Limbo

Lillebror

16/02/2018

Buck Records

« Mats Halvorsen a toujours été en musique. Tout a commencé avec un enfant de 10 ans qui avait accès à des guitares et à des amplificateurs dans la salle d'exercice de son père dans la maison du sous-sol à Bekkelaget, à l'extérieur de Hamar. Avec l'héritage déplacé sous la forme d'un Sunburst Fender Stratocaster de 1976, le passe-temps devint rapidement une passion profonde pour l'écriture de chansons et le jeu dans des groupes. »

J’adore les traductions Google de biographies norvégiennes. J’ai l’impression de déballer un meuble Ikea et d’essayer de comprendre une notice explicative en suédois. Ne manquent plus que les classiques « Gruvbläät », « Plenoooör » et autres indications qui vous permettent d’oublier la vis C2 sous le lit et d’assembler les plateaux A1 et D7 avec peine, puisqu’ils ne sont pas faits pour s’imbriquer. Nonobstant cette introduction se voulant aussi cocasse que ludique (et n’étant de fait aucun des deux), ce nouvel album des norvégiens de LILLEBROR (petit frère en VF) se veut affaire beaucoup plus sérieuse que mon lénifiant laïus, même si les informations glanées sur la toile ne m’ont pas vraiment permis d’en dénouer l’écheveau. Visiblement, la tête pensante et chantante de ce trio iconoclaste a fait ses armes à la fin des années 90 dans le groupe POD (pas celui-là, le nordique, que peu de gens connaissent), puis a décidé d’arrêter les frais pour se concentrer sur un Rock plus en adéquation avec son désir, et surtout, chanté dans sa langue natale histoire d’y conférer un cachet plus local. Grand bien lui en a pris, puisque même si la vague appellation Rock colle à la peau de ces trois musiciens (Mats Halvorsen - Chant / Guitare, Kristian Grude - Basse, Stian Flagstad - Batterie), Limbo célèbre en grandes pompes le retour du Grunge sur le devant de la scène actuelle, sans sombrer dans les affres d’un Post plus galvaudé que réellement constructif.

Après avoir publié un premier LP en 2011 (Sterkt Berykta, De Forte Notoriété en VF approximative), les trois musiciens qui ont quand même travaillé avec Sylvia Massy (qu’on retrouve dans l’histoire de TOOL) ont donc pris leur temps pour élaborer une suite digne de ce nom, sous la forme de neuf pistes aussi énergiques que symptomatiques d’un esprit en vogue dans les mid 90’s, à cheval entre Rock mainstream, Grunge domestiqué, et Alternatif débridé. Le résultat est donc aussi simple qu’il n’est efficace, d’autant plus que les mélodies déployées sont tout sauf anodines, et que le trio fait montre d’une belle hargne qui leur permet de catapulter des thèmes simples et sombres dans une galaxie Rock lumineuse, assez symptomatique des combos évoluant dans le sillage des gloires de Seattle. On sent bien évidemment des réminiscences légères d’ALICE IN CHAINS, mais aussi de SEETHER, des SHIHAD, et quelques harmonies doucereuses dans l’esprit d’un LINKIN PARK apaisé, ou d’un NICKELBACK enfin débarrassé de ses tics les plus embarrassants. L’ombre des AFGHAN WHIGS plane aussi sur la créativité du trio, même si leur simplicité mélodique ne permet pas de valider ce parrainage totalement, d’autant plus que les norvégiens ne prennent même pas la peine de situer leur champ d’influence autrement qu’en faisant appel au ressenti le plus générique. Ce qui ne les empêche nullement de trousser des chansons faussement simples, qui ont parfois des allures de hits du passé exhumés pour retrouver l’esprit foncièrement rebelle d’une décennie qui après avoir assisté au massacre, s’est évertuée à reconstruire sur les décombres fumantes.

Et il y a franchement de quoi faire son marché sur cet album qui a le mérite de prôner un éclectisme à la lisière d’un Pop Rock vraiment musclé, qui hésite entre ombre et lumière. Si la plupart des morceaux mettent en avant des riffs immédiats, d’autres au contraire jouent la dualité, et hésitent ente légèreté et agressivité, à l’instar du très efficace « Står Her Alene », qui synthétise dix années de Rock populaire, de celui dont les campus américains se repaissaient il y a deux décades. Un peu NADA SURF en versant positif, un peu Néo-Punk qui n’assumerait pas vraiment ses penchants pour la facilité, Limbo est un disque ou l’intimisme le dispute au populaire, sans jamais sombrer dans la vulgarité d’un Rock trop anonyme pour être repéré. Aussi empreint de Rock nordique que d’Indie Rock typiquement US, ce second effort enchante de ses transgressions, et de ses introspections, qui parfois aboutissent à de charmants aveux harmoniques, piochant dans le vécu de HIM pour mieux l’analyser sur le canapé d’un MILK expurgé de ses tics les plus agressifs (« Trollman »). La voix de Mats Halvorsen, très juste et douce transcende donc des motifs ciselés, fragiles mais plus solides qu’il n’y parait, et si l’ouverture imposante de « Er Det For Mye » se souvient de la lourdeur et du dramatisme de Jerry Cantrell et Layne Staley, l’atmosphère change du tout au tout sur le coup de tête de « Tingen I Hodet » qui parvient même à nous entraîner en rivage Stoner Rock digne de nos 7 WEEKS nationaux.

