Alors que nous sommes en plein été, de ces jolis petits matins ensoleillés et prometteurs d’une journée clémente, me voilà à l’ombre des pierres pour chroniquer le premier album de maniaques américains se vautrant dans la luxure boueuse d’un Death Doom des plus classiques et inextricables. Mais que voulez-vous, on ne choisit pas forcément les sorties en fonction de son humeur ou de la saison, et c’est ainsi que je me retrouve à vous entretenir du premier LP des cauchemardesques ANGEL MORGUE, dont le nom trahit à merveilles les intentions. Attention, maniaques d’un Death joué lourd, malsain et lent, cette assemblée de maniaques originaires de Manchester, New Hampshire risque fort de devenir votre équipe de fossoyeurs préférés, tant les émanations de leur œuvre semblent émerger d’une zone géographique oubliée à la fin des années 80. Auteurs d’une première démo éponyme fort remarquée dans l’underground il y a deux ans, les américains ont très légitimement trouvé hébergement dans les écuries d’un label national, toujours fasciné par ce qui se passe de moins recommandable dans les bas-fonds musicaux. C’est donc soutenus par Redefining Darkness Records que les ANGEL MORGUE nous proposent leur mix de Doom et de Death, accentuant les aspects les plus malsains des deux courants pour se rapprocher des ténors du genre, de ceux qui repêchaient les corps en putréfaction dans les marais de la mort. Il n’est donc pas étonnant de trouver de sales traces de moisissure IMMOLATION dans cette musique, mais aussi de vieux gants chirurgicaux ayant appartenu à Chris Reifert d’AUTOPSY, sans parler des annotations de bas de page de nos amis embaumeurs de dISEMBOWELMENT. Du beau moche monde donc pour un premier LP qui établit de nouveaux standards dans l’oppression et la douleur, et une succession de huit tranches de mort tout à fait faisandées qui font du bien à l’âme de psychopathe.
Le quintet (Colin Ward - basse, Drew Katsantonis - batterie, Ian Warren - guitare, Josiff Scurto - chant et Leonard Trombly - guitare) s’obstine donc à perpétrer les recettes de l’orée des nineties, lorsque le Death se rapprochait encore plus des senteurs les plus malsaines d’un linceul oublié dans une fosse commune. En l’état, In The Morgue of Angels pourrait presque se concevoir comme une suite logique de Severed Survival, tant les deux albums partagent ce goût prononcé pour le Death le plus basique et nauséeux de l’histoire, mais aussi une propension à privilégier une production cryptique transformant la basse en pelle à creuser des fosses. Produit par le groupe en compagnie d’Eric Sauter, qui en a profité pour enregistrer et mixer le tout au studio Blackheart Sound, laissant le mastering à Dan Randall officiant au Mammouth Sound Mastering, et orné d’une sublime cover signée par le légendaire Jef Whitehead, In The Morgue of Angels n’est rien d’autre qu’un manifeste de dégoût envers la vie appelant au suicide les plus puristes qui ne supportent plus la routine usante de cette vie prévisible. Et en entamant leur premier effort par une longue suite morbide de plus de huit minutes, les ANGEL MORGUE préparent le terrain et le débarrassent de ceux ayant atterri là par hasard, histoire de ne garder près d’eux que les fanatiques les plus psychotiques. « Lust Murder », en tant qu’entame fait preuve d’une franchise sadique des plus savoureuses, et développe les arguments du groupe en prenant largement sont temps. Intro en riff pachydermique symptomatique des doomsters les plus dérangés, complémentarité des guitares qui a deux sonnent comme une armée de Tony Iommi, voix immonde ramenant au pire des exactions d’IMMOLATION, pour une procession qui s’annonce longue et pénible au travers des travers les moins avouables de l’inhumanité. Les américains ne nous prennent donc pas par surprise, et affirment leur positions, qui ne changeront que très peu en quarante minutes.
S’ancrant dans une réalité abjecte de Doom/Death, ce premier effort mélange les ingrédients les plus corsés des deux styles qu’il fond dans une marmite de méchanceté, et nous replonge dans le trauma d’une génération secouée par la vilénie instrumentale de la Floride, qui devenait soudainement le centre du monde. Certes, vous n’entendrez rien de nouveau sur ce premier LP, les idées placées étant largement éprouvées par le temps. Mais en écoutant ce fameux « Lust Murder », on visualise parfaitement une horde de zombies s’extrayant avec peine de leur tombe pour marcher sur le monde, portant sur leurs osseuses épaules le poids d’une mort difficile à supporter à long terme. C’est pourtant une question d’éternité qui se pose en écoutant In The Morgue of Angels, l’éternité d’une approche qui n’a jamais dévié d’un iota depuis sa création/recyclage, et entre des accélérations encore fumantes, des écrasements rythmiques à grands coups de double grosse caisse, et des breaks défiant la loi de la pesanteur, ce premier pas dans la cour des grands malades à des allures de classique instantané. Deux autres titres se taillent la part du lion, « The Sigil and the Key », construit peu ou prou sur le même moule, et « In the Morgue of Angels », plus lapidaire et colérique, mais n’ayez pas d’inquiétude, malgré quelques modulations somme toute très bien senties, In The Morgue of Angels empeste la morgue désolée du New Hampshire, morgue infestée de cadavres tous plus anonymes les uns que les autres, et empilés dans l’arrière-boutique sous le regard attendri d’AUTOPSY, fier de sa descendance professionnelle.
