Avant toute chose, les paramètres de prise en compte pour une chronique sont variables. Généralement, la réputation du groupe, ses qualités, son rayonnement, le buzz’ en font partie, mais chacun est à même d’avoir son propre système d’évaluation pour jauger de la pertinence d’une œuvre. Le mien est particulier. Outre mon penchant pour les loups solitaires et autres parias du monde musical, un groupe signé sur le même label que les magnifiques et impitoyables WORLD NARCOSIS mérite toute mon attention. Encore plus s’il est islandais d’origine. C’est très subjectif, hautement discutable, mais en même temps, je fais ce que je veux. Dont acte. Dont cette chronique du Let It Be des locaux de GRIT TEETH, distribués par le label local Why Not ? Pourquoi pas ? Mais tout à fait et l’occasion faisant le larron, le label du grand froid ne s’est encore pas trompé en nous refourguant ce truc-là qui suinte la méchanceté par tous les pores et fait autant de bruit qu’un troupeau de porcs. Mais attention, pas de cris porcins à l’horizon, quoique les gus en question ne soient pas totalement opposés à des affiliations avec l’univers du BM national, qu’ils évoquent en plus d’une occasion. Mais il est pourtant très ardu de définir leur musique, qu’ils aiment à décrire comme étant une sorte d’old world crust punk and piercing black’n’death metal flourishes, ce qui ma foi se rapproche dangereusement de la réalité. Alors, du Noise, du Crust, du Hardcore, du Rock N’Roll ou du Grind à la mode islandaise ? Un peu tout ça mes aïeux, et Dieu que ça fait du bien quand ça fait mal.
Et autant le dire, ça fait TRES mal.
Ces flingués sont donc quatre (Dagur – basse/chant, Jón & Hörður – guitare/chœurs, et Birkir – batterie), viennent donc du même pays que les SUGARCUBES et Björk, mais n’ont absolument rien en commun avec une quelconque scène Post-Punk ou Post-Pop. Non, ils partageraient plutôt des vues avec celle BM de leur propre pays, très rugueuse et agressive, dont ils empruntent les accents en les intégrant à un contexte purement Core sur les bords, mais aussi au milieu. A l’écoute de ce Let It Be, il n’est pas difficile de penser aux NAILS, à MAGRUDERGRIND, et même à leurs collègues de label de WORLD NARCOSIS, pour cette façon malicieuse de mélanger les courants pour en obtenir un encore plus bouillant. Niveau historique, les mecs sont déjà responsables de la sortie d’un premier EP éponyme en 2015, pas plus complaisant que celui-ci, qui fait toutefois preuve d’une avancée notable en termes de production et d’élaboration. Au menu, des compositions courtes, la plupart du temps restant sous la barre des deux minutes, mais utilisant toutes les armes disponibles pour nous déstabiliser. Accélérations en coup de feu, ralentissements aggravés, hurlements rauques et embardées déchaînées, toute la panoplie y passe pour transformer ces musiciens en héros malsains d’un quotidien glacé, hurlant sans discontinuer le haro sur un baudet, qui pourrait d’ailleurs être nous, ou bien une certaine forme de complaisance dans l’extrême qui se contente de tirer sur des ficelles déjà usées. Mais les GRIT TEETH sont loin d’être des pantins, et encore moins les proverbiaux dindons de la farce, et sous cette épaisse couche de glace se cache l’un des EP les plus brutaux et créatifs de cette fin d’année. Pourquoi ? Mais, pourquoi pas ?
