Je vais sans aucun doute me répéter, mais les hasards du calendrier sont parfois très cocasses. En ce mois de mars, le 7 pour être plus précis, sortent deux albums de deux groupes qui non seulement se ressemblent, mais viennent du même pays : les Pays-Bas justement. Après CRYPTOSIS et son Thrash progressif, c’est au tour de la légende underground SACROSANCT de nous percuter avec son nouvel album, pour un festival de plans à rendre maboule un technicien du solfège en plein décryptage. En presque quarante ans, le groupe de Randy Meinhard (guitare) a parcouru un sacré chemin, et bravé bien des tempêtes. Enfant du Techno-Thrash boom de la fin des années 80, SACROSANCT a publié coup sur coup deux témoignages définitifs, Truth Is - What Is et Recesses for the Depraved entre 1990 et 1991, assumant crânement son statut de nouvel espoir européen de la sophistication brutale.
Un troisième album, et puis, un long hiatus pour revenir transfiguré, et lifté. De Thrash complexe et intense, le quintet est finalement passé à un Heavy progressif et agressif dans la plus droite lignée des cadors que furent et sont FATES WARNING et ANACRUSIS, tout en conservant certains réflexes conditionnés, impossible à éliminer. C’est pourquoi les deux albums post-reformation sont aussi métissés, au plus grand dam des fans de la première heure qui n’ont pas forcément reconnu leurs héros. Mais avec un disque aussi intense et dense que Kidron, SACROSANCT risque fort de ramener tout le monde dans son giron.
Ayant beaucoup apprécié Necropolis il y a sept ans, je faisais donc le pied de grue dans l’attente d’une suite logique, et le temps m’a bien fait mariner avant de m’exaucer. Mais une fois les neuf nouveaux titres assimilés, je ne regrettais guère la patience dont j’avais fait preuve. Ce cinquième du nom est une vraie révélation, même si encore une fois, les avis sont partagés. Mais mon camp a été rapidement choisi, en tombant par hasard sur le miraculeux « Prince of Clowns ». J’y ai retrouvé l’impulsion originelle, cette façon de sonner aussi brutal que sophistiqué, et cette envie de perpétuer une tradition conjointement née en Allemagne et aux Etats-Unis et qui consistait à tremper le Thrash dans une bonne dose de Rock progressif teinté de Fusion, de Jazz, de Rock et autres composantes.
Kidron, de façon prévisible, continue le travail de sape entrepris à l’occasion de la reformation de 2017. La transition effectuée dès Tragic Intense trouve encore aujourd’hui un écho certain dans l’inspiration des hollandais, qui ne font finalement que peaufiner leur approche, à la manière d’un QUEENSRYCHE des eighties. Les mélodies sont toujours aussi présentes, et d’une tonalité mélancolique. D’ailleurs, l’ambiance générale est plutôt nostalgique, même si les accès de puissance soufflent toute bougie trop tamisée. Le quintet, outre Randy à la guitare peut compter sur le talent de Gerrit Knol (guitare), Jonas Schütz (batterie), Ignazio Nicastro (basse) et Max Morton (chant) pour donner corps à cette vision étrange qu’une pochette subtile retranscrit dans de beaux tons ambrés. Cette pochette fait justement le lien avec le passé, ces deux gigantesques portes s’ouvrant sur la Nécropole décrite il y a quelques années, avec en bas de l’affiche, des silhouettes anonymes perdues dans les limbes et le froid suggéré par ces tons verdâtres et bleutés. En adéquation parfaite avec son contenu, cette illustration vous donne de précieuses indications quant à la grandiloquence du propos. Une grandiloquence assumée dès les premières mesures, et qui trouve son ampleur harmonique sur le planant « Coming of the Scorpion », dont le dard fait des ravages indéniables.
Plus proche du Heavy que du Thrash depuis fort longtemps, SACROSANCT parvient par touches fugaces à se souvenir de son passé, sans pour autant sombrer dans la complexité à outrance. Mais les accélérations font mouche, les allusions nous touchent, et on a parfois le sentiment de s’être perdu sur les chemins autrefois foulés par SANCTUARY, tant les deux groupes louchent dans la même direction. On pourra donc citer avec évidence NEVERMORE bien sûr, lorsque la puissance de « Gethsemane » balaie le paysage.
Mais incontestablement, ce qu’on vient chercher sur un disque comme Kidron, ce sont ces longues suites aux ambiances multiples, qui témoignent du caractère progressif de l’entreprise. Et SACROSANCT nous a encore gâtés puisque deux titres totalisant dix-sept minutes en tout terminent l’album de la plus belle des façons.
