Lorsque deux membres du collectif SUN O))) et Attila Csihar, hurleur de MAYHEM ont un jour décidé d’unir leurs sombres desseins autour d’un projet commun, beaucoup doutaient de sa fiabilité. Non que le Drone et le BM soient incompatibles, loin de là, mais on imaginait mal comment trois personnalités aussi fortes allaient se retrouver autour d’un consensus musical.
Imaginé d’abord comme un projet live, GRAVETEMPLE s’est finalement retrouvé cloisonné dans la moiteur d’un studio pour figer sur bandes ses hallucinations, qui ma foi, ont depuis effrayé pas mal de fans d’extrême, qui n’imaginaient pas se frotter à un tel Armageddon sonore. Pourtant loin du statisme d’un Drone qui pour beaucoup, incarne la Némésis bruitiste de tous les adorateurs de violence, la musique composée par les trois exilés avait de quoi séduire les passionnés d’extrême. Thèmes porteurs morbides et caverneux, déambulations dans l’absurde assumées et provoquées, et assemblages de sons tout sauf disparates qui une fois accolés, formaient une symphonie de l’horreur humaine que chacun doit affronter consciemment ou pas.
Et après un initial et traumatique The Holy Down, publié un an après leur formation, le trio s’est aventuré dans des pérégrinations en concert, na gravant pour la postérité qu’une démo et un live incarnant leurs apparitions scéniques.
Depuis, pas grand-chose. Et le depuis symbolisant l’année 2009, on se demandait si un jour l’hydre à trois têtes allait continuer sa mission de déconstruction de la musique occulte.
C’était sans compter sur le caractère farouchement imprévisible de ces musiciens qui n’ont jamais envisagé le temps comme tout le monde.
2017, retour d’Attila Csihar, Oren Ambarchi et Stephen'O Malley pour la descente aux enfers Impassable Fears, qui s’il reprend peu ou prou les recettes de base de la théorie, avance à grands pas vers une perfection absolue qui ne saura convaincre qu’une infime partie de la fanbase d’un Metal noir et insondable.
L’équation pourrait être simple, mais elle ne l’est assurément pas. En ajoutant les énigmatiques et opaques tremblements de SUN O))), jamais avares de sons caverneux et de vibrations cauchemardesques, et le passé trouble de Csihar, il semblait facile d’obtenir un résultat viable apte à décrire avec précision l’orientation voulue et choisie par les trois hommes.
Mais les solutions les plus simples n’étant jamais les meilleures ou les plus logiques, ce second LP de GRAVETEMPLE se veut contraire d’une addition basique, et plutôt multiplication des talents pour parvenir à une apothéose de violence sourde et diffuse, à cent lieues d’une routine roborative de graves se répercutant sur les murs du nihilisme.
Car la musique proposée sur ces six pistes est riche, très riche, envoutante, presque chamanique, et surtout, créative et imprévisible. Tout ça parce que chacun des acteurs impliqués a su transcender ses propres influences pour mettre au service d’un collectif une inspiration commune supérieure à la somme des parties de ses envies.
On le sait, et c’est d’une logique imparable, un groupe c’est l’union de X musiciens, qui jouent tous dans la même direction pour dégager une voie musicale logique, et « diplomatique ». Et là où GRAVETEMPLE se distingue de la masse, c’est que ses trois membres semblent lire une partition qui leur est propre, sans connaître celle suivie par leur voisin.
Tout cela pourrait aboutir à une cacophonie étrange et insupportable, et pourtant, reste cohérent, mais surtout, d’une étrange liberté qui ne cède jamais le pas à l’excuse de l’expérimental affranchi.
Certes, expérimental, le trio l’est. Mais la fusion des trois talents aboutit à une explosion de noirceur chaotique et cathartique, un peu comme si les LITTLE WOMEN, MAYHEM et SUN O))) se trouvaient transportés via un pod dans un univers parallèle, dans lequel l’union entre le Free Jazz, le Drone et le Black Metal pourraient cohabiter sans que cela ne choque personne.
Tout ça vous semble un peu trop abscons ? Mais rassurez-vous, l’introductif « A Szarka » vous l’expliquera en ses propres termes, et en un peu plus de sept minutes.
En substance, Impassable Fears est une alternance diabolique entre des segments d’une longueur coutumière aux fans de SUN O))), et des intermèdes beaucoup plus brefs qui dynamisent la mécanique.
Ainsi, « Elavúlt Földbolygó » n’hésite pas à fouler du son les dix minutes de torture mentale et auditive, pour laisser la guitare plonger dans des abysses de gravité et de feedback. La polyrythmie rappellera sans doute à Csihar les numéros de funambule de son batteur Hellhammer, bien que la technique libre pousse les choses encore plus loin, et préférant les percussions foisonnantes à un beat suivi et marqué.
La production, sourde et compacte ne fait qu’ajouter une aura de mystère à cette bande son traumatique, qui tient tout autant du Post Black que du Death dronique impénétrable, et qui nous entraîne dans la folie collective d’un projet qui semble échapper à toute restriction normative.
Pour autant, tout découle, et suit une progression. L’enchaînement de l’intermède grondant « A Karma Karmai » et de l’hypnotique segment redondant « Domino » nous prépare au déluge de haine « Áthatolhatatlan Félelmek », qui tout en reprenant les préceptes des premiers morceaux, nous emmène encore plus loin dans l’abstraction musicale, réfutant tout principe de cohésion.
On s’enfonce dans le bourbier de l’humanité, et les plans s’imbriquent en dépit de toute évolution, comme si les auteurs avaient préféré laisser s’exprimer leur sensibilité plutôt que d’établir un plan d’attaque. La liberté est patente, et le tout donne un sentiment d’inachevé, qui loin de frustrer, nous comble des possibilités de collage qu’il offre.
Les vignettes noires se collent au cahier de la distorsion, et seul le final éthéré et apaisant de « Az Örök Végtelen Üresség » nous offre une sorte de paix conclusive, toutefois assez sombre et troublante pour ne pas trop nous rassurer.
GRAVETEMPLE signe un roman qui ressemble plutôt à un recueil de nouvelles, couchées sur partitions, et qui ne suivent pas forcément la même histoire. Des nouvelles qui fusent d’inspiration plurielle, et qui se contentent parfois d’une suite d’aphorismes musicaux ou d’humeurs, sans se soucier d’un fil conducteur solide. Cette sensation éphémère est particulièrement attachante et hypnotique, et transforme ce second LP en œuvre majeure, fugace mais durable, instantanée mais amener à rester ancrée dans le temps.
Pas le nôtre, mais celui qui régit l’imaginaire d’un trio qui a refusé depuis longtemps la facilité.
Titres de l'album:
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