Jouer du bon Thrash nécessite un investissement total. Un bagage technique conséquent. Une passion sans faille. Une inspiration tout sauf à l’avenant. Une connaissance des grands classiques permettant de s’en inspirer sans plagier. Un son béton. Des riffs maousses et une rythmique en sprint de fond. Un sens de la mélodie affirmé pour contrebalancer des jets de bile en mi augmenté. Un son épais et puissant, et quelques caractéristiques individuelles notables. Genre, l’aptitude rythmique de frontman de James Hetfield. Le sens de la démesure de SLAYER. Le fun millimétré d’EXODUS. La démence précoce de MUNICIPAL WASTE. Ou à la rigueur, les aspirations progressives et évolutives de CORONER. Le sens de l’énigme de MEKONG DELTA. La préciosité de WATCHTOWER. L’absence de limite des VIO-LENCE. Bref, une liste d’impératifs qui ne peuvent rester lettre morte sous peine d’accoucher d’une œuvre dispensable et anecdotique, d’autant plus que le livre d’histoire du genre est déjà bien encombré de chefs d’œuvre assumés. Alors, que faire dès lors lorsqu’on ne possède pas les atouts indispensables à l’élaboration d’un LP mémorable ? Se taire ? Oui, c’est la meilleure des solutions, pour ne pas passer pour des fions. Ou alors, posséder toutes les qualités susmentionnées, et accoucher d’un LP monstrueux, associant immédiateté épidermique, science technique, flair mosh et riffs qui torchent, ce qui est immanquablement le cas de nos amis du jour, qui avec leur premier longue-durée viennent de foutre un grand coup de baskets dans la fourmilière. Ils auraient pu être américains, anglais ou brésiliens, mais le hasard a fait qu’ils se revendiquent canadiens, et je dois avouer que Lethal Revenge est un opus qui porte diablement bien son nom tant il évoque les meilleurs travaux du genre tout en y insufflant sa patte.
Niveau bio, les W.M.D nous informent que leur patronyme en initiales signifie WHEN MINDS DEVELOP, ce qui leur permet de prétendre accéder à un degré supérieur de conscience Thrash. Processus qui se révèle incroyablement performant à l’écoute de ces neuf morceaux qui ne font pas de quartier, mais qui découpent de fines ou épaisses tranches de violence pour nous en rassasier. Nous en venant de Calgary, ce quatuor à la vingtaine à peine entamée (Skyler Mills - chant/guitare, Brody Blaze - guitare, Nolan Benedetti - batterie et Jake Axl Wendt - basse) a tout de même pris son temps depuis sa création en 2015 pour élaborer l’un des premiers jets les plus convaincants de la vague old-school, en distillant un crossover recoupant toutes les composantes du créneau, à cheval entre Thrash de malades et Hardcore pas en rade. Mais si l’appartenance à la scène Metal est indiscutable sur ce premier long, l’énergie développée est directement héritée de la scène NYHC, avec ce chant qui semble émaner d’une salle mythique new-yorkaise, et cette basse qui sonne plus ronde et énervée que Harley Flanagan complètement torché. Lethal Revenge en substance, se veut résumé exhaustif d’une époque bénie, balisée par des influences revendiquées (MORTILLERY, WEST OF HELL ,GATEKRASHÖR, VIOLATOR, LUCID SCREAM, BLACKEST SIN, RIOT CITY, HAVOK, ENFORCER, OUTLAWS OF RAVENHURST, DEATH, DUST BOLT, IRON REAGAN, LOST SOCIETY, EXMORTUS, MUNICIPAL WASTE), qui peinent pourtant à épouser les contours d’une musique si personnelle qu’on ne peut se résoudre à la synthétiser de la somme de ses parties accolées. Mais en privilégiant des morceaux parfois très longs, qui pourtant jouent la diversité, les quatre canadiens ont bien joué leur coup, tellement bien que leur entrée en matière pourrait sans peine figurer dans une anthologie du passé, alors que terriblement ancrée dans le présent.
Avant d’aller plus en avant dans l’analyse des compositions, intéressons-nous aux individualités. Au poste de frontman, Skyler Mills fait des merveilles et domine de ses cordes vocales juvéniles et hystériques un instrumental dopé à la bonafide, instrumental élaboré collégialement par une bande qui n’a pas la saccade dans sa poche, ni les harmonies dans les croches. Soliste plus que compétent, qui ne bavarde pas mais balance ses aphorismes lapidaires au bon moment, et batteur complètement frappé, capable de soutenir un tempo martelé avant de partir en vrille lors de fills de damné, sorte de trait d’union entre Brian Lehfeldt (WEHRMACHT) et Dave Lombardo, et collectif au-dessus de tout soupçon, exempt de reproche tant son implication dépasse la raison. Un groupe à la cohésion diabolique pour un sens de la composition épique, s’articulant autour d’interventions parfois lapidaires (« Capture & Kill », au refrain anthémique qui donne envie de prendre une machette et de passer ensuite la balayette), et parfois étrangement progressives et en colère (« Lethal Revenge », plus de huit minutes rappelant les magiques DEATH ANGEL, tout autant que les premiers groupes de la vague Speed/Thrash allemande, ASSASSIN en tête de ligne), pour un voyage au long-cours qui en profite pour donner quelques cours d’euphorie et d’enthousiasme. Cette rondelle dégage en effet plus de puissance que le réacteur central des NUCLEAR ASSAULT, et impossible de rester de marbre face à cette débauche d’énergie, qui n’oublie pas les accalmies en route histoire de ne pas nous coller des croutes.
