On le sait depuis des années déjà, la scène Metal française n’a plus rien à envier à celle de ses homologues européens, et encore moins à ses lointains cousins canadiens et frères ennemis/amis américains. Les exemples illustrant ce constat sont trop nombreux pour être évoqués ici, même si je pourrais parler de GOJIRA, d’ETHMEBB, NIGHT, MALEMORT ou COWARDS.
Les COWARDS justement tiens, bonne pioche. Hébergés par l’écurie Deadlight Entertainment, qui s’avère être un sacré découvreur de talents cachés, nos tortionnaires bruitistes partagent une partie de la chaumière avec de nouveaux venus, pas spécialement plus amicaux ni engageants. Leur nom ?
NUISIBLE.
Rarement groupe aura autant mérité et pas son nom. Ces normands originaires d’Evreux, au nombre de quatre dans leur formation rangée (Julien – guitare/chant, Alexandre – batterie/claviers, Damien – basse et Furet – guitare), et ont déjà publié une première démo en février 2015 (Demo 2015, merci la sobriété), ainsi qu’un single numérique en avant-première (« Reign Of Confusion », qu’on retrouve sur ce premier EP).
Alors NUISIBLE certes, puisque leur musique s’insinue dans votre cerveau et endommage votre système nerveux de façon irrémédiable, mais pas forcément parasite puisque ce Crust à dominante Darkcore fait partie des meilleurs du cru, en juxtaposant la violence la plus sourde, le Metal le plus lourd, et le Crust le plus court. Terriblement dense en termes artistiques, ce Inter Feces et Urinam Nascimur (en substance latine, « nous avons vu le jour au milieu du caca et du pipi »), est un véritable festival de l’horreur organique, qui multiplie les dissonances assourdissantes, les riffs massifs comme un premier cri une fois sorti de l’utérus, les hurlements de douleur face à un monde impitoyable, et surtout, les cassures de rythme, les mid tempi épais comme une couche de nouveau-né, pour finalement proposer un crossover général entre toutes les tendances les plus brutales du Core le plus radical.
Certes, ces normands ne sont pas aussi terrifiants que leurs camarades de chambrée de COWARDS, mais l’intensité exhalant des pistes de ce premier EP est si forte que la secousse fait encore frémir votre pauvre carcasse des heures après avoir rangé le CD entre deux bibles de Gutenberg pour être sûr d’en exorciser les effets démoniaques.
Tour à tour Downtempo, Crust, parfois Grind, mais surtout Hardcore métallisé jusqu’au bout des moignons, Inter Feces et Urinam Nascimur fait le même effet qu’une purge après une constipation cruelle, et soulage l’âme devenue sphincter après une accumulation d’idées noires dont ces vilains instrumentistes ne vous débarrassent pas vraiment. Alors, la coulée est impressionnante de pression et de débit d’autant plus que la production/lavement est d’une pression redoutable, donnant encore plus d’ampleur à des guitares/poires qui tronçonnent des riffs sans relâche.
Avec d’anciens LAZARE et AS WE BLEED aux commandes, les NUISIBLE ne font pas vraiment dans la dentelle, et pourtant ce premier EP sait faire preuve d’une finesse technique indéniable, en vous retirant le tube sans avoir besoin de lub’.
Sept pistes pour autant d’étapes sur le chemin de la vidange, et un passage en revue de tous les procédés brutaux de notre époque damnée, sans complaisance, mais avec aisance, et une fluidité incroyable dans la brutalité, sans pour autant se départir d’une certaine forme de légèreté harmonique hérité d’un Black/Crust tout à fait mélodique.
Difficile d’extraire un chapitre de ce recueil de vilénie instrumentale, dominée par un chant vraiment accablant de cruauté, qui semble exhorter à chaque intervention ses compagnons à extirper le pire d’eux-mêmes. Alors on allonge les idées, et celles-ci se montrent toujours plus néfastes et sombres, mais la franchise étant de mise chez ces truands-là, les pendules sont mises à l’heure dès l’entame grondante et soufflante de « Proletarian Hung ».
Tempête de blasts annonçant avec sournoiserie un BM pas du tout d’actualité, avant une rupture aussi brutale que limpide, et le Crust se taille alors les veines en plein tableau, pour nous éclabousser de son up tempo électrique, qu’une voix ignoble rend encore plus oppressant.
Bénéficiant d’une production gigantesque et profonde, les normands en profitent pour nous assener coups de boules sur uppercuts dans le foie, et même si le Hardcore n’est jamais loin (les chœurs menaçants de « Out Come The Wolves », ambiance affrontement post concert à NYC, le mid tempo écrasant et pesant de « Reign Of Confusion »), c’est bien le Crustcore qui survole l’algarade qui ne prend fin qu’avec la mort d’un des combattants.