Parce que la violence y est omniprésente, mais intelligente. Et surtout, variée. Au gré des titres, on se prend à penser à LOCK UP, NAPALM DEATH, PRIMITIVE MAN, URSUT, et la clique des Black metalleux du nord de l’Europe, eux qui ont compris depuis longtemps que les accointances entre leur style et le Death Metal étaient inévitables. D’où une intensité remarquable, propre à ridiculiser tous les outranciers du Crust suédois, ceux-là même qui confondent vitesse et précipitation, et qui nous refilent sans broncher les mêmes LP enregistrés à la chaîne à gravier. Les GRIT TEETH sont aussi Doomcore qu’ils ne sont Crustcore, sont aussi Grind qu’ils sont Death, et frappent dans tous les coins, sans forcément faire les malins. Doté d’une production béton et d’un mixage signé des petites mains de Leigh Lawson, ce Let It Be est loin d’un ainsi-soit-il de fin de messe, et a plutôt tendance à vous botter les fesses, en savourant une gravité exceptionnelle qui pourtant n’alourdit pas le propos existentiel. Il est donc très ardu de situer ces grands malades sur un quelconque échiquier, puisqu’ils sont capables dans un même souffle de couper le nôtre d’un Grind apoplectique (« Snowed In »), de nous assommer d’un Crust dans la plus grande tradition héritée du Thrashcore US (« Sword And Shield », quarante-sept secondes de folie sonore si intense qu’on en veut encore), de titiller la corde sensible des petits-enfants d’ENTOMBED le temps d’une intro macabre, avant de replonger dans le Crust le plus capable (« The Fall »), ou à contrario de plomber l’ambiance d’un Sludge poisseux et subtilement nauséeux histoire de briser le schéma qu’on attendait d’eux (« Burnt Soil »). En gros, un éventail de possibilités toutes plus létales les unes que les autres, transcendé par une interprétation habitée. Car ce quatuor de dégénérés n’a pas non plus oublié comment jouer.
Mais à vrai dire, des salauds capables de nous briser les tympans d’une intro sordide et truffée de feedback à faire vomir les chiens, avant de nous massacrer d’une pluie de blasts de vauriens (« Intro ») ne sont pas à prendre à la légère. On le sait, les islandais ne sont pas là pour bricoler, et en toute connaissance de cause, les
GRIT TEETH ont épousé la leur, qui consiste à abuser de tous les artifices dérangeants pour fêter la naissance d’un style encore plus véhément.
Crust N’Grind N’Black N’Core ? Ça ne veut strictement rien dire, et pourtant, ça leur colle à la peau comme des asticots sur un corps mort. Et croyez-moi, le vôtre risque de faire quelque soubresauts à l’écoute de ce Let It Be qui vous laissera en morceaux, réduit en portion congrue d’une violence soutenue. L’école nordique a donc encore imposé sa loi sur l’extrême et l’underground, et on risque d’entendre parler de ce quatuor assez loin de ses frontières vu le boucan mortifère sortant de leurs amplis même pas à la terre. Non, ces amplis-là sont reliés à la glace. Pour un raffut qui ne laissera personne de marbre. Sauf celui de vos tombes.
Titres de l'album:
Alors, autant j'apprécie beaucoup Wolfheart, et cette news ne va rien y changer, autant, pour moi, l'Arabie Saoudite est l'un des pires pays au monde... Alors, je ne suis pas arabophobe, mais ce pays pue terriblement ! Je plains les Saoudiens (et surtout les Saoudiennes) qui(...)
21/11/2024, 18:01
"...jouer un concert en Arabie Saoudite. Un honneur absolu et un privilège. Les loups du nord apporteront la tempête hivernale à Riyad !"Un véritable honneur absolue de jouer en Arabie Saoudite, la ou les apostas sont condamnés &agra(...)
21/11/2024, 08:46
Quand on se souvient du petit son des années 80... Mais la prod ne fait pas tout, ça reste du pilotage automatique. C'est pas avec un truc pareil que je vais me réconcilier avec eux, et ça fait 20 piges que ça dure.
19/11/2024, 21:57
J'avais pas vu cette chronique. J'étais au soir avec Ulcerate et je n'ai pas du tout regretté...Le lieu : il y a forcément un charme particulier à voir ce genre de concert dans une église, surtout que le bâtimen(...)
15/11/2024, 09:51
Le who's who des tueurs en série. Un plus gros budget pour l'artwork que pour le clip, assurément. (...)
14/11/2024, 09:20