Neuf titres, et autant de coups dans le mille, avec un déferlement de riffs anthologiques, dont celui complètement à la masse de « Thrash Attack », ridiculisant trente ans de DESTRUCTION de sa vitesse de pousse de champignon hallucinogène et de sa densité anxiogène. A cheval entre un dragster lancé plein pot et un camion bourré de T.N.T roulant sur un chemin de boue bien crado, Lethal Revenge n’est rien de moins qu’un album parfait, qui a tout compris au style qu’il prône, accumulant les breaks ingénieux, les riffs teigneux, les motifs hargneux et les cris belliqueux. Et que le tout se veuille ambitieux et harmonique à rendre Jeff Waters heureux (« The Brazen Bull », le genre de truc immédiat que l’autre canadien composait du temps de sa grandeur), ou concassant comme une presse démoniaque et hantée réduisant les intrus en pile de vieux journaux compressés (« Toxic Burn », ou comment réconcilier les fans de VIO-LENCE et les défenseurs de MUNICIPAL WASTE), tous les essais sont transformés, et les quarante-cinq minutes trop vite passées. Véritable déclaration d’amour envers un extrême raisonnable qui en a pourtant assez qu’on l’exhume de sa tombe, ce premier LP des W.M.D est un témoignage de la vitalité de la scène canadienne, et surtout, la trace de l’émergence d’une engeance surdouée, capable de jouer aussi vite que son ombre, mais de prendre son temps pour composer. Une rondelle à classer aux côtés du dernier WARFECT et du séminal Eternal Nightmare, mais qu’on ne risque pas de laisser sur les étagères trop longtemps. Mais au vu de la puissance que ce truc génère, il m’étonnerait sincèrement qu’il puisse prendre la poussière.
Titres de l'album :
1.Ignition
2.Capture & Kill
3.Lethal Revenge
4.The Age of Extinction
5.Toxic Burn
6.Fragmentation
7.The Brazen Bull
8.Thrash Attack
9.Virus
Haaaa le Rock est tout sauf négociable !! Merci pour cette belle critique.Chazz (2Sisters)
17/01/2025, 22:44
Non putain ça fait chier ! Je m'en fout de revoir Rob derrière le micro de mon groupe préféré d'amour !
17/01/2025, 17:03
J'ai cru comprendre que Zetro se retirait pour problème de santé.J'espère que ça ira pour lui.En tout cas avec Dukes sur scène, ça va envoyer le pâte.
16/01/2025, 18:21
Super nouvelle pour moi, le chant de Zetro m'est difficilement supportable. Celui de Dukes n'a rien d'extraordinaire mais il colle assez bien à la musique et le gars assure sur scène.
16/01/2025, 12:15
Eh beh... Étonné par ce changement de line-up. Vu comment Exo était en forme sur scène ces dernières années avec Souza ! Mais bon, Dukes (re)tiendra la barque sans soucis aussi.
16/01/2025, 10:22
Super. L'album devrait être à la hauteur. Beaucoup de superbes sorties sont à venir ce 1er semestre 2025. P.S. : le site metalnews devrait passer en mode https (internet & connexion sécurisé(e)s) car certains navigateurs le reconnaisent comme(...)
15/01/2025, 12:58
Je viens de tomber dessus, grosse baffe dans la gueule, et c'est français en plus!Un disque à réécouter plusieurs fois car très riche, j'ai hâte de pouvoir les voir en concert en espérant une tournée pour cet album assez incr(...)
14/01/2025, 09:27
Capsf1team + 1.Je dirai même plus : Mettre cela directement sur la bandeau vertical de droite qui propose toutes les chroniques. En gros faire comme pour les news quoi : Nom du groupe, titre de l'album et entre parenthèse style + nationalité.
13/01/2025, 08:36
Oui en effet dans les news on voit bien les étiquettes, mais sur la page chronique on a juste la première ligne de la chro, peut-être que ce serait intéressant de le mettre dans l'en-tête.
13/01/2025, 07:59
Capsf1team : tu voudrais que l'on indique cela où exactement ? Dans l'entête des chroniques ? En début de chronique ?Aujourd'hui le style apparait dans les étiquettes que l'on met aux articles, mais peut-être que ça ne se voit pas d&(...)
12/01/2025, 17:38
Poh poh poh poh... ... ...Tout le monde ici à l'habitude de te remercier pour la somme de taf fournie mortne2001, mais là... Là, on peut dire que tu t'es surpassé.Improbable cette énumération.Et le pire, c'est qu'a(...)
12/01/2025, 14:27
Jus de cadavre, putain mais merci pour la découverte Pneuma Hagion. C'est excellent! Du death qui t'envoie direct brûler en enfer.
11/01/2025, 12:16
Merci pour tout le travail accompli et ce top fort plaisant à lire tous les ans. Moi aussi je vieilli et impossible de suivre le raz de marée des nouvelles sorties quotidiennes... Suggestion peut-être à propos des chroniques, est-ce que l'on ne pourrait pas indique(...)
10/01/2025, 09:12
J'aurais pu citer les Brodequin et Benighted que j'avais bien remarqués en début d'année, aussi, mais il faut choisir... Quant au Falling in Reverse, cette pochette ressemble trop à une vieille photo de J-J Goldman dans les années 80, je ne peux p(...)
09/01/2025, 19:49