Vous pouvez faire confiance aux autrichiens de Napalm Records. Ils mettent rarement leurs pieds n’importe où. Et s’ils ont signé les hollandais de SISTERS OF SUFFOCATION après la parution de leur premier album pour enrichir leur cheptel, c’est qu’ils avaient une bonne raison de le faire. Immédiatement, certaines mauvaises langues crieraient au gimmick, au groupe de filles qui font du barouf, et miseraient sur un gigantesque coup de pub, sauf qu’on se fout depuis longtemps du genre des musiciens qui s’épanchent dans l’extrême, le sexe n’ayant pas grand lien avec les capacités individuelles et collectives. Et autant l’admettre, Anthology of Curiosities était un sacré coup de pied au cul, tout comme Brutal Queen était une carte de visite notable. Mais alors, pour ceux étant resté dans le flou depuis 2014, à quoi se résume le concept de ce quintet qui au départ rappelons-le, était uniquement constitué de musiciennes ? A un Death Metal pluriel, intuitif, mais beaucoup plus diversifié que la moyenne. Un genre de SISTERS OF MERCY vs SUFFOCATION dans l’appellation, et à beaucoup de puissance dans les faits. Inutile de chercher le moindre point faible derrière le tableau séduisant, puisque les originaires d’Eindhoven malgré une copie visuelle travaillée, ont surtout privilégié et peaufiné le fond, la substance, pour se distancier des formations actuelles qui pensent encore qu’on peut s’en sortir avec une copie notée old-school qui assure l’intérêt des plus passéistes. Et croyez-moi, un groupe qui va chercher plus loin que le bout de ses riffs gras l’inspiration pour happer un public différent est une denrée rare ces dernières années. Mais par différent, ne comprenez pas avant-gardiste, ou expérimental. Car le Death joué par ces bataves n’a rien d’une tentative arty, mais s’enrichit de sonorités plus ou moins inhabituelles, et d’une envie de transcender les limites d’un genre qu’il a atteint depuis longtemps. Et si les bonnes impressions dégagées à l’occasion d’Anthology of Curiosities laissaient un sentiment d’attente et de capacités pas encore complètement exploitées, Humans Are Broken précise les ambitions, et signe un véritable manifeste de distanciation, avec l’efficacité en ligne de mire, et la surprise comme nappage pour rendre le gâteau encore meilleur.
Un gâteau fielleux, à l’épaisse couche de glaçage qui cache un intérieur massif et parfois poivré, sucré juste ce qu’il faut en termes de mélodies, mais qui laisse l’estomac auditif satisfait d’avoir enfin goûté quelque chose de différent. Sans vraiment faire appel à des influences que les spécialistes reconnaîtront, les SISTERS OF SUFFOCATION se permettent donc une fois encore de mélanger les approches et le savoir-faire, et associent dans un même élan de brutalité la force de frappe de la seconde génération Death US, et la sophistication subtile d’un Metal violent moderne, qui ne se veut ni opportuniste, ni maladroit. Le mélange est donc très équilibré, et si évidemment, on sent des recettes en arrière-plan, le tout se veut suffisamment original et peaufiné pour obtenir une étoile de plus au guide morbide. Quintet plus vraiment totalement féminin depuis l’adjonction d’un batteur (Els Prins - chant, Simone van Straten & Emmelie Herwegh - guitares, Puck Wildschut - basse et Kevin van den Heiligenberg - batterie), SISTERS OF SUFFOCATION est une sorte de piège de claustrophobie qui se referme sur vous une fois les premières mesures passées, une maison de l’horreur qui ménage ses effets pour vraiment faire peur et faire couler la sueur au détour d’un couloir, aménageant des espaces lumineux dans lesquels les mélodies peuvent filtrer, pour mieux vous emprisonner dans une chambre des tortures opaque aux chaînes rouillées et aux candélabres poussiéreux l’instant suivant. Empruntant tout autant aux origines du genre qu’à ses extensions scandinaves les plus nineties, et enjolivant le tout d’un sadisme de production très contemporain, Humans Are Broken joue sur les deux tableaux de la bestialité et de l’intelligence, à des années-lumière de l’effet choc immédiat recherché par bon nombre de ses contemporains. Pour illustrer cet état de fait et ces conclusions, je pourrais citer l’ambivalent « Liar », qui joue avec beaucoup de malice sur cette dualité graves/aigus, distillant des arpèges rassurant et des concassages aplatissant les tympans, pouvant de fait compter sur une inspiration plus riche que la moyenne. AT THE GATES, BOLT THROWER, SUFFOCATION (expurgé de sa technique trop affûtée), CANNIBAL CORPSE, mais aussi les premiers efforts d’ARCH ENEMY, pour un tableau global aux différentes couches s’amalgamant dans un rendu final très précis, et une optique qui laisse admiratif de son culot, culot qui ne choque pas, mais qui frappe les esprits.
