Speed, Thrash, Speed/Thrash, Power Metal, Néo-Thrash, old school Thrash, USA, Allemagne, Colombie, Chili, Russie, Espagne, toutes les excroissances et pays représentés, pour au final former une grande famille unie sous pavillon de brutalité, à tel point qu’on commence à avoir du mal à identifier les courants et les provenances. A une époque, faire la différence entre le Thrash et le Speed était chose facile, et le Power Metal se situait en convergence des deux. Il était tout aussi aisé de savoir si un combo s’était formé à Brême, Essen, Los Angeles, San Francisco, New-York, Santiago, Belo Horizonte ou Madrid, chaque pays/mouvance ayant un son particulièrement distinct et des tendances reconnaissables entre mille. Aujourd’hui, les choses sont un peu plus complexes, même si certaines régions du globe continuent de perpétuer une tradition héritée des années 80, prônant là des valeurs traditionnelles qui permettent un repérage évident, même au milieu d’une production encore plus dense qu’à l’époque. Ainsi, les ALCOTOPIA viennent de Vilnius, Lituanie, jouent une sorte de crossover global entre Heavy solide, Thrash fluide, Speed limpide, arrosant le tout d’une sauvagerie leur permettant de jouer les gros méchants, mais à vrai dire, et après écoute de leur premier album, nous aurions tout aussi bien pu les placer ailleurs sur la carte, et digresser pendant quelques minutes sur la pluralité de leur approche créative. Peu d’informations encore une fois à divulguer sur ces esthètes de la cause extrême mais modérée, si ce n’est en précisant qu’ils ont vu le jour en 2014, et qu’ils ont sauté les étapes démo, split et EP pour directement nous proposer un longue-durée, cet It Hits the Spot dont je m’apprête à vous parler. Pas grand-chose à savoir donc avant d’appréhender cette musique classique mais efficace, sinon quelques données factuelles pas vraiment primordiales, et une fois encore, il reviendra d’apprécier la musique pour ce qu’elle est.
Cinq ans ont donc séparé la gestation du groupe et sa naissance discographique, via les dix morceaux de ce premier LP plutôt costaud, qui sème les graines de la discorde pour récolter le blé de la haine. D’une philosophie assez perméable, les lituaniens n’y vont pas par quatre chemins et piochent dans la frange extrême d’il y a trente ans de quoi enrichir leur discours, assez sourd, mais puissant dans le fond. Très formels et respectueux, les quatre musiciens (Laurynas Karka - chant, Juozapas Bočkus - guitare, Tomas Ivanovas - basse et Dmitrijus Matvejevas - batterie) semblent avoir autant accepté les dogmes de l’Europe du Nord (on trouve parfois dans leur musique des traces patentes de Thrash suédois), qu’assimilé les tendances les plus médianes de Pologne ou de Russie, et se posent donc en épicentre européen de la brutalité raisonnable, valsant sans vraiment d’hésitation entre Speed et Thrash, au point de rappeler en plus dense et compact la vague allemande des années 80, l’intensité en plus, mais l’atout de la nouveauté en moins. A l’écoute de ce premier long, on peut penser à la vague Thrash d’outre-Rhin des années 86/87 (KREATOR commençant à se calmer, DEATHROW abandonnant ses oripeaux les plus en lambeaux, HOLY MOSES sans la voix hystérique de Sabina), mais aussi au courant Power US de la fin de la même décennie et des groupes comme PANIC, OVERKILL et tous ceux ne plongeant pas les deux pieds dans le même bain de brutalité. D’une patine assez opaque et rustre, It Hits the Spot est en quelque sorte l’archétype d’album qui fonctionne sur plusieurs degrés, sans avoir à faire appel à une trop grande créativité, mais dont les morceaux les plus intenses passent aisément la rampe sans avoir à forcer. En mode féroce, le groupe domine son sujet, et se permet même l’inclusion de quelques mélodies bien tassées (« Mountain King », l’un des plus intenses du lot), tandis que les modulations les plus séduisantes s’accommodent assez mal du chant linéaire et rauque de Laurynas Karka, semblant chercher la muse du TESTAMENT de « The Ballad » tout en trouvant celle qui autrefois mena RUNNING WILD ou SODOM sur les chemins de la solitude harmonique un peu erratique (« Alcotopia », des arpèges, et une nuance globale qui semble copier un brouillon pas terminé du MEGADETH des mid 90’s). Mais comme ces instants de calme ne durent jamais longtemps, les accélérations soudaines nous sauvent du marasme, puisque c’est bien en mode écrasant que les lituaniens se montrent les plus convaincants.
Mais on ne saurait blâmer un groupe d’essayer de louvoyer, et si les erreurs d’appréciation constellent cette première production, l’enthousiasme global et la hargne fatale prennent le pas sur les ajustements encore un peu gauches. On peut par contre formuler quelques griefs, notamment au niveau de la durée des morceaux, qui n’hésitent pas à dépasser les cinq ou six minutes, et à souvent nous refiler des idées encore tièdes de la veille. Je pense qu’un peu de mesure aurait été salutaire, et en synthétisant leurs élans, les lituaniens auraient gagné en intensité, certaines pistes semblant s’éterniser au-delà du raisonnable. Ainsi, aussi soufflant soit-il, « Armageddon » n’incarne pas l’entame lapidaire à laquelle nous pouvions nous attendre, même si son feeling suintant à la WARFECT sauve l’entreprise du marasme et garde notre attention alerte. Plans mosh, riffs évidemment en saccades, breaks qui s’enfilent comme des touristes dans une file, section rythmique à l’économie qui laisse parfois traîner quelques breaks intéressants, mais toujours ce chant un peu étrange et décalé qui pourra rebuter les amateurs de vocalises endiablées et possédées. « Faceless Man » reprenant peu ou prou la même optique, on sent assez rapidement que l’influence primordiale des lituaniens reste le combo du teigneux rouquin Mustaine, même si leur Thrash est bien plus affûté et puissant que la production de Dave de ces vingt-cinq dernières années, alors convenons d’un compromis entre sa légende et celle de Chuck Billy, sauçant le tout d’une épaisse couche de liant au poivre hérité de la nouvelle tradition d’Europe du Nord, préférant la pertinence à l’expérimentation, et la pluralité à l’obsession. Non que le tout soit innovant ou même culotté, mais il se dégage de ce premier essai des ALCOTOPIA un joli parfum de naïveté et de sincérité, comme le démontrent les multiples inserts harmoniques encore un peu gauches, mais qui ont le mérite d’aérer le tout.
Encore un poil trop répétitif et tergiversant pour être notable, mais contenant son lot de bonne surprises propices au headbanging des familles (« Doctor Waclow » riffs gluants sur flow bouillant), de soudaines crises de furie qui font monter la tension d’un cran (« Mountain King »), de ludiques contretemps (« Persecutor »), et de déclarations à l’emporte-pièce pour poivrot en manque de tendresse (« More Beer », on trinque à la santé de TANKARD, de BULLDOZER et des GANG GREEN), It Hits the Spot et sa pochette digne d’un Mad Max alcoolique vu au travers des yeux d’enfants de six ans un peu déviant mérite un minimum d’attention, et de compassion. Une carte de visite encore perfectible, mais qui peut se refiler sans méfiance quand on a besoin d’être dépanné.
Titres de l'album :
1.Armageddon
2.Faceless Man
3.Doctor Waclow
4.Asylum Of The Damned
5.Insanity For Sale
6.F.Y.E.S.
7.Persecutor
8.Mountain King
9.Alcotopia
10.More Beer
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