Pari toujours difficile à relever, l’album instrumental n’est plus cet exercice si prisé dans les années 80 par des guitar-heroes en mal de reconnaissance. Il est aujourd’hui un moyen d’expression beaucoup plus rare, et réservé aux amateurs de Progressif, de shredding et de Black Metal. Et c’est dans ce dernier créneau que s’exprime un musicien sympathique, Sebastian Slive, originaire de Gap, qui nous propose en 2023 le fruit de ses réflexions musicales dans un genre qui rebute encore pas mal de fans potentiels.
Post Black + instrumental = prise de risques maximale. En effet, on sait le genre boudé par un grand nombre d’amateurs de violence, pour sa tendance à la contemplation et la dilution d’idées qui auraient mérité d’être traités de façon plus synthétique. MORGON se propose donc de remédier à ce travers via La Légende De Philis, premier album autoproduit, riche, dense, imaginatif et personnel.
En sept pistes, Sebastien, musicien omnipotent et créateur de talent se propose de vous faire vivre un voyage étrange, aux confins de la réalité et du fantasme. Prenant la tâche à bras le corps, le sudiste embrasse tous les codes du Post Black moderne, entre mélodies amères et coups de semonce assourdissants. On retrouve sur ce premier né tout ce qu’on apprécie dans le Post Black intelligent et malléable, les harmonies nostalgiques, les énormes riffs lancinants, les structures évolutives, et un parfum d’aventure qui enivre les sens de sa liberté de ton.
Entre Post Black et Black Progressif, MORGON choisit de ne pas choisir, et utilise tous les ingrédients dont il a besoin pour parvenir à ses fins. Lesquels ? Raconter une histoire sans utiliser d’autres mots que les notes et les percussions, et ainsi susciter des émotions concrètes chez l’auditeur de façon abstraite. Le principe est connu depuis la nuit des temps, mais appliqué ici avec classe et fougue. La musique de Sebastien est puissante, parfois ultraviolente, mais toujours soignée, organique, viscérale, loin des dérives egocentriques qui se regardent un peu trop le nombril lorsque le compositeur d’une œuvre en est aussi l’interprète.
Et les idées exposées sur ce premier album de MORGON sont terriblement pertinentes et attachantes. En témoigne le très malin « Rivières De Sang », qui passe sans transition d’une attaque BM en règle à un Groove Metal très syncopé et incroyablement addictif. Ce qui prouve que la tête pensante du projet avait bien l’intention de nous charmer avec ses compositions, ce qu’il parvient à faire grâce à un habile jeu d’idées s’imbriquant en toute logique.
Dès lors, tout est permis, ou presque. Les allusions Folk, les mélodies nineties assombries d’un état d’esprit 2023, les enchaînements logiques et les digressions harmoniques, pour un résultat qui impressionne durablement. Transcendant l’exercice par le truchement d’une clarté de propos, La Légende De Philis refuse de se perdre dans son propre dédale, et garde bien en main ce fil d’Ariane qui lui permet de raconter une légende cohérente.
Entre ALCEST et un BATHORY de l’époque viking, sans oublier quelques allusions à MAYHEM et à l’écurie des Acteurs de L’ombre, MORGON affiche sa morgue, et toise du regard les gloseurs du vide, qui répètent les mêmes paroles du début à la fin d’un album. Hypnotique sans avoir recours aux répétitions pénibles, La Légende De Philis traverse les époques et marque les esprits, nous cueillant à froid sur la majestueux et explosif « L'Armée Des Quarante Mille ».
Nous passons donc d’une humeur mélancolique à une ambiance oppressante, de la colère à la paix intérieure, et le manque de chanteur ne se fait aucunement ressentir. Logique, puisque le narrateur est cette guitare qui égrène tous ses secrets dans le chaos des alcôves damnées, et qui traduit en arpèges, en riffs imposants et en déliés sauvages les propos que pourrait tenir un guide nous entrainant sur les traces d’une histoire que l’on connaît, mais que l’on souhaite observer sous un autre angle.