Mais ne vous leurrez pas, la seule victime consentante de ce carnage, c’est vous. En associant la densité sadique des COWARDS et la lourdeur vomitive des DEAFHEAVEN, les NUISIBLE nous acculent dans une ruelle sordide avec une patience diabolique (« Night Wanderer » et son groove qui suggère le pas soutenu d’un pervers traquant ses victimes dans un centre-ville désert), avant de nous livrer à leur propre vindicte lubrique pour quelques minutes de débauche Crust qui nous laissent le slip sur les chevilles et la tête à l’envers (« Road Of The Great Torrent », manège infernal de va-et-vient animal hésitant entre un Grind/BM fatal et un Crust abyssal).
En final, «Forest Fire » ne suggère pas une quelconque allégeance à la délicatesse de Lloyd Cole, mais plutôt un désir de refermer la page avec une véhémence Crustcore intolérable, toujours méchamment teintée de nihilisme Black, en nous larguant dans les bas-fonds d’une cité de violence ou les cris se perdent dans l’indifférence.
Final en crescendo de noirceur palpable, pour un ultime downtempo ridiculisant MACHINE HEAD et AGNOSTIC FRONT dans un dernier élan méchamment séduisant, suscitant un genre de syndrome de Stockholm qui nous pousse à prendre en affection ces tortionnaires ambulants.
Force et honneur ?
Non, plutôt farce et horreur, tant ce premier EP ne fait preuve d’aucune empathie envers ses auditeurs, en accumulant avec une aisance presque amusante les plans les plus glauques et oppressants possibles. Une leçon de brutalité qui laisse muet et paralysé, scotché à son fauteuil comme un handicapé de la méfiance qui n’a pas vu le coup venir.
NUISIBLE ? Assurément. Mais aucun traitement ne sera efficace pour lutter contre l’invasion de ces saloperies bruitistes qui en un seul EP font plus de dégâts que bien d’autres rampants en une discographie patiemment construite.
Titres de l'album:
Avec Massacra legacy, ça commence nettement à avoir plus de gueule ! Reste à voir la suite des annonces. Mais je crois que je vais plus préférer le Westill le mois suivant au même endroit cette année, déjà Elder et Wytch Hazel de confi(...)
13/05/2025, 07:48
Mea culpa....J'avais pas vu la news en première page - j'ai été directement te répondre.
12/05/2025, 14:33
S'il est du même acabit que le The Cthulhian Pulse: Call From The Dead City sorti en 2020, Mountains of Madness risque d'être un allday listening pour moi.J'ai hâte, bordel !
12/05/2025, 13:44
J'étais passé totalement à côté de cette petite pépite de Death Suédois!Vieux moutard que jamais!Puteraeon glisse de belles ambiances lovecraftiennes sur cet album et les arrangements apportent un plus à l'ensemble.
12/05/2025, 13:42
Necro est sympa, avec de bons passages groovy et d'autres où le groupe envoie du bois.Pas sûr de l'écouter durablement, d'autant plus que le prochain Puteraeon sort le 30 avril prochain.
12/05/2025, 13:40
Sentiment mitigé pour ma part Le chant de Johan Lindqvist n'atteint pas un pouïème de ce qu(...)
12/05/2025, 13:38
Au vu de la dernière vidéo-ITW en date du gonze sur ce site, pour ce qui est de "feu sacré", il a toujours l'air de l'avoir le mec.Je pars donc confiant.
08/05/2025, 09:17
@ MobidOM :oui, pas faux pour la "captation d'héritage" ! :-/ En même temps, s'il a encore le feu sacré et propose un truc pas trop moisi... De toute façon la critique sera sans pitié si le truc ne tient pas la(...)
07/05/2025, 11:52
Ah ce fameux BRUTAL TOUR avec Loudblast / MASSACRA / No Return et Crusher en 95 ! LA PUTAIN de bonne époque
07/05/2025, 11:04
@ Oliv : Montpellier étant une ville et une agglomération plus petite que Lyon, il n'y a véritablement de la place que pour deux petites salles orientées Rock-Metal-Punk-etc, à ce qui me semble après vingt-cinq ans d'observation. Au-delà,(...)
06/05/2025, 20:29
"Death To All", à chaque fois que je les ai vu ils avaient un line-up tout à fait légitime (dont une fois tous les musiciens qui ont joué sur "Human", à part Chuck bien sûr)Et puis la phrase "Chris Palengat pr(...)
06/05/2025, 20:28
Je ne vois pas beaucoup l'intérêt, et je ne comprends pas pourquoi ils n'ont pas attendu les trente ans de l'album l'an prochain. Ces dernières semaines je me retape les premiers, et ça reste un bonheur.
06/05/2025, 19:29
Vénérant ces albums et n'ayant jamais vu la vraie incarnation de Massacra, hors de question de louper ça (si ça passe à portée de paluche, pas à Pétaouchnok). Un peu comme un "Death To All"...
06/05/2025, 17:11
Ils sont juste trop faux-cul pour assumer le statut de tribute band, voilà tout.
06/05/2025, 16:15