Long Day Good Night

Fates Warning

06/11/2020

Metal Blade

Je peux dire que je suis gâté en cette fin d’année. Deux de mes groupes favoris me gratifient d’un nouvel album, et pas des moindres. La première salve fut donnée par les miraculeux ARMORED SAINT qui avec Punching the Sky ont confirmé une fois de plus qu’ils étaient bien le meilleur groupe de Heavy Metal américain encore en activité depuis les années 80. Et aujourd’hui, ce sont les FATES WARNING, qui fêtent avec Long Day Good Night leur treizième album, et le troisième après la refonte du groupe au début des années 2010. Après quasiment dix ans de silence original, Darkness in a Different Light nous avait tous agréablement surpris, revenant aux racines du groupes et quasiment au niveau de qualité atteint par les chefs d’œuvre Perfect Symmetry et Parallels. Theories of Flight n’avait pas démenti les promesses faites par le groupe, et cette période de confinement forcé qu’aura imposé 2020 aura permis aux musiciens de bosser ensemble, certes chacun dans leur coin, mais sans que cet isolement ne nuise à la cohésion générale. On le sait, FATES WARNING et ARMORED SAINT ont bien des points communs, et pas seulement parce qu’ils partagent la superbe basse de Joey Vera depuis 1997. Ils sont tous les deux des mal-aimés de la célébrité et de la reconnaissance, ne pouvant compter que sur une poignée de fans fidèles pour répandre leur bonne parole. Et si l’approche du SAINT est résolument Metal, dans le sens le plus direct qui soit, l’optique du FATES est-elle plus biscornue, comme si QUEENSRYCHE et CRIMSON GLORY avaient été fondus dans le même creuset d’inspiration pour donner naissance à une matière unique. Et pour son retour au premier plan, le quintet américain n’a pas lésiné. Treize morceaux pour un treizième album, ils nous refont le même coup que Perfect Symmetry et ses faces symétriques (qui ne l’étaient pas vraiment d’ailleurs), mais nous pondent aussi l’album le plus long de leur carrière, avec plus de soixante-douze minutes de musique, et une poignée de morceaux jouant généreusement la montre.

Composé sur une période d’un an au terme de leur tournée commune avec QUEENSRYCHE par Jim Matheos et Ray Adler, les deux vieux complices, Long Day Good Night est donc une œuvre longue, riche et complexe, comme tous les albums du quintet (Matheos - guitare, Alder - chant, Vera - basse, Bobby Jarzombek - batterie et Mike Abdow - guitare pour quelques soli). Mais cette fois-ci, Jim et Ray ont décidé d’abandonner toute mesure pour pondre le disque le plus ambitieux de leur parcours, encore plus que les étapes cruciales que furent les disques précités. Alors que la tendance depuis quelques années est à la concision (à part dans le cas d’OPETH ou LEPROUS, qui sont clairement à part) et aux albums condensés sous la barre des cinquante minutes, les originaires du Connecticut prennent le contrepied et osent l’heure et dix minutes bien tassées pour exploiter leurs points de vue. Pourtant, au premier contact, Long Day Good Night ne surprend absolument pas de son contenu. Mixé par Joe Barresi (TOOL, QUEENS OF THE STONE AGE, TOMAHAWK, THE MELVINS, KYUSS…), ce treizième album respire de tous ses instruments, et sa clarté  a quelque chose de surnaturel. Lorsque les soli de Jim résonne sur un background arythmique, on pourrait presque toucher ses cordes du bout des doigts tant on a le sentiment d’être dans la même pièce que lui. De la même façon, les passages les plus puissants n’épuisent pas les tympans, bénéficiant d’un soin particulier dans l’équilibre. Il faut dire que Jim a largement eu le temps de tester ses idées, lui qui avoue qu’un morceau n’est jamais vraiment fini tant qu’on n’a pas exploré toutes les pistes possibles. Et des pistes, Long Day Good Night en contient, dans son tracklisting évidemment, mais aussi au sein des chansons qui ne se privent jamais d’explorer toutes les directions possibles. Cordes, Jazz, inspiration hispanique, acoustique, violence, préciosité, crossover global, et toujours cette délicatesse dans l’instrumentation qui apparente chaque album du groupe à une construction de cristal qui donne le sentiment d’être trop fragile, mais qui ne casse pourtant jamais.