Aussi à l’aise en mid tempo qu’en beat rapide, les norvégiens se font les chantres d’une versatilité cohérente, et tricotent des motifs bien Heavy, qu’ils intègrent avec beaucoup de flair à des rythmiques gluantes (« Slave »). Rois du burner light en délié (« Limbo »), les LILLEBROR sans chercher à révolutionner un genre qui de toute façon est trop pluriel pour être balisé, nous enchantent de leurs chansons terriblement énergiques et intelligentes, qui ne se contentent pas de traduire dans un vocable contemporain des dogmes anciens. Aussi Grunge qu’ils ne sont Rock, aussi expansifs qu’ils ne sont introspectifs, ces neuf hymnes à la liberté de création flirtent parfois avec les USA de l’ère post Hair Metal pour mieux nous séduire de leur ambivalence (« Røver », couplets abrasifs pour refrain pur Pop), et nous laissent même faire face à nos propres émotions pour en tirer d’évasives conclusions (« Amarone », superbe final qui troue l’acoustique ciselée de percussions tonitruées). En gros, une visite à peine guidée des arcanes d’un Rock décomplexé, et affranchi de toute obligation, qui déforme sa vision anglo-saxonne d’une sensibilité nordique, et qui transpose les émotions passées dans un présent plus lumineux qu’il n’y parait. Une petite surprise toute en profondeur de légèreté, pour une dualité qui tourne vite à la dichotomie. Car parfois, pour imposer la puissance, il vaut mieux faire preuve de nuance.                                                                 

Titres de l’album:

     1.Er Det For Mye

     2.Tingen I Hodet

     3.Slave

     4.Limbo

     5.Når Du Forsvinner

     6.Står Her Alene

     7.Trollmann

     8.Røver

     9.Amarone

Site officiel

Facebook officiel


par mortne2001 le 08/06/2018 à 13:52
80 %    962

Commentaires (0) | Ajouter un commentaire

pas de commentaire enregistré

Ajouter un commentaire


Derniers articles

Winter Rising Fest 2024

Simony 20/11/2024

Live Report

Mars Red Sky + Robot Orchestra

mortne2001 17/11/2024

Live Report

Benighted + Anesys

mortne2001 02/11/2024

Live Report

Dool + Hangman's Chair

RBD 25/10/2024

Live Report

Rendez-vous

RBD 21/10/2024

Live Report
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
Simony

Oui j'ai mes commentaires qui se mettent en double des fois....   

21/11/2024, 09:20

Orphan

"...jouer un concert en Arabie Saoudite. Un honneur absolu et un privilège. Les loups du nord apporteront la tempête hivernale à Riyad !"Un véritable honneur absolue de jouer en Arabie Saoudite, la ou les apostas sont condamnés &agra(...)

21/11/2024, 08:46

Jus de cadavre

Est-ce qu'ils seront au Anthems Of Steel 2025 ? Pardon Simo   

20/11/2024, 22:29

Simony

Et ils seront au Anthems Of Steel 2025 !

20/11/2024, 17:30

Simony

Et ils seront au Anthems Of Steel 2025 !

20/11/2024, 17:30

Saul D

La relève de Manowar ( vu le look sur la photo)?

20/11/2024, 14:08

Tourista

Quand on se souvient du petit son des années 80...  Mais la prod ne fait pas tout, ça reste du pilotage automatique.   C'est pas avec un truc pareil que je vais me réconcilier avec eux, et ça fait 20 piges que ça dure. 

19/11/2024, 21:57

Jus de cadavre

Album jouissif ! Le pied du début à la fin !

15/11/2024, 17:19

MorbidOM

J'avais pas vu cette chronique. J'étais au soir avec Ulcerate et je n'ai pas du tout regretté...Le lieu : il y a forcément un charme particulier à voir ce genre de concert dans une église, surtout que le bâtimen(...)

15/11/2024, 09:51

MorbidOM

@Gargan : ils n'ont pas pu jouer l'année dernière 

15/11/2024, 08:01

Gargan

Oh purée les « clins d’œil » au Hellfest et à Glaciation  

15/11/2024, 07:18

Gargan

Encore Magma!

14/11/2024, 20:20

Tourista

Le who's who des tueurs en série. Un plus gros budget pour l'artwork que pour le clip, assurément.  (...)

14/11/2024, 09:20

Humungus

Ca c'est de la pochette !

13/11/2024, 09:18

Tourista

Ben voyons. Le mec qui planque des jetons sous la table !

12/11/2024, 17:51

Gargan

QUADRICOLOR 

12/11/2024, 13:23

Humungus

Pas mieux.3 lettres : ÂME.

12/11/2024, 11:14

Tourista

5 lettres : MAUVE. 

12/11/2024, 06:50

Buck Dancer

J'imagine que c'est sans Alex Newport, donc, pour moi, zéro intérêt cette reformation.

11/11/2024, 16:15

Humungus

NAILBOMB ?!?!?!?!Putain de merde !!! !!! !!!J'savais pas qu'ils étaient de nouveau de la partie !!!Du coup, je regarde s'ils font d'autres dates...Ils sont à l'ALCATRAZ où je serai également !Humungus = HEU-RE(...)

11/11/2024, 10:09