Lifewreck

Lifewreck

02/02/2018

Scarecrow Records

Demain, c’est la chandeleur. Ok, c’est anecdotique, mais c’est quand même l’occasion de faire péter la pâte à crêpes et de les faire sauter. Tiens, et comme je suis un bon gars somme toute, je vous propose la bande son idéale pour transformer votre cuisine en champ de bataille, maculée de substance gluante et inondée de rires tonitruants suite à la fiesta dégénérant en guerre de tranchées. Un conseil, prévoyez une bonne bouteille de rhum, quelques bières, conviez des amis, et lancez sans prévenir l’assemblée le dernier album des LIFEWRECK, puis constatez les dégâts. Gageons qu’à coup sûr, les premières rondelles seront plus ou moins réussies, avant qu’emportés par l’enthousiasme, vos amis ne se jettent à corps perdu dans un pogo de la rue, détruisant de fait tout espoir de déguster les fines gâteries avant la tombée de la nuit. Il faut dire qu’avec un Hardcore pareil dans les oreilles, difficile de se concentrer sur l’essentiel sans être emporté dans un torrent d’euphorie. Car le vrai Hardcore, celui qui pulse mais riffe à la dure, qui dénonce les injustices en accomplissant des prouesses rythmiques se fait rare, à une époque où la tendance est au métissage et au bordel intégral. Certes, ces animaux-là n’ont pas leur Powerviolence (light) et leur Fastcore (sérieux) dans leur poche, mais le fond de l’air étant traditionnellement Core, on ne peut que saluer leur performance, d’autant plus qu’ils n’en sont pas à leur coup d’essai. Formé en 2012 du côté d’Athènes, LIFEWRECK nous a déjà fait le plaisir de publier quelques œuvres, dont une démo initiale en 2013, puis un single (Fast//Violence Part II), et un EP (Aggravation, recommandable pour le moins) en 2014, avant de garder le silence, couvant un accès de fièvre qui aujourd’hui atteint son apogée via cet éponyme début qu’ils estiment longue durée, malgré son timing assez serré.

Mais on sait le Hardcore encore plus percutant en format court, ce que les treize et brefs morceaux de ce Lifewreck démontrent sans détour, propulsant des riffs virils via des rythmiques assassines, et prônant la rapidité tout autant que l’efficacité. Il faut dire que la situation globale en Grèce a de quoi agacer, et il est assez facile de comprendre pourquoi les acteurs de la scène Hardcore locale se sentent aussi énervés. Avec des lyrics hautement engagés, les athéniens nous atteignent fatalement, et nous font partager leur ressenti, violent et cruel, qui s’accommode fort bien de sonorités abrasives s’inspirant tout autant de la réalité urbaine de Chicago ou NYC, que de la folie ambiante et Crust des pays scandinaves, beaucoup moins soumis à la pression nationale. Le mélange est donc détonnant, d’autant plus que les gus sont de très bons musiciens, et qu’ils ne cèdent pas à la facilité un seul pouce de terrain. Une bordée de morceaux qui sont autant d’hymnes, et qui permettent à une basse vraiment percutante et claquante de jouer les avant-postes, alors que les guitares se déchaînent en arrière-plan, se plongeant dans leur colère pour en ressortir des motifs sanglants et insistants. Le chant quant à lui, mixé légèrement en retrait n’en perd pas pour autant son impact, et nous invective avec une hargne éraillée histoire de nous maintenir éveillé. Et le gros quart d’heure imparti passe donc très vite, trop même, puisqu’à peine les effluves de « Sleep » évanouis dans une nuit agitée, on se prend à rejouer l’album en entier, persuadé d’avoir été converti à la cause grecque sans y avoir été soumis. La force de persuasion de ce groupe est tout à fait conséquente, et évoque une poignée de groupes qui pourraient se sentir menacés par cette animosité, qui toutefois ne tombe jamais dans le chaos désorganisé.

Les troupes sont soudées, et le son sec mais gonflé, capté par le groupe lui-même aux Ignite Studios, puis mixé et masterisé par les mêmes LIFEWRECK accompagnés de George Christoforidis. Et sous un artwork primitif mais symbolique (qui suggère une adaptation des graphismes de MOTORHEAD dans un cadre purement Hardcore) signé Guillem el Muro se cache donc un EP/LP aussi puissant qu’un bon poing dans les dents, de ceux qui font gicler le sang et qui remettent les pensées dans le bon ordre céans. Difficile de placer un extrait en avant plutôt qu’un autre, puisqu’ils ne dépassent les deux minutes qu’en une seule occurrence, celle du final « Sleep » dont j’ai déjà abordé le cas. Mais de « Greed Reigns » et sa dénonciation de l’avidité, à « Doomed », et son désir compréhensible de ne pas se laisser emprisonner, la brutalité contenue règne, mais cède parfois le pas à la haine de l’adversité, pour des accélérations salement bien balancées, qui nous permettent d’atteindre un rythme de croisière tout à fait apprécié. On peut même parfois penser à une version très grecque d’un D-Beat à la scandinave (« Fixed Lifestyles »), mais l’amour du mid tempo bien costaud nous ramène à la réalité typiquement américaine (« Spineless Bastard »), aux muscles saillants, et au regard menaçant. Et c’est cette alternance entre Speed hargneux et Hardcore teigneux qui fait tout le charme de cet album précieux, qui ne retient que le meilleur de chaque courant pour l’injecter dans son propre sang. Celui des LIFEWRECK est rouge, comme leurs joues rubicondes de ressentiment, et le vôtre fera trembler vos tempes, malmenées par une transe violente matraquant votre palpitant. Impossible de résister aux accroches proposées, qui rivalisent de malice et de créativité pour offrir des licks déchaînés, mais qu’on retient assez facilement, et qui restent en mémoire indéfiniment. En gros, le meilleur du Hardcore de toutes les époques, mastoc mais fin, provoc mais sain, et une entrée en matière longue-durée qui condamne sévèrement le train-train.  