Si chaque LP du groupe a toujours demandé des efforts et du temps pour être appréhendé dans sa globalité, ce treizième chapitre en demandera encore plus, et pourra laisser un sentiment de trop-plein sur le moment. Trop d’idées, trop de chansons, trop de passages que certains jugeront dispensables, et qui le sont d’une certaine manière. Mais à celle des BEATLES qui avaient blindé leur Double Blanc pour se débarrasser d’un contrat plus vite, Long Day Good Night a tout conservé, pour donner à son reflet des allures de tableau en trompe l’œil, contenant d’infimes détails qu’on ne remarque qu’en regardant de plus près. Ces détails relèvent souvent des performances individuelles de chacun des membres du groupe, et spécialement du poulpe Bobby Jarzombek, qui a profité de l’annulation d’une tournée en compagnie de Sebastian Bach pour enregistrer ses parties. Encore une fois, le batteur livre une partition hallucinante, d’une précision hors du commun, avec toujours en exergue ce jeu de grosse caisse qui en impose aux plus grands et qui rappelle le talent de Dean Castronovo ou Rick Colaluca. Mais évidemment, Bobby n’est pas seul à louer sur Long Day Good Night, et si la basse de Joey Vera se montre plutôt discrète dans le mix, elle n’en oublie pas pour autant de distiller des lignes serpentines qui relient la guitare et la batterie avec beaucoup de fluidité. De son côté, Jim a encore été piocher dans son subconscient des riffs aussi efficaces que ciselés, dont celui imparable de « Shuttered World », qui se démultiplie à l’occasion d’un break hallucinant de calibrage, ou celui de « Scars », à la lisière du Thrash, qui rappelle la première époque du groupe, lorsqu’il jouait encore beaucoup avec les frontières.

Mais même avec sa somme de données, ce treizième chapitre n’incarnera pas le pinacle d’une carrière qui n’a connu que peu de bas créatifs, et dont la seule faute de goût pour beaucoup restera à jamais le controversé A Pleasant Shade of Gray. Il contient pourtant des moments de génie pur, comme ce « Begin Again », délicat comme une Pop Rock des années 80 traduite dans un langage plus viril, ou « Glass Houses » qui démontre que le groupe n’a rien perdu de son énergie. Mais évidemment, « The Destination Onward » et ses huit minutes placées en intro d’un LP gigantesque dans tous les sens du terme prévient des efforts à venir, et place l’auditeur dans une position enviable et précieuse : celle d’observateur attentif de l’imagination de musiciens ayant depuis longtemps abandonné toute mesure. Avec sa longue entame presque silencieuse, ce morceau explose soudainement d’une rage Heavy typiquement américaine (et qui rappelle certaines idées d’ARMORED SAINT justement), et rappelle au bon moment quel modèle FATES WARNING a toujours été pour les fans de Progressif. De l’autre côté du spectre, « The Longest Shadow Of The Day » n’hésite pas à en faire trop, et à arrêter sa course sous les douze minutes pour offrir l’acmé qu’on est en droit d’attendre d’un tel disque. Intro typiquement Gilmour, progression jazzy, pour finalement renouer avec les vieux démons de la puissance et lâcher les watts sans gêne.  

Je ne me prononcerai certainement pas sur la place qu’occupera Long Day Good Night à l’avenir dans la discographie de FATES WARNING. Mais malgré sa treizième place à table, il m’étonnerait que ce disque porte malheur au groupe.          

              

                                                                                                            

Titres de l’album:

01. The Destination Onward

02. Shuttered World

03. Alone We Walk

04. Now Comes The Rain

05. The Way Home

06. Under The Sun

07. Scars

08. Begin Again

09. When Snow Falls

10. Liar

11. Glass Houses

12. The Longest Shadow Of The Day

13. The Last Song


Site officiel

Facebook officiel


par mortne2001 le 14/11/2020 à 14:38
90 %    1003
Derniers articles

Dr. Feelgood

mortne2001 29/03/2025

Live Report

1000Mods + Frenzee

RBD 24/03/2025

Live Report

Datcha Mandala

mortne2001 22/03/2025

Live Report

Wishbone Ash

mortne2001 18/03/2025

Live Report

Peter Hook and the Light

RBD 14/03/2025

Live Report

Fanzinat - Projection du Documentaire

mortne2001 23/02/2025

Live Report

Voyage au centre de la scène : HOLY RECORDS

Jus de cadavre 23/02/2025

Vidéos

Obscura + Gorod + Skeletal Remains

RBD 17/02/2025

Live Report

Doom, Rock'n'Roll & Vin rouge

Simony 10/02/2025

Interview
Concerts à 7 jours
Tags
Photos stream
Derniers commentaires
NecroKosmos

Concert complet à Nantes. Pas pu y aller. Crotte...