Ce qui n’empêche guère le quintet de nous proposer quelques intermèdes d’ultraviolence très bien sentis, à l’image de ce lapidaire « Sacrificial War of Death » qui en moins de deux minutes synthétise le premier DEATH, ou « Holocaust Perversions », qui tout en gardant la même optique de lenteur maladive, semble pousser le bouchon du sadisme encore plus loin. ANGEL MORGUE signe donc un disque très classique, humant bon les émanations putrides de la bestialité Death/Doom des années 90, fait parfois preuve de plus d’audace dans les percussions (« Cosmic Torment »), mais ne s’éloigne jamais trop des marais battus histoire de conserver sa caution horrifique. Un album à recommander aux nostalgiques du Death le plus primaire et fétide, qui respireront à pleins poumons cet air subtilement vicié et immonde.
Titres de l’album:
01. Lust Murder
02. Raped in Church
03. Sacrificial War of Death
04. Various Stages of Decomposition
05. Holocaust Perversions
06. The Sigil and the Key
07. Cosmic Torment
08. In the Morgue of Angels
Alors, j'ai vu les prix et, effectivement, c'est triste de finir une carrière musicale emblématique sur un fistfucking de fan...
20/02/2025, 19:08
J'avoue tout !J'ai tenté avec un pote d'avoir des places le jour J...Quand on a effectivement vu le prix indécent du billet, v'là le froid quoi...Mais bon, lancé dans notre folie, on a tout de même tenté le coup...
20/02/2025, 18:52
Tout à fait d'accord avec toi, Tourista. En même temps, on a appris qu'Ozzy ne chanterait pas tout le concert de Black Sabbath. Du coup, faut essayer de justifier l'achat d'un ticket à un prix honteux pour un pétard mouillé.
20/02/2025, 09:27
Tout est dit.Que ce soir devant 50 personnes dans une salle de quartier ou dans un festival Hirax et en particulier Katon assuré à l'américaine. Parfait.L'album précèdent reste terrible. A voir celui ci.
19/02/2025, 17:51
Hell Yeah!!! Voilà ce que j'appelle une bombe bien métallique.P.S: Il serait bien que ce site passe en mode sécurisé: https car certains navigateurs refusent son ouverture car il est considéré comme malveillant.
19/02/2025, 16:32
Pareil, vu au Motoc l'année dernière plus par curiosité qu'autre chose : et bah c'était excellent ! La passion qui transpire, la nostalgie d'une époque aussi et puis cette énergie !
17/02/2025, 21:39
Oui, Keton de Pena est une légende encore vivante avec son Thrash reprenant pas mal les codes du Heavy. Il y met cette ambiance jubilatoire en forte communion avec les fans (il a dû vous faire le coup du drapeau). Je l'ai vu deux fois il y a une dizaine d'années, c&a(...)
17/02/2025, 13:18
Vu pour la toute première fois en live l'été dernier.Il était grand temps pour moi au vu que j'adore ce groupe...Le concert était laaaaaargement au-dessus de ce que j'en attendais : Ambiance, prestation, joie communicative, ultra-res(...)
17/02/2025, 06:50
C'est un groupe assez ancien en fait, ils ont bien vingt ans de carrière derrière eux. Martin Mendez les a recrutés pour son propre groupe parallèle à Opeth, White Stones, car il est installée à Barcelone. Ils avaient commenc&eacut(...)
15/02/2025, 18:14
Âge oblige, j'ai connu à fond cette époque et elle était formidable. Evidemment, aujourd'hui, il y a internet mais le gros avantage du tape-trading, c'était que, par défaut, un tri s'effectuait, copie après copie (de K7). Aujourd(...)
14/02/2025, 05:50
AAAAh Benediction... Toujours un plaisir de les retrouver. Et en live c'est du bonheur (efficacité et bonne humeur!)
13/02/2025, 18:38
Dans son livre "Extremity Retained", Jason Netherton met en lumière l'importance énorme que ce phénomène a eu lieu dans la naissance de la scène. Tous les acteurs isolés dans leurs coins du monde échangeaient par ce moyen, et cela le(...)
12/02/2025, 01:30