Hier soir, GOJIRA a enflammé la cérémonie d’ouverture des J.O 2024 avec une appropriation de « Ça ira ». Pour ceux qui comme moi écoutent du Metal depuis la première moitié des années 80, cet évènement est tout simplement incroyable et fantastique. Une musique extrême choisie pour illustrer un tableau de cette institution internationale est le signe indéniable d’une ouverture vers les musiques que nous aimons tant, chose qui paraissait encore incroyable il y a dix ans. Une victoire pour nous, qui vivons dans l’ombre depuis des décennies, et qui avons l’habitude d’être stigmatisés comme un public violent avide de bruit et de fureur.
Mais le bruit et la fureur ne sont-ils pas les concepts les plus adaptés à notre époque troublée ?
Si.
Et dans un registre similaire mais différent, le deuxième album des américains de LACERATION est une autre preuve que le monde est enfin prêt à basculer du côté obscur. Moins progressifs que nos français chéris, ces originaires de Windsor en Californie proposent un Death Metal teinté de légers pastels Thrash, le tout recouvert d’un glaçage de brutalité ouverte et de mélodies qui entrent par la fenêtre.
LACERATION, c’est une carrière de presque vingt ans, sanctionnée jusqu’à présent d’un unique longue-durée, Demise, publié il y a trois ans. Une carrière erratique, ponctué de splits, de démos et de compilations, avant qu’enfin la professionnalisation ne frappe à la bonne porte. Et ce deuxième long, qui ne l’est pas tant que ça d’ailleurs est la preuve que le groupe est sur la bonne voie de la reconnaissance.
Qu’il mérite amplement.
Eli Small (basse), Donnie Small (guitare), Luke Cazares (guitare/chant) et Aerin Johnson (batterie), quatre musiciens dont deux ayant fait partie de l’excellent INTRINSIC, s’unissent donc pour relire les canons du Death Metal traditionnel. Un Death à l’américaine, direct, puissant, méchant et suintant de vilénie. A cheval sur ses principes de technique poussée, le groupe nous sert bouillants une petite dizaine de titres qui sont autant d’hymnes à la bestialité floridienne, celle des pionniers qui avaient encore tout à prouver.
Enregistré par Matt Harvey d’EXHUMED aux Dark Corners Studios de San Luis Obispo en Californie, mixé et masterisé par Greg Wilkinson aux Earhammer Studios d’Oakland, I Erode est aussi nostalgique qu’un disque de Death peut l’être quand il respecte ses propres codes. Néanmoins, les californiens ont ajouté leur patte à cette transcription fidèle, en trouvant le plus juste équilibre entre technique et furie, ce qui permet aux titres de rebondir sans cesse et de nous prendre à la gorge tout en nous lacérant le torse.
Mais avec quelques mélodies insérées avec beaucoup d’intelligence, une implication intégrale et une concision le confinant à l’ascétisme, LACERATION va beaucoup plus loin que son nom ne le suggère, et sublime le traditionalisme en vogue entre 1991 et 1995, pour accoucher d’une énorme bestiole qui effectivement, a un pouvoir d’érosion des sens assez impressionnant.
« Excised » en explique d’ailleurs les tenants et aboutissants sans ambages. Immédiatement la rythmique et en place, les guitares en traquenard, et la voix prête à grogner dans le micro. L’ambiance est classique, les thématiques formelles, et le résultat impeccable. Le Death véloce et féroce des californiens est carré, soupesé, calibré, et rien n’en dépasse, si ce ne sont quelques pics d’intensité.
Enjolivé par quelques idées plus gaies et colorées, I Erode se montre sous un jour flatteur, même si le côté rouleau-compresseur de l’affaire pourra rebuter les amateurs de finesse et de déviations toutes en tendresse. Les éléments Thrash sont à chercher dans les arrangements, dans les cassures plus souples, et il n’est pas réducteur d’affilier directement le groupe à la mouvance Death Metal dont il fait indéniablement partie.
LACERATION a soigné son retour, mais n’a accepté aucune concession. « Carcerality », méchant comme une teigne, « Strangled By Hatred », ambitieux et évolutif, « Impaling Sorrow » qui aplatit plus efficacement qu’une énorme presse hydraulique, nous entraînent dans les bas-fonds de l’album, qui cachent un dernier secret précieux. Le title-track, coincé en dernière position, et qui résume toutes les formules employées. Heurts incessants, cruauté de surface pour une intelligence qui jamais ne s’efface, des plans par kilos, et une densité tassée au marteau.
Ce deuxième album est donc le fruit d’une filiation évidente en interne, et la preuve que le Death se porte toujours aussi bien. Peut-être qu’un jour les LACERATION joueront pour la mi-temps du Superbowl, dans un tableau enflammé ravissant les mirettes des petits et des grands. Ah, ça ira.
Les sceptiques et les aristochats à la lanterne.
Titres de l’album :
01. Degradation
02. Excised
03. Sadistic Enthrallment
04. Vile Incarnate
05. Dreams Of The Formless
06. Carcerality
07. Strangled By Hatred
08. Impaling Sorrow
09. I Erode
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21/11/2024, 08:46
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