On commence par le tragique « Before It Ends », dont l’intro passée et jaunie évoque le passé, les années perdues, sur plus de trois minutes, avant que la rythmique ne se mette en branle, dans une tentative d’aller chatouiller DREAM THEATER au plus profond de l’âme. Superbe démonstration de style, ce pénultième titre est un joyau qui brille de mille feux, dans lequel se reflètent des chœurs complexes, des riffs riches et des rimes en friche, avec ce petit plus apporté par des blasts intermittents à la TOURNIQUET.
« The Pain Still Lasts », déjà connu des fans pour avoir servi de conclusion à Necropolis revient dans une nouvelle version, et s’inscrit parfaitement dans la nouvelle dynamique. Si l’on eut préféré un inédit plutôt qu’une relecture, sa beauté diaphane pose un point final à cette nouvelle aventure, avec ces cocottes à la U2 de Joshua Tree et ce chant plaintif, mais jamais excessif.
SACROSANCT est très loin de ses origines, mais nous plonge dans un univers où la beauté et la violence cohabitent en toute logique. Ce cinquième album est un cadeau, qui flattera les amateurs de Progressif dans le sens des poils, et qui incarne une nouvelle étape franchie avec brio, et une certaine humilité dans la richesse. Nous ne sommes pas au niveau des œuvres pré-split, mais cette seconde partie de carrière n’en est pas moins fascinante pour autant.
Titres de l’album:
01. Marching Days
02. Avenging Angel
03. Prince of Clowns
04. Coming of the Scorpion
05. Gethsemane
06. Doorway of Dreams
07. Still Open Sore
08. Before It Ends
09. The Pain Still Lasts
Il manquerait une petite chose à cette sélection si je ne signalais que Sindre Nedland, le chanteur d'In Vain, est décédé le 2 mars 2025. Il avait 40 ans.C'était un remplaçant qui avait assuré les concerts depuis l'&eac(...)
20/03/2025, 22:09
Merci pour ce report, qui rend très bien compte de ce moment hors du temps. J’avoue qu’une setlist uniquement composée de titres d’argus ne m’aurait pas déplu (comme au courts of chaos de l’an passé si je ne me trompe pas) mais c’est(...)
18/03/2025, 21:35
On a connu des ruptures plus violentes... J'ai l'impression qu'il faut comprendre qu'il va lancer sa propre formation pour reprendre de vieux titres de Kakatonia (pardon, c'était trop tentant et je ne le pense pas vraiment) voire approfondir leur style. Ce se(...)
18/03/2025, 20:21
C'est le groupe du chanteur de feu Paean. Il faut que j'essaie l'album de 2022.
15/03/2025, 15:41
Franchement Alcest mérite mieux qu'un de ces énièmes groupes de post-rock ou post-metal à la con ou tout est recraché.
15/03/2025, 11:50
Très bon groupe de Death grind,que je viens de découvrir moi qui aime la musique extrême je ne suis pas déçu !Je le conseille à tous
12/03/2025, 10:09
Va vraiment falloir arrêter ces commentaires politiques systématiques, c'est d'un redondant, même si, je conviens que pour le présent groupe ce soit peu évitable. Mais un peu de sérieux, le capitalisme honni se réjouit justement des luttes (...)
12/03/2025, 08:01
Oui il y avait des tensions je pense. Hinds voulait clairement une orientation moins "Metal" depuis quelques temps pour Masto... Et dernièrement il était très critique sur le concert d'adieu de Black Sab' auquel Masto va participer. Il avait po(...)
11/03/2025, 20:35
Du tout bon ça !!!PS : L'intro de la chro c'est pour de vrai mortne2001 ou juste pour la beauté du texte ???
11/03/2025, 19:29
Apparemment Hinds était moins impliqué dans le groupe ces derniers temps mais c'est vraiment dommage cette séparation.
11/03/2025, 07:47
Perso, à part leurs deux premiers albums qui sont vraiment géniaux, le reste est quelconque et prétentieux.
08/03/2025, 16:08
Tout comme Gargan, bien plus ADIPOCERE que HOLY à l'époque.HOLY étant bien trop atmo-avant-garde-mélo-musique-du-monde pour moi.Pout autant, GLOOMY GRIM et TRISTITIA ont été de très grandes révélations au mili(...)
08/03/2025, 10:09