La recette est donc exposée sans fard sur l’ample « Sous Les Neiges Du Grand Morgon », avec cette double grosse caisse omniprésente et ces harmonies tissées par des cordes disertes, ou sur l’oppressant « Rama Envahie Par Les Eaux », entre redondance et lancinance. Parfaitement agencé, cet album s’offre même une conclusion tout à fait superbe, annoncée par le court intermède « A L'aube », et négociée par l’épilogue « 1692 ». Dix minutes de Metal extrême, qui s’éloigne des obligations contractuelles du Post Black, pour refermer le livre en étant certain que ses lecteurs auront envie de l’ouvrir une nouvelle fois dans le futur.
Sacré boulot abattu par Sebastian Slive que je félicite pour son talent et son sens de l’à-propos, et qui est capable de se montrer aussi efficace que figuratif. Nul besoin de chant lorsqu’on est capable de parler avec ses instruments, et le discours n’en est que plus prenant.
Titres de l’album:
01. L'Armée Des Quarante Mille
02. Sous Les Neiges Du Grand Morgon
03. Rama Envahie Par Les Eaux
04. Rivières De Sang
05. La Légende De Philis
06. A L'aube
07. 1692
Alors, j'ai vu les prix et, effectivement, c'est triste de finir une carrière musicale emblématique sur un fistfucking de fan...
20/02/2025, 19:08
J'avoue tout !J'ai tenté avec un pote d'avoir des places le jour J...Quand on a effectivement vu le prix indécent du billet, v'là le froid quoi...Mais bon, lancé dans notre folie, on a tout de même tenté le coup...
20/02/2025, 18:52
Tout à fait d'accord avec toi, Tourista. En même temps, on a appris qu'Ozzy ne chanterait pas tout le concert de Black Sabbath. Du coup, faut essayer de justifier l'achat d'un ticket à un prix honteux pour un pétard mouillé.
20/02/2025, 09:27
Tout est dit.Que ce soir devant 50 personnes dans une salle de quartier ou dans un festival Hirax et en particulier Katon assuré à l'américaine. Parfait.L'album précèdent reste terrible. A voir celui ci.
19/02/2025, 17:51
Hell Yeah!!! Voilà ce que j'appelle une bombe bien métallique.P.S: Il serait bien que ce site passe en mode sécurisé: https car certains navigateurs refusent son ouverture car il est considéré comme malveillant.
19/02/2025, 16:32
Pareil, vu au Motoc l'année dernière plus par curiosité qu'autre chose : et bah c'était excellent ! La passion qui transpire, la nostalgie d'une époque aussi et puis cette énergie !
17/02/2025, 21:39
Oui, Keton de Pena est une légende encore vivante avec son Thrash reprenant pas mal les codes du Heavy. Il y met cette ambiance jubilatoire en forte communion avec les fans (il a dû vous faire le coup du drapeau). Je l'ai vu deux fois il y a une dizaine d'années, c&a(...)
17/02/2025, 13:18
Vu pour la toute première fois en live l'été dernier.Il était grand temps pour moi au vu que j'adore ce groupe...Le concert était laaaaaargement au-dessus de ce que j'en attendais : Ambiance, prestation, joie communicative, ultra-res(...)
17/02/2025, 06:50
C'est un groupe assez ancien en fait, ils ont bien vingt ans de carrière derrière eux. Martin Mendez les a recrutés pour son propre groupe parallèle à Opeth, White Stones, car il est installée à Barcelone. Ils avaient commenc&eacut(...)
15/02/2025, 18:14
Âge oblige, j'ai connu à fond cette époque et elle était formidable. Evidemment, aujourd'hui, il y a internet mais le gros avantage du tape-trading, c'était que, par défaut, un tri s'effectuait, copie après copie (de K7). Aujourd(...)
14/02/2025, 05:50
AAAAh Benediction... Toujours un plaisir de les retrouver. Et en live c'est du bonheur (efficacité et bonne humeur!)
13/02/2025, 18:38
Dans son livre "Extremity Retained", Jason Netherton met en lumière l'importance énorme que ce phénomène a eu lieu dans la naissance de la scène. Tous les acteurs isolés dans leurs coins du monde échangeaient par ce moyen, et cela le(...)
12/02/2025, 01:30