In the Cesspit of Divine Decay

Altar Of Oblivion

28/06/2024

From The Vaults

Dans le cloaque de la décomposition divine.

Voilà un titre accrocheur, pour le moins. Avec un tel en-tête, on est en droit d’attendre un énième glaviot Death Metal ou une croix renversée Black Metal, mais c’est finalement le Heavy Metal qui bénéficie de ce gimmick, mais pas n’importe lequel. Le Heavy à la danoise, celui qu’on a connu par les vices de MERCYFUL FATE, et qui depuis l’orée des années 80 défend un certain état d’esprit occulte et traditionaliste.      

         

Pas n’importe lequel, mais pas par n’importe qui non plus. ALTAR OF OBLIVION est un nom sacrément connu de la scène épique, et qui depuis presque vingt ans nous a gratifiés de quatre longue-durée, dont le dernier, The Seven Spirits, avait une fois encore conquis son public. ALTAR OF OBLIVION revient donc sur ses terres pour constater l’étendue des dégâts, et nous propose une formule magique pour transformer un champ de ruine en prairie verdoyante. Verdoyante, mais pas trop. Après tout, le Doom s’accommode très bien de la solitude et de l’infertilité, et lorsqu’il est joué plus rapidement, au rythme d’un Heavy Metal noble et royal, il se trempe dans les eaux des légendes passées, celles que l’on raconte à ses descendants.

Mais avec In the Cesspit of Divine Decay, il est inutile de raconter quoi que ce soit. La musique le fait très bien par elle-même.

Qu’en est-il de ce cloaque montré du doigt par les danois ? Il est historique, véridique, et soulève le lièvre d’un projet fomenté depuis de longues années. Ce quatrième long est en effet basé sur les journaux personnels de l’arrière-grand-père maternel de Martin Meyer Sparvath, qui a combattu à regret pour l’armée allemande durant la grande guerre de 14-18. Ce récit est donc un terreau fertile pour des aventures homériques, des épisodes de violence crue, le déchirement de devoir combattre sous une bannière que l’on n’a pas choisie, et la solitude qui accompagne le silence après les combats.

Mais comme je le soulignais, le projet ne s’est pas monté au débotté. A vrai dire, la première maquette de cet album date de 2005, lorsque le groupe s’appelait encore SUMMONING SICKNESS. Il aura donc fallu pas loin de deux décennies pour qu’il voit le jour, sous la forme de dix titres aussi fondamentaux qu’émouvants, avec toujours en exergue, cette fascination pour le Doom le plus primaire, celui qui fut défini dans les grandes et petites lignes par le CANDLEMASS d’Epicus Doomicus Metallicus.  

L’analogie est flagrante, et ce, dès « Nothing Grows from Hallowed Ground ». De la production à l’instrumentation, en passant par la composition et les arrangements, la sensation de retrouver l’impulsion tragique de ce classique au crâne piqué est saisissante, mais aussi rassurante. Car les danois, à l’instar des suédois, jouent le Metal avec conviction et passion, ne laissant passer que les riffs majeurs et les mélodies mineures, pour mieux saisir l’instant, et coller de près à la narration de cet aïeul soldat perdu dans ses combats.

Il aura fallu cinq ans pour que le quintet (Mik Mentor - chant, Martin Meyer Sparvath - guitare/guitare synthé, Jeppe Campradt - guitare/synthés, C. Nørgaard - basse, Danny Woe - batterie) daigne enfin sortir de l’ombre pour continuer sa saga. Mais ces cinq années paraîtront si dérisoires lorsque vous découvrirez le contenu de ce quatrième tome, à faire passer Tolkien pour un petit romancier à l’imagination bridée.

J’en tiens pour exemple le majestueux et dense « Mark of the Dead », qui passe par toutes les humeurs et toutes les ambiances, et qui décrit avec une acuité musicale parfaite l’atmosphère qui a pu régner durant ces cinq années d’affrontement. Les pleurs, les lamentations, les cris, les invectives, les ordres, les abandons, les morts, on peut presque sentir l’odeur de l’aube blafarde et celle des cadavres jonchant le champ de bataille. Et avec l’enchaînement fort à propos de « Altar of Oblivion » (qui comme vous l’aurez compris a inspiré le nom du groupe en 2005), la donne est sublime, et les intentions pures.

La promesse d’une aventure vécue est soulignée par un instrumental inattaquable, sublimé par des intonations vocales lyriques et emphatiques. Avec quelques claviers en contrepoint, partagés par les deux guitaristes, In the Cesspit of Divine Decay s’offre une grandeur et une variété incroyables, et le côté hypnotique de ces rythmiques insistantes ne fait que nous plonger dans un état de transe, quelque part entre le Danemark, l’Allemagne, la Suède et la France.

Loin des répétitions usantes de ceux confondant Doom et deux notes frappées ad nauseam, ce quatrième album est d’une beauté foudroyante, et d’une puissance assourdissante. La cohérence apportée à la narration musicale est parfaitement appropriée dans le cas d’une adaptation de journal intime, et les deux guitares lacèrent le ciel comme les tirs lacèrent les chairs. On se sentirait même perdu dans le passé en laissant notre esprit divaguer, tant les évènements sont traduits avec clarté (« The Night They Came »).

Sans chercher l’originalité à tout prix, mais sans non plus rester vouté sur ses convictions, le quintet se permet parfois des envolées saccadées et rapides, symptomatiques d’un hybride entre CANDLEMASS et la NWOBHM (« Silent Pain »). La fin de l’album, très intelligemment étudiée, offre un titre de proportions épiques pris en sandwich entre deux interludes mélodiques, comme pour mieux en marquer l’importance.