Et si la vie en Grèce est un naufrage, accrochez-vous à cette bouée de rage. De toutes façons, vous ne pourrez pas sombrer plus profond que ce quotidien où vous n’avez plus pied.


Titres de l'album:

  1. Greed Reigns
  2. Spineless Bastard
  3. Fixed Lifestyles
  4. Depressed Populations
  5. Trapped In A Void
  6. Reality Check
  7. Life Is Oppression
  8. Weaker Everyday
  9. Living In Denial
  10. No Escape
  11. Religious Freak
  12. Doomed
  13. Sleep

Bandcamp officiel



par mortne2001 le 09/02/2018 à 14:03
80 %    1221
Derniers articles

Chaulnes MÉTAL-FEST 2025

Simony 27/04/2025

Live Report

Star Rider/Blaze Bayley

mortne2001 24/04/2025

Live Report

LOUDBLAST : 40 ans de carrière !

Jus de cadavre 20/04/2025

Vidéos

Big Brave + MJ Guider

RBD 12/04/2025

Live Report

Becoming Led Zeppelin

mortne2001 09/04/2025

Live Report

Klone

RBD 08/04/2025

Live Report

Dr. Feelgood

mortne2001 29/03/2025

Live Report

1000Mods + Frenzee

RBD 24/03/2025

Live Report

Datcha Mandala

mortne2001 22/03/2025

Live Report
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
DPD

Reste Peste Noire qui chante en français.

01/05/2025, 23:53

DPD

Oui les subventions il suffit d'un pas qu'ils perçoivent de travers (ce qui n'est pas forcément le cas dans une scène) et t'es hors système. C'est un immense problème, peu importe ou l'on se situe économiquement, dans le syst(...)

01/05/2025, 23:51

Jus de cadavre

Je suis sur le dernier de mon côté, Malignant Worthlessness, sorti cette année. Du tout bon, même si il n'y a plus l'effet découverte "c'est qui ces tarés !?"

01/05/2025, 22:41

RBD

Tout le monde voyait bien ces difficultés dans l’activité de la salle depuis la pandémie, et j’étais au courant par plusieurs biais des soucis d’un autre ordre. Les lecteurs de Metalnews savent bien que je suis un habitué des lieux depuis vingt(...)

01/05/2025, 21:22

DPD

Je sais bien que je tourne en rond mais le principale problème c'est le manque de renouvellement du public, autant j'ai maudit ces courant type metalcore/deathcore, ils apportaient un nouveau public. Je suis trentenaire et parfois je me sens jeune dans un concert black/death meta(...)

01/05/2025, 19:06

totoro

Le nouveau line-up est top ! Mais le morceau ne me fait pas grimper au rideau... Finalement j'aime Suicidal quand c'est plus Metal que Punk, avec les solis magiques de Rocky George. Bref, je suis un nostalgique, et même si je serai intéressé pour revoir le groupe sur(...)

01/05/2025, 17:54

Bl00db4th

Qui écoute encore cet album en 2025? Groupe que je découvre que maintenant... Quel album ! Tourne en boucle

01/05/2025, 16:57

Simony

Bah c'est très moderne en effet et malheureusement, je ne sais pas si le public de ce style en core est très assidu aux festivals. Au-delà du fait que le niveau de popularité des groupes soit un ton en dessous par rapport au passé glorieux du festival. Mais(...)

01/05/2025, 09:15

Simony

Il y a vraiment un problème de la place de la culture dans notre société...

01/05/2025, 09:11

fecal prout

@LeMoustre : ok boomer

01/05/2025, 06:58

LeMoustre

C'est a chier l'affiche

30/04/2025, 18:41

Whiskey

C'est clair que ça fait mal au cul de voir la prog' du festival depuis quelques années... faut pas s'étonner hélas que le public se fasse de moins en moins nombreux, alors qu'avant le Covid l'affiche avait chaque année de la gueule !

29/04/2025, 13:37

Humungus

Hâte ! Hâte !

29/04/2025, 11:03

Buck Dancer

Première écoute décevante, la seconde plus convaincante. Malgré tout un peu déçu après le très bon World Gone Mad

29/04/2025, 08:26

DPD

Bordel on l'avait tellement bien,on s'est pas remdi compte.

29/04/2025, 02:34

DPD

Et pitié plus jamais de thrash//bllack/death à la con, choisit ton camp camarade !.

29/04/2025, 02:27

DPD

Je veux une scène vivante et organique voilà tout. Je constate une baisse en qualité, la scène metal ressemble de plus en plus à un musé. Mon expérience c'est que tu as un bon groupe sur 4 dans une soirée live maintenant. Il y a pas si (...)

29/04/2025, 02:24

Ivan Grozny

Petit chenapan j’aurais bien aimé voir ça.

28/04/2025, 23:37

Sphincter Desecrator

@DPD:Pour finir, là où je pense te rejoindre (je suis presque quinqua, pourtant), c'est que je trouve insupportable les anciens qui prennent les jeunes de haut en leur disant que ce qu'ils font ne sera jamais au niveau de ce qu'ils ont connu.

28/04/2025, 19:40

Sphincter Desecrator

@DPD: que METALLLICA n'apporte plus rien à la scène depuis 30 ans, je pense que ça fait plus ou moins consensus. Mais je ne vois pas ce que LORNA SHORE apporte non plus.Ceci étant dit, qu'est-ce qu'un "jeune" de la scène. Moins de 40(...)

28/04/2025, 19:37