par des bouffeurs sans manières.
Fondé en 2022, ce collectif en quatuor (Erik Krokan - basse, Andreas Langås - batterie, Sander Halvorsen - guitare et Adrian Risøy - guitare/chant) parvient donc à synthétiser toute l’horreur des sorties macabres d’une décennie de rejet permanent, nous trimbalant entre les tombes pour finalement, nous jeter en pâture à tous les zombies présents. Formidable exercice de style nostalgique, ce premier long est d’une haute teneur en riffs macabres, en ambiances délétères, et nous immerge dans une réalité cauchemardesque, en proie aux affres des fantasmes les moins avouables d’une faune de nécrophiles.
Mais, loin du barouf souvent proposé par l’underground le plus underground, Horrid Resurrection reste précis dans le brouillon, savoureux dans le bouillon, et terriblement attachant, comme un bout de cervelle collé à la semelle.
Produit à la louche pour sonner plus roots qu’un cri guttural de John Tardy, embrumé par des inflexions gravissimes, rythmé par un axe basse/batterie à l’abattage conséquent, Horrid Resurrection est une résurrection tardive, quelques semaines après une mise en terre bien méritée. Mais lorsque les cadavres s’ennuient sous la terre, ils ont tendance à remonter pour faire de notre vie un enfer. Et cette musique est la plus parfaite B.O d’un film pour maniaques et pervers, qui n’aiment rien tant que quelques asticots sur leur steak.
Je prends acte du classicisme de l’opération, mais je me délecte néanmoins de ce son de saison. Entre des guitares malmenées et dépressives, un chant sous-mixé qui va chercher ses glaires les plus grasses au fond de sa gorge, et une batterie en mouche qui pique et qui astique sévère en blasts lorsque la puissance l’exige, HORRIFIER joue crânement sa carte, et fait mouche à mer** à chaque fois.
On se sent tellement à l’aise que les effluves remontant des égouts ont un parfum délicieux, parfum dégagé par une copie d’origine du séminal Severed Survival d’AUTOPSY et par un vinyle usé du Master de MASTER.
Comme vous le constatez, nous sommes entre gens de très mauvaise compagnie, et si la majorité des titres suit une ligne de conduite bien tracée, avec des thèmes qui se répètent à intervalles réguliers, le plaisir n’en est pas moindre pour autant, d’autant que le quatuor s’y entend comme personne pour brosser des atmosphères déliquescentes sur le terrifiant et rigide « Assimilated Life ».
Proposant de temps à autres des développements plus conséquents, HORRIFIER se la joue Death/Doom/Grind, et nous assomme, nous percute, avec des idées qui foisonnent et un art consommé de la culbute. En format court, le groupe est impitoyable. « Deranged Sanity », en apogée de violence remonte aux origines de la mort pour la faire défiler un peu trop rapidement devant vos yeux, et en version longue, les détails s’accumulent comme des corps sur un champ de bataille pour bien brosser un tableau de mort globale.
« Horrid Resurrection », title-track le plus noble nous déroule ainsi le tapis rouge sang des VIP passionnés qui connaissent l’histoire du Death Metal par cœur. En sept minutes et quelques, cet épilogue traîne sa misère le long des stèles et plaques en marbre, pour constater les dégâts d’une société malade qui n’a pas su identifier son virus létal à temps. La lourdeur est appuyée, les riffs de plus en plus renoncés, et le chant, monocorde, agit comme un narrateur épuisé de souligner la perdition ambiante.
Du sale joué proprement, pour un son propre et une attitude saine. Ce premier longue-durée des norvégiens s’inscrit dans une logique old-school inévitable, mais a au moins le mérite de se creuser la tête pour ne pas sonner comme un simple démarquage à peine dissimulé.
Ça sent mauvais, c’est fort en bouche, mais ça vous dérange l’estomac des heures après ingestion. Qui à la chiasse perd sa place, et les toilettes risquent fort d’être encombrées après une telle nausée.
Titres de l’album:
01. Chainsaw Death
02. Injected Corpse
03. Hooks in Flesh
04. Assimilated Life
05. Deranged Sanity
06. Sick Twisted Pleasures
07. Sadistic Impalement
08. Horrid Resurrection
Effectivement c'est assez prometteur. Ils revendiquent Repulsion comme inspiration majeure, même si ça fait un peu plus Death Metal à l'arrivée.
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