Attention, violence ouverte, agression technique, et approche divergente. Cet avertissement pour ne pas que vous puissiez vous plaindre d’avoir perdu trente pour cent d’audition et une grosse poignée de neurones après avoir encaissé le choc Imminent Collapse. Album qui d’ailleurs vous prévient de son titre, et ne vous prend pas en traître.
On sait que le terme « avant-gardiste » est souvent galvaudé par des critiques en mal de sensations. Et si je l’utilise en tant que mot clé de cette chronique, je lui préfère celui plus adéquat de Dissonant Death Metal, plus en phase avec le barouf explosé par ces canadiens énervés. Formé il y a une dizaine d’années, le collectif de Saint-Sauveur IGNOMINY n’a pas précipité les choses, et a préféré les laisser évoluer par elles-mêmes. Un simple EP lâché en 2019 (Fear the Living), un single avant-coureur l’année dernière, pour enfin se consacrer à l’élaboration d’un longue-durée, qui toutefois excède à peine la demi-heure.
Une demi-heure seulement, mais quelle demi-heure. Quelque part entre GORGUTS et DODECAHEDRON, IGNOMINY vous offre une présentation dissonante d’un Death Metal très technique et précis, mais suffisamment organique pour intéresser les puristes. Loin de la facilité old-school de la scène vintage qui fait du surplace depuis dix ans, Imminent Collapse provoque des sensations terriblement agréables à défaut d’être complètement novatrices, et nous assène coup sur coup tout en prenant soin d’aménager des espaces plus aérés, mais tout aussi vicieux.
Philippe Gariépy (guitare), Marc-Antoine Lazure (batterie), Alexandre Desroches (chant) et Alexandre Préfontaine (basse) se recommandent d’eux-mêmes aux fans de DYSGNOSTIC, GORGUTS, ULCERATE, NORSE, SUNLESS, DISCHORDIA, ou NOCTAMBULIST, et si les citations sont assez pertinentes, elles n’en couvrent pas pour autant tout le terrain. On reconnaît bien la patte de cette scène canadienne toujours prompte à se démarquer de son homologue américaine, et ainsi emprunter des chemins plus tortueux pour arriver à la seule destination possible : l’agression dissonante et l’atmosphérique déviant.
Ce premier album à la production énorme est un sans-faute, autant le préciser. Les riffs sont malsains à souhait, le batteur abat un boulot de dingue, et si la voix reste gravement classique, l’instrumentation est précise, et évolue entre les innovations du début du vingt-et-unième siècle, et les propositions amères de la fin des nineties. On se laisse donc prendre au jeu qui n’a que des gagnants, et les morceaux infusent dans notre inconscient leur parfum étrange, entre l’humidité suintante d’une cave abandonnée et les effluves nauséabonds d’un système d’égouts fluviaux encombré par les immondices.
La force de ce disque est sa précision, sa pertinence, et sa variété de ton. Réservé certes à un public rompu à l’exercice de l’expérimentation la moins bridée, Imminent Collapse est un genre de scare jump permanent, qui joue avec les nerfs avant de les briser pour toujours. J’en prends pour preuve le monumental « Nightmare Bacteria », labyrinthe sonore de plus de six minutes, qui profite d’une basse grondante pour dérouler des licks fantomatiques, le tout assemblé avec une précision chirurgicale. Difficile de ne pas acquiescer aux propositions formulées par le quatuor, qui trouve toujours un angle d’attaque entre tradition et innovation, et qui n’hésite jamais à en rajouter dans la discordance et l’irritation des sens.
Rarement puissance n’aura été si imposante, et proportionnelle à la créativité affichée. Si parfois, les testeurs de laboratoire de mort se perdent dans leurs propres expériences, IGNOMINY suit son fil rouge avec fermeté, et plus l’album avance, plus l’ambiance s’assombrit, au point de devenir opaque sur les trois derniers morceaux.
On saluera la méchanceté instrumentale de « Visceral » qui tord les tripes plus efficacement qu’une gastro carabinée, mais qui stimule l’intellect de ses nombreuses cassures, et l’imposant épilogue « Visuals », qui tente le coup de la peinture musicale avec beaucoup d’imagination.