La force de ce second LP est d’une part de ne pas réutiliser complètement les astuces du premier sans en trahir les convictions, et surtout, de moduler, encore et toujours, sans que l’efficacité n’en pâtisse. Mais son autre atout est de nous emmener un peu où il veut, et le fait d’avoir placé en ouverture trois morceaux plus immédiats et bestiaux que la moyenne relève de l’intelligence d’agencement pur, avec ces blasts qui préviennent de la violence à venir, et cette dualité vocale qui nous avertit de la véhémence du propos. Niveau percussions, les quatre musiciennes ont eu le nez creux d’embaucher Kevin van den Heiligenberg d’AWAKENING SUN, puisque sa frappe mouvante, fluide et créative apporte une plus-value à des morceaux à tiroir, qui en un minimum de temps casent un maximum d’idées, sans se montrer trop flottant ou versatiles. Les arrangements globaux, sobres, reposent la plupart du temps sur des breaks rythmiques dynamisant, et évidemment sur cette alternance de chant grave et hystérique, la véritable trademark d’Els Prins qui convainc en maitresse de cérémonie, toujours prompte à lâcher un grognement assourdissant ou un cri strident. Mais la véritable force de ce second LP est cet équilibre trouvé entre séduction mélodique et bousculade rythmique, cette constante valse entre ultraviolence et négociations Heavy, et « Wolves » de nous en persuader en pile moins de trois minutes, à deux secondes près. Et si la production semble avoir un peu trop compressé la batterie (qui sonne parfois comme une vulgaire programmation), elle se rattrape sur la distance puisque le mix n’a lésé personne, et surtout pas la paire de guitares qui s’amusent follement à marier des riffs purement bestiaux et des mélodies presque déviantes de la NWOBHM, ou tout du moins de l’école Néo-Death scandinave.
Et ça déroule, entre dissonance et latence (« The Machine », à broyer évidemment, mais qui le laisse plus rien traîner), entre coups de poing vraiment Heavy mais étrangement AT THE GATES (« What We Create »), entre inserts Thrash qui rapprocheraient même le quintet des NERVOSA, en version moins potache (« The Objective »), et évolutions progressives fourbes, mais attachantes dans ce désir de ne jamais complètement nier la lumière du jour (« Burn », l’un des gros morceaux, à l’atmosphère travaillée, aux murs d’inspiration suintant de méchanceté, et au refrain/mantra martelé comme des coups de masse sur les pieds). Sombre, mais au son clair, tendancieux, mais franc, Humans Are Broken est une bouffée d’air frais dans le bunker du Death mondain et contemporain, et s’avère unique dans sa démarche, mais fédérateur dans son envie. De véritables chansons agencées comme telles, et qui parviennent à structurer la brutalité pour la rendre plus séduisante.
Titres de l'album :
01. Humans Are Broken
02. Wolves
03. War In My Head
04. The Machine
05. What We Create
06. Liar
07. Little Shits
08. The Next Big Thing
09. Blood On Blood
10. The Objective
11. Burn
12. Every Little Fibre
13. For I Have Sinned
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