La Società degli Eterni

Tony Tears

13/12/2024

I, Voidhanger Records

Fêtons le retour d’un groupe qui a pris son temps pour se lancer, mais qui depuis son premier album n’a pas relâché ses efforts. TONY TEARS est certainement l’un des groupes italiens les plus emblématiques de la scène Dark/Doom/Epic, et chacune de ses œuvres est disséquée comme il se doit par un public de passionnés, le même public qui a porté LE ORME aux nues et a érigé en l’honneur de DEATH SS quelques statues. Chantre d’un Rock dur particulièrement créatif, TONY TEARS est toujours le véhicule artistique d’Antonio Polidori, fidèle à son unique poste depuis la fin des années 80 alors que son projet s’appelait encore ANTHONY TEARS.

Pour sa première rentrée chez I, Voidhanger, TONY TEARS ne devait pas louper la marche. Le label italien est exigeant, et son écurie repose sur des pur-sang qui placent l’originalité au-dessus de toute autre vertu cardinale. Mais Antonio n’avait pas grand souci à se faire, sa créature ayant toujours revêtu des habits d’apparat pour mieux parader parmi les animaux les plus originaux de la scène Metal. C’est donc une année à peine après Pains que le groupe revient, avec un line-up solide et un concept album « à mi-chemin entre un pacte magique et la recherche de la perfection karmique de l’âme ». Programme pour le moins ambitieux, qui se matérialise sous la forme de dix morceaux, une longue suite progressive sombre comme on les aime, et qui combine l’impact du Heavy Metal, la pénombre de l’Occult Rock, la pression du proto-Doom et l’envergure du Progressif à l’italienne, l’un des plus fertiles qui soient.

La Société des Éternels est un grimoire ouvert par une créature cornue au regard fixe, et ses pages sont remplies d’incantations, de litanies, d’homélies, de légendes obscures, et de formules aux effets inconnus. Autour de Tony se greffent ses disciples musiciens, Fulvio « Flux » Parisi (claviers), Gianni « Coroner » Queirolo (batterie), Artorias (basse/guitare acoustique), David Krieg (voix masculine et textes), Sandra Silver (voix féminine) et Daniele Donini (« directeur magique »). Une communauté aux desseins ténébreux, à l’osmose patente et aux désirs similaires : créer un univers étrange à la manière d‘un film auditif pour flatter dans le sens des poils les amateurs de la Hammer, les fanas de gialli, les amoureux de Paul CHAIN et ANTONIUS REX, et plus généralement, ceux qu’un Heavy Metal délicatement passéiste charme sans effort.

Pourtant, le groupe en fait beaucoup pour s‘assurer des faveurs de ses aficionado. D’abord, et comme à son habitude, en travaillant le son pour qu’il conserve cette patine analogique seventies dont le groupe a besoin. Ensuite, en empruntant aux Folk ses harmonies doubles et ses guitares claires. Puis, en travaillant ses compositions afin qu’elles ressemblent à des hymnes de barde qu’on se transmet de génération en génération. S’il n’y avait cette batterie puissante et précise, l’immersion serait totale, et le voyage dans le temps encore plus crédible.

Mais loin des gimmicks, La Società degli Eterni s’épanouit dans son propre concept, et se nourrit de ses propres aventures. Evoquant parfois un SISTERS OF MERCY médiéval ou un FIELDS OF THE NEPHILIM bucolique, ce nouvel album est un gigantesque hommage rendu à la scène italienne, que la jeune génération découvre avec pas mal d’années de retard. Alors que le Progressif anglais et son voisin français sont reconnus depuis longtemps, l’Italie a dû patienter pour que ses groupes bénéficient de la même admiration, alors même que l’inspiration de la scène trouvait ses origines dans le Classique national et l’Opéra.

Toutefois, TONY TEARS est aussi Metal qu’il n’est Progressif. C’est justement cet entre-deux parfait qui lui permet de se montrer persuasif, même si certains trouveront que les idées se suivent et se ressemblent un peu. Mais c’est la maigre dime à payer pour profiter d’une œuvre cohérente, hors du temps, qui parvient à réconcilier les genres et à transcender les clivages. Ainsi, « Serpents of the Great Change » sinue comme un serpent et bénéficie des services d’un solo typiquement 70’s, de même que des arrangements de la même époque.

TONY TEARS n’hésite jamais à utiliser des sons de flûte, de vieux piano, tout en tissant des strates de riffs qui tirent parfois sur un Power Metal régressif, avec un « Rage of Unsaid Words » énergique et électrique. Beaucoup d’efforts sont consentis pour que chaque chapitre ait sa propre couleur, bien qu’elles soient toutes sombres, entre rouge sang et noir de cendres.

Le chant sentencieux de David Krieg, grave, théâtral et dramatique permet de prendre ses distances avec la référence CANDLEMASS, bien qu’Epicus Doomicus Metallicus partage quelques points communs avec cet album. Même emphase, même dérivations oniriques, même paysage maudit, pour un voyage immersif dans les contes à l’italienne.

Si le spectre sonore est couvert dans les grandes largeurs, certains morceaux profitent de quelques espaces négatifs pour respirer et grandir en nous, comme le processionnel « La Strana Casa », étrange et inquiétant, insistant et hypnotique, et évidemment, déviant et évolutif. Un long plan séquence sur un riff unique, avant que la machine ne se mette en branle pour dérouler une fin plus épique, mais toute aussi puissante. On peut même y sentir la plume des nineties lorsque les syncopes s’invitent au banquet, ce qui a le don de varier encore plus les plaisirs.

En bon conteur qui se respecte, TONY TEARS termine sa narration par deux segments longs et envoutants. Le morceau éponyme d’abord, tout en watts et en plaintes de guitare, puis « Old Souls », dont l’âme est aussi vieille que celle de Mathusalem. Les connaisseurs apprécieront d’ailleurs cette reprise d’un thème de Phantom of the Paradise, transfiguré et presque christique.

Impressionnant de constater qu’une année suffit à ce groupe pour se réinventer. TONY TEARS est certes productif, mais aussi inventif. L’Italie peut être fière de ses enfants, qui pérennisent l’héritage des années 70 les plus occultes, et des eighties ne l’étant pas moins. Rideau, pourpre évidemment, et profitez du spectacle. Mais surtout, ne vous levez pas avant le générique de fin, sous peine de manquer deux ou trois formules magiques.       

                                                                                              

Titres de l’album:

01. Spirits of the Oath

02. Lost Souls in the Pit of Corruption

03. Angemon

04. The World Is the Game of the Dead

05. Serpents of the Great Change

06. Rage of Unsaid Words

07. Liturgy of the Smell

08. La Strana Casa

09. La Società degli Eterni

10. Old Souls


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par mortne2001 le 18/03/2025 à 17:24
85 %    406
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