Glauque mais propre, Imminent Collapse est un choc de défibrillateur puissance mille, qui accélère le palpitant comme il accentue les humeurs. Toutes les astuces sont employées à bon escient, entre arpèges nuageux et passages rythmiques déchaînés. L’équilibre est donc très stable pour les canadiens, qui se paient une entrée en matière tonitruante, mais à la hauteur des ambitions affichées.
On regrettera d’autant plus l’absence de rab, trente-quatre minutes étant un métrage bien trop modeste au regard des capacités. Mais autant dire que cette carrière est lancée dans la stratosphère, et drainera dans son sillage tous les maniaques de la disharmonie et les addicts aux sons irritants et obsédants.
Le digne héritier de GORGUTS ? Peut-être, seul l’avenir nous le dira. Mais en hurlant s’entend.
Titres de l’album:
01. Frantic Appeasement
02. Defaulting Genetics
03. Reminiscence of Hatred
04. Premonition of a Dead End (Interlude I)
05. Nightmare Bacteria
06. Visceral
07. Prélude Vers L'angoisse (Interlude II)
08. Visuals
Haaaa le Rock est tout sauf négociable !! Merci pour cette belle critique.Chazz (2Sisters)
17/01/2025, 22:44
Non putain ça fait chier ! Je m'en fout de revoir Rob derrière le micro de mon groupe préféré d'amour !
17/01/2025, 17:03
J'ai cru comprendre que Zetro se retirait pour problème de santé.J'espère que ça ira pour lui.En tout cas avec Dukes sur scène, ça va envoyer le pâte.
16/01/2025, 18:21
Super nouvelle pour moi, le chant de Zetro m'est difficilement supportable. Celui de Dukes n'a rien d'extraordinaire mais il colle assez bien à la musique et le gars assure sur scène.
16/01/2025, 12:15
Eh beh... Étonné par ce changement de line-up. Vu comment Exo était en forme sur scène ces dernières années avec Souza ! Mais bon, Dukes (re)tiendra la barque sans soucis aussi.
16/01/2025, 10:22
Super. L'album devrait être à la hauteur. Beaucoup de superbes sorties sont à venir ce 1er semestre 2025. P.S. : le site metalnews devrait passer en mode https (internet & connexion sécurisé(e)s) car certains navigateurs le reconnaisent comme(...)
15/01/2025, 12:58
Je viens de tomber dessus, grosse baffe dans la gueule, et c'est français en plus!Un disque à réécouter plusieurs fois car très riche, j'ai hâte de pouvoir les voir en concert en espérant une tournée pour cet album assez incr(...)
14/01/2025, 09:27
Capsf1team + 1.Je dirai même plus : Mettre cela directement sur la bandeau vertical de droite qui propose toutes les chroniques. En gros faire comme pour les news quoi : Nom du groupe, titre de l'album et entre parenthèse style + nationalité.
13/01/2025, 08:36
Oui en effet dans les news on voit bien les étiquettes, mais sur la page chronique on a juste la première ligne de la chro, peut-être que ce serait intéressant de le mettre dans l'en-tête.
13/01/2025, 07:59
Capsf1team : tu voudrais que l'on indique cela où exactement ? Dans l'entête des chroniques ? En début de chronique ?Aujourd'hui le style apparait dans les étiquettes que l'on met aux articles, mais peut-être que ça ne se voit pas d&(...)
12/01/2025, 17:38
Poh poh poh poh... ... ...Tout le monde ici à l'habitude de te remercier pour la somme de taf fournie mortne2001, mais là... Là, on peut dire que tu t'es surpassé.Improbable cette énumération.Et le pire, c'est qu'a(...)
12/01/2025, 14:27
Jus de cadavre, putain mais merci pour la découverte Pneuma Hagion. C'est excellent! Du death qui t'envoie direct brûler en enfer.
11/01/2025, 12:16
Merci pour tout le travail accompli et ce top fort plaisant à lire tous les ans. Moi aussi je vieilli et impossible de suivre le raz de marée des nouvelles sorties quotidiennes... Suggestion peut-être à propos des chroniques, est-ce que l'on ne pourrait pas indique(...)
10/01/2025, 09:12
J'aurais pu citer les Brodequin et Benighted que j'avais bien remarqués en début d'année, aussi, mais il faut choisir... Quant au Falling in Reverse, cette pochette ressemble trop à une vieille photo de J-J Goldman dans les années 80, je ne peux p(...)
09/01/2025, 19:49