30/03/2025, 07:45

Simony

        

29/03/2025, 07:56

Simony

Je n'avais pas été vraiment convaincu par l'album précédent, trop gonflé aux hormones inutilement, là ça respire, ça pue le old-school à plein nez, ça sent l'achat !

29/03/2025, 07:54

Simony

On va peut-être vous ouvrir un sujet "La Géopolitique vue de ma fenêtre" dans le forum, ça pourrait vous être utile parce que je ne suis pas certain que ça passionne tout le monde tout cela....En tout cas, étant donné qu'il y(...)

28/03/2025, 17:07

Zoubida

28/03/2025, 09:03

Humungus

Metalnews = RMC "Les grandes gueules"... ... ...

28/03/2025, 07:04

Zgueg

"Oui, comme nous en France en 1914 quand nous voulions récupérer l'Alsace et la Lorraine. Rien de choquant pour moi."Ouais, rien de choquant. Cet idiot utile de Zelensky avait juste faite sa campagne en faveur de la paix. 

27/03/2025, 20:46

Jus de cadavre

"Poutine ne s'est pas levé un matin en se demandant ce qu'il pouvait faire ce jour-là, puis a décidé que d'envahir l'Ukraine, ce serait marrant"Ça c'est une certitude, pour Poutine l'Ukraine c'est la Russie. Po(...)

27/03/2025, 20:18

MorbidPSG

Et l'Ukraine n'a pas respecté les accords de Minsk, Zelensky déclarant même vouloir récupérer le Dombass par n'importe quel moyen.C'est un peu plus compliqué que les Russes ont envahi l'Ukraine (Poutine ne s'est pas lev(...)

27/03/2025, 19:36

Jus de cadavre

Génocide ou pas, il y a un pays qui en a envahit un autre (du moins il essai hu hu). Point barre. C'est pas plus compliqué que ça. Si on cherche à justifier ou excuser ça, le monde va devenir un enfer total (plus qu'il ne l&apos(...)

27/03/2025, 16:49

CHUCK MAURICE

Je ne vois pas pourquoi les fans Russes du groupe devraient pâtir de la politique de POUTINE et être privés de les voir en live.  La prochaine étape c'est quoi ? obliger tous les groupes à arborer un drapeau ukrainien ?

27/03/2025, 15:53

DL100

Ce que tu fais MorbidOM, c'est une généralité pour tout un peuple. Marrant, quand on fait ça avec un pays d'Afrique ou du Moyen-Orient, on est aussitôt taxé de "fachos"...

27/03/2025, 10:22

MorbidPSG

27/03/2025, 06:02

MorbidOM

Il me semble que lorsqu'on parle de “désukrainiser” l'Ukraine on est pas loin d'une logique génocidaire.Après mon jugement est peut-être influencé par les massacres de Boutcha ou la déportation de dizaines de milliers d&ap(...)

26/03/2025, 20:47

Invité

La milf est de retour !

26/03/2025, 19:16

Satan

J'aime beaucoup Céleste mais il était en effet d'une bêtise incommensurable que de faire telle tournée. Après, il ne faut pas se plaindre des conséquences, assez cohérentes avec les vives tensions géopolitiques actuelles.Apr&egr(...)

26/03/2025, 16:53

DL100

MorbidOM qui critique ( à juste titre ) les donneurs de leçons... mais tout en endossant lui aussi le rôle de donneur de leçons !!

26/03/2025, 14:33

Ivan Grozny

La Russie organise un génocide ? Il faut faire attention aux mots qu'on écrit parfois.

26/03/2025, 13:42

Ivan Grozny

Merci oui c'était bien eux. J'avais beaucoup aimé leur prestation sans donner suite, c'est l'occasion de se rattraper.@Buck Dancer : sur Reign of infinite je trouve également.

26/03/2025, 13:37

MorbidOM

Pour une fois je soutiens complètement les festivals qui ont autre chose à faire que de se farcir ce genre de polémique. Ça n'a rien à voir avec exhumer des paroles volontairement provocantes écrites il y a 20 ans. Et puis on parle quand (...)

26/03/2025, 11:24