      

« In the Cesspit of Divine Decay » est évidemment le haut-fait de l’œuvre, comme un dernier combat à quitte ou double contre un ennemi qui finira par vous terrasser. L’humanité apparaît alors comme ce cloaque infâme, un bourbier sans nom, dans laquelle se noient l’espoir, la générosité, l’empathie et la fraternité. Ne restent plus que le désespoir, la pénombre, et les blessures à panser.

Ou la mort, à embrasser. Cette maîtresse femme qui a toujours été la muse fidèle des musiques les plus poétiques ou macabres. Et souvent, les deux à la fois.    

  

       

Titres de l’album :

01. Nothing Grows from Hallowed Ground           

02. The Fallacy                      

03. Ghosts in the Trenches               

04. Mark of the Dead           

05. Altar of Oblivion            

06. The Night They Came                

07. Silent Pain           

08. Damnation                      

09. In the Cesspit of Divine Decay              

10. Wind Among Waves


Site officiel

Facebook officiel

Bandcamp officiel


par mortne2001 le 26/06/2024 à 17:43
90 %    122

Commentaires (0) | Ajouter un commentaire

pas de commentaire enregistré

Ajouter un commentaire


Derniers articles

Obscene Extreme 2024

Mold_Putrefaction 29/08/2024

Live Report

Discography 1983-2006

mortne2001 18/08/2024

La cave

Ratos de Porão + All Borders Kill

RBD 22/07/2024

Live Report

HELLFEST 2024 / Clisson

Jus de cadavre 15/07/2024

Live Report

Escuela Grind + BMB

RBD 08/07/2024

Live Report

The Mandrake Project Live 2024

Simony 05/07/2024

Live Report

Hatebreed + Crowbar

RBD 18/06/2024

Live Report
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
pierre-2

https://www.youtube.com/watch?v=3SKX76h68EA&ab_channel=AgoniaRecords

07/09/2024, 20:44

pierre-2

Quelle banalité, c'est vraiment du pilotage automatique et peu/pas inspiré.

07/09/2024, 20:42

Saddam Mustaine

Bah honnêtement c'est plutôt une réussite.De toute façon pas difficile que de faire mieux que le dernier voir les derniers, j'ai lâché après le troisième 

07/09/2024, 17:07

Buck Dancer

Les deux morceaux en écoute sont plutôt bon et, surtout, le retour du growl, pinaise !!! Événement métal de l'année 2024 , devant Gojira aux JO ! ( Bon, j'espère que ce sera pas seulement sur un morceau....)

07/09/2024, 10:39

Saul D

Ratos De Porao c'est plutôt brésilien qu'italien, mais cela aurait pu...

06/09/2024, 13:45

Saul D

je retiens le final du groupe mexicain C.A.R.N.E. ( cli d'oeil à Depraved des débuts?) :-)

06/09/2024, 13:32

Ivan Grozny

Un groupe qui a beaucoup compté pour moi à une époque, une bien triste nouvelle en effet !

05/09/2024, 01:56

Ivan Grozny

@RBD : ce n'était pas ici comme beaucoup d'anciens ? ;-)

05/09/2024, 01:44

Simony

Groupe dont je continue encore de découvrir la riche discographie, mais il y a beaucoup, beaucoup d'excellents albums pour moi ! Grosse perte...

04/09/2024, 20:24

Moshimosher

Triste nouvelle ! Grand groupe qu'Abigor (même si j'ai surtout écouté la première partie de la discographie du groupe) ! J'espère au moins que sa mort lui aura apporté ce qu'il recherchait... RIP

04/09/2024, 20:00

RBD

Très bon podcast en effet, je ne me souviens plus comment je l'ai découvert. Je n'ai pas toujours les mêmes points de vue que les principaux intervenants sur tels groupes et tels albums classiques, dans la mesure où nous n'avons pas exactement les mê(...)

04/09/2024, 15:07

Gargan

Merde ! Tous les premiers disques sont excellents, notamment grâce à ses riffs tellement différents des autres groupes. J'avais perdu l'intérêt pour le groupe après "channeling" et suis retombé dedans avec les deniers efforts, tou(...)

04/09/2024, 07:55

Fétide Vön Decåyed

J'adore le nom du musicien   

04/09/2024, 06:46

RBD

J'ai quelques camarades qui y sont allés mais je n'ai pas encore eu de récit complet, merci ! En tout cas je sais qu'eux aussi ne sont pas fans des performances non musicales du festival ni des déguisements, vous vous entendriez. Je ne sais pas comm(...)

03/09/2024, 11:13

Raton

Ratos De Porao sont brésiliens et non italiens.

03/09/2024, 07:29

Ivan Grozny

Très bon podcast Le secret des dieux, découvert grâce à Vs-Greg d'ailleurs :)

03/09/2024, 01:14

Ivan Grozny

@LeMoustre Il s'agit de James Brown notamment https://www.truemetal.it/heavy-metal-news/triumph-of-death-interview-tom-g-warrior-1136131

03/09/2024, 01:13

Ivan Grozny

Super boulot ce dossier, merci . Dommage que le format du site en rende la lecture un peu pénible. Concernant Into the pandemonium (très bon album me concernant) "Je défie quiconque de me trouver une poignée d’autres albums aussi aventureux sortis approximat(...)

03/09/2024, 01:12

Ivan Grozny

Merci pour le report. On sent bien l'exaspération face au public dans certaines situations :). Le concert d'Autopsy devait être dément !

03/09/2024, 00:59

Steelvore666

Vus récemment au Barbeuk Metal Fest, c'était bien sympa.

02/09/2024, 15:55