Quatorze ans après son dernier album Mind Your Head sorti en 2007, le collectif anglais HEARTLAND revient sur le devant de la scène avec un onzième chapitre pour une saga entamée à l’orée des années 90. Personne ici parmi les admirateurs de Rock mélodique n’a pu oublier cette doublette magique Heartland/Wide Open, qui avait propulsé le groupe fondé par Chris Ousey et Gary Sharpe sous les feux de la rampe. Depuis, Chris Ousey est resté le seul membre d’origine, maniant ses cordes vocales puissantes comme un jeune loup avide de reconnaissance, mais pour ce comeback inopiné, l’homme a su s’entourer de pointures histoire de rendre la surprise encore plus extraordinaire. On retrouve donc aux côtés du chanteur le fantastique guitariste Mike Slamer (STREETS, SEVENTH KEY, STEELHOUSE LANE, DEVIL'S HAND), ce qui confère à Into the Future un parfum d’exception, les deux hommes ayant largement fait leurs armes dans le domaine du Hard-Rock de grande classe. Car n’oublions pas au passage les implications de Chris dans VIRGINIA WOLF, THE DISTANCE, SNAKECHARMER ou OZONE, ce qui fait que HEARTLAND affiche aujourd’hui un CV plus qu’impressionnant.
Outre Christ et Mike, nous retrouvons au casting des valeurs sûres comme Barish Kepic, à la guitare et aux claviers (JADED HEART), Ged Rylands, aux claviers (TYKETTO, TEN, RAGE OF ANGELS), Wayne BANKS à la basse (BRAZEN ABBOT, SAXON) et David ANTHONY à la batterie (Dennis DEYOUNG). A la lecture de ce générique hors-norme, nous pouvions craindre un esprit de démonstration égotique, mais c’est évidemment le naturel qui revient au galop, et les musiciens ont profité d’une osmose palpable entre eux pour enregistrer l’un des albums les plus frais et sincères de cette fin d’année.
Toujours épaulé par Escape Music depuis plus de vingt-cinq ans, HEARTLAND se sent donc comme en famille, et propose avec cette version nippone de son dernier album un catalogue de hits AOR à faire pâlir tous les cadors seventies et eighties du genre. Evidemment, la voix de Chris, immédiatement reconnaissable avec son gros grain rauque et ces poussées dans les aigus dignes de Ian Gillan, David Coverdale ou Ronnie James Dio est au centre des débats, bien soutenue par des chœurs bien placés qui n’en font jamais trop, mais il serait injuste de négliger l’énorme travail accompli par Mike Slammer à la guitare, qui riffe tous azimuts, et qui propose certains des plus beaux soli de sa carrière. Le tout est classique, sans réel étonnement, mais la satisfaction de retrouver un leader au sommet de sa forme excuse bien des politesses de convenance.
Evitant comme la peste la mièvrerie la plus lénifiante du créneau, le groupe déroule donc sur du velours, laisse les guitares mordre sans les brider, et impose des atmosphères toujours viriles, mais non dénuées de sentimentalisme sincère. L’équilibre trouvé entre les claviers et la distorsion est assez remarquable, même si certains morceaux se laissent mener par le bout des touches comme cet imparable « A Dangerous Game », classique Pop-Rock en devenir, qui nous berce de sa basse ronde et qui nous bouscule de ses montées bluesy à la manière d’un WHITESNAKE des jours américains.
Dès « A Foreign Land », l’ambiance est prenante, le son ample, et la satisfaction pleine de retrouver l’un des groupes les plus doués de sa génération. En se reposant constamment sur ses rudes racines européennes, le groupe évite encore une fois le piège de l’américanisation à outrance, et garde cette agressivité qui lui est coutumière. Le temps n’a donc pas érodé l’énergie des musiciens, et une entame de la musculature de « Caught Up » le démontre rapidement en soulevant la fonte sans effort. Entre Heavy, Hard Rock seventies, FM californien et Rock vraiment dur à l’anglaise, Into The Future ne nous propulse pas forcément dans l’avenir, mais teste le présent à la force du passé pour en retirer le meilleur. Et le résultat ne se fait pas attendre, tous les morceaux ont la carrure de hits en puissance.
Parfaitement intégré, Mike Slamer en profite pour taquiner le spectre du DEEP PURPLE le plus noble en affrontant l’orgue Hammond sur « Mouth to Mouth », au riff pourtant méchamment Heavy, et si certains morceaux jouent encore la facilité mélodique qui reste la marque des plus grands, on sent que le but de ce retour était d’imposer à nouveau le nom de HEARLAND sur les devantures des plus grands monuments du Hard harmonique.
Quelques démonstrations savoureuses vous attendent, mais aussi quelques accélérations assez surprenantes, comme celle imposée par « Bolt From The Blue », cavalant bon train pour démontrer que ses concepteurs sont encore bien verts, ainsi que des syncopes roublardes sur fond de Funk Metal modéré avec le déhanché de « White Lies ». Tous les domaines sont abordés pour peu qu’ils restent musicaux, et les anglais n’ont pas cédé à la mode synthétique scandinave qui a tendance à niveler toutes les rythmiques pour les rendre plus souples. Ici, la frappe est matte et brute, directe et sans fioritures, et « Working For The Man » n’aurait pas dépareillé dans le catalogue en or des BLACK COUNTRY COMMUNION.
La noblesse au service du peuple, tel est le crédo d’un groupe qui n’a jamais déçu depuis son émergence. Cette longue pause aurait pu signer le coup d’arrêt d’une carrière, ou obliger les musiciens à commettre un faux-pas par orgueil, mais c’est exactement le contraire qui s’est passé, et Into the Future sonne comme le premier album d’un jeune groupe assoiffé de victoires, et prêt à en découdre sur les plus petites scènes comme dans les grands stades.
Aucune faute de goût, le plein de bonne humeur, un sourire musical permanent, ce nouvel album de HEARTLAND est un cœur qui bat à l’unisson de celui de ses fans, et qui dévoile le visage encore jeune de passionnés qui n’ont jamais fait semblant.
Titres de l’album:
01. A Foreign Land
02. Caught Up
03. A Living Thing
04. Giving It All Away
05. A Dangerous Game
06. Climbing Your Wall
07. Mouth To Mouth
08. Not Guilty
09. Bolt From The Blue
10. White Lies
11. Working For The Man
12. When The Band Plays
13. Sleeping With Lights On (Bonus Track)
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