Saluons le retour d’une des entités les plus diaboliques d’Ukraine, agitant l’underground depuis les mid nineties. Toujours aussi mystérieux et peu prolixe en commentaires, la bête HATE FOREST passe par Osmose pour nous avertir de son retour impitoyable, via un nouveau longue-durée mettant fin à quinze années de silence. Nous étions sans nouvelles des enfers de l’est depuis la parution en 2005 du manifeste Sorrow, et si les fans du monstre savaient très bien qu’il reviendrait chasser un jour sur ses terres, le plus gros des hordes avait depuis longtemps prononcé l’homélie. Mais tel est l’apanage des plus grandes références, savoir attendre le bon moment pour frapper, et avec ce cinquième album, HATE FOREST sort une nouvelle fois de la forêt les dents affutées et le verbe enragé. Formé en 1995 à Kharkiv, ce concept abscons dans le fond et classique dans la forme a donc largement établi sa réputation en dix ans d’existence, lâchant à intervalles réguliers des pamphlets haineux et bruyants, se constituant une base de fidèles dont la foi n’a de limite que celle des capacités de leur idole. Et toujours drivé par le seul et unique Roman Saenko (guitare, chant et basse), Hour of the Centaur continue de saper les fondations du Black Metal moderne pour le ramener vers ses racines les plus primales. Pas question ici d’adaptation des standards, de concession à la modernité, le BM est joué tel qu’il l’était aux origines, sauvage, brut, sans artifices, et à la violence reposant uniquement sur la densité de l’interprétation.
Décliné dans tous les formats possibles par Osmose, Hour of the Centaur se présente donc comme une aubaine pour les collectionneurs avides de vinyle et autres tapes. Et il est certain que pour en ressentir les effluves les plus nauséabonds, autant opter pour l’un de ces deux formats, qui nous rappelleront la grande époque du BM incompressible et sans pitié. Sans changer d’un iota sa recette, Roman accepte la programmation rythmique d’un acolyte, mais n’abandonne pas ses conceptions sur la brutalité la plus viscérale, en traitant sa musique comme il considère ses options : sans lâcher un pouce de terrain. Traité comme le furent les quatre premiers albums du projet, ce cinquième tome n’est qu’un bloc gigantesque de haine noire comme la nuit, une charge de violence ininterrompue, laissant la concurrence jouer dans le bac à sable des bacs à solde. Impossible en effet de trouver sur le marché une telle somme de bestialité avide, à moins d’accepter le grand raout des démos mal enregistrées et soldées pour tout compte. Mais ici, le chaos est traité avec admiration, et si les sept pistes de cette nouvelle épitre se ressemblent beaucoup, il ne faut y voir qu’une volonté de ne pas édulcorer la violence, et de laisser la vitesse faire son office.
Ce qui n’empêche pas Roman de savoir ralentir le phrasé de temps à autres, pour retrouver l’emphase du BM le plus impitoyable et écrasant. En témoigne le suffocant « Anxiously They Sleep in Tumuli », énorme pavé progressif de plus de neuf minutes, qui parvient à faire le lien entre la grandiloquence du BATHORY viking et le nihilisme du BM de l’est. Impeccablement produit, Hour of the Centaur amalgame la guitare, la basse et la batterie dans un même bloc, et laisse le chant faire son office en arrière-plan. Méchamment noyée dans le mixage, la voix infâme de Roman égrène ses litanies comme un prêtre Death défroqué, offrant à l’instrumental une patine encore plus malsaine. De fait, si « Those Who Worship the Sun Bring the Night » et « No Stronghold Can Withstand This Malice » parviennent à vous convaincre de leur caractère frondeur et de leur intensité démoniaque, le reste de l’album ne vous décevra pas.
Entre poussées de brutalité d’une densité rare, riffs cycliques éminemment redondants, mélodies maladives planant dans un ciel de brume, et agencements plus posés et progressifs (la coda de « Anxiously They Sleep in Tumuli » est un véritable modèle d’hypnose mélodique comme seul le regretté Jon Nödtveidt savait en composer), Hour of the Centaur est donc un manifeste de purisme poussé à son extrême, ne tolérant aucune adaptation à des canons actuels. Et s’il n’y avait cette production rêche symptomatique des enregistrements des années 2000, on pourrait croire cet album constitué d’inédits composés entre deux LPs précédents. Mais l’album a bien été construit l’année dernière, et représente le visage 2020 de la monstruosité HATE FOREST, bête au comportement linéaire mais inquiétant, traquant ses proies avec une efficacité redoutable, et une gestuelle véloce. Rien d’autre à retirer de cette sortie que sa vilénie et sa haine palpables, et heureusement, certains artistes se rappellent encore que le Black Metal sait rester pur sans se trahir de son propre statisme, le compteur s’arrêtant sous la barre des quarante minutes pour nous laisser digérer cette véhémence incroyable.
A réserver aux nostalgiques de la bestialité la plus traditionnelle, et ceux qui réfutent toute théorie d’évolution.
Titres de l’album:
01. Occidental, Beware the Steppe (Intro)
02. Those Who Worship the Sun Bring the Night
03. No Stronghold Can Withstand This Malice
04. To the North of Pontos Axeinos
05. Anxiously They Sleep in Tumuli
06. Melanchlaeni
07. Shadowed by a Veil of Scythian Arrows
Et oui...
Bizarrement HATE FOREST fait du HATE FOREST.
Et c'est bien tout ce que je voulais.
Exactement !
C'est pas tant la nostalgie de retrouver un black sans concession, mais celle d'un plaisir coupable d'etre face à une vraie pureté dans l'execution.
un bon 95% pour moi
l'un des rares albums intéressants dans le style
Alors, autant j'apprécie beaucoup Wolfheart, et cette news ne va rien y changer, autant, pour moi, l'Arabie Saoudite est l'un des pires pays au monde... Alors, je ne suis pas arabophobe, mais ce pays pue terriblement ! Je plains les Saoudiens (et surtout les Saoudiennes) qui(...)
21/11/2024, 18:01
"...jouer un concert en Arabie Saoudite. Un honneur absolu et un privilège. Les loups du nord apporteront la tempête hivernale à Riyad !"Un véritable honneur absolue de jouer en Arabie Saoudite, la ou les apostas sont condamnés &agra(...)
21/11/2024, 08:46
Quand on se souvient du petit son des années 80... Mais la prod ne fait pas tout, ça reste du pilotage automatique. C'est pas avec un truc pareil que je vais me réconcilier avec eux, et ça fait 20 piges que ça dure.
19/11/2024, 21:57
J'avais pas vu cette chronique. J'étais au soir avec Ulcerate et je n'ai pas du tout regretté...Le lieu : il y a forcément un charme particulier à voir ce genre de concert dans une église, surtout que le bâtimen(...)
15/11/2024, 09:51
Le who's who des tueurs en série. Un plus gros budget pour l'artwork que pour le clip, assurément. (...)
14/11/2024, 09:20