Quand on ne comprend pas tout, on a tendance à abuser de termes un peu flous. Ainsi, lorsque le Black Metal n’est pas qu’une tournée de blasts qu’on remet à intervalles réguliers, on lui accole des termes vagues, et très pratiques pour ne pas avoir à se creuser la tête. Avant-garde, expérimental, dissonant, tout y passe du moment qu’on n’ait pas à retirer ses gants pour présenter le truc au public. De fait, les norvégiens de SJODOGG ont depuis longtemps été coincés dans une petite case qui ne leur convient pas forcément.
Je ne saurais dire si les SJODOGG appartiennent à l’avant-garde ou à la frange la plus absconse du BM norvégien. Leurs quatre premiers albums étaient certes originaux dans leur genre, et Lore continue sur la même lancée créative, toutefois, cette musique n’est pas aussi décalée qu’on aimerait nous le faire croire.
Ce qui ne l’empêche nullement d’être passionnante.
SJODOGG est originaire d’Oslo, et incarne une ligne de conduite assez flexible depuis l’orée des années 2000. Publiant avec une belle régularité depuis 2008, avec en moyenne un album tous les quatre ans, le concept attend d’avoir quelque chose de pertinent à dire avant de lâcher son répertoire dans la nature. Lore est bavard, très expressif, et bien sûr, subtilement décalé pour ne pas être coincé entre deux classiques avec des influences un peu trop apparentes sur le blouson. Mais son optique est quand même très éloignée des princes de l’écurie I, Voidhanger, et plus à même de satisfaire les amateurs de MARDUK qui pensent que Morgan pourrait aller encore plus loin qu’il ne le fait déjà.
Mais Lore est une incontestable réussite. Une fois encore agencé avec beaucoup de libertés prises sur le formalisme, il alterne avec panache les inserts brefs et les digressions amples, ce qui découle sur un roulis incessant, qui évite la monotonie d’un voyage trop linéaire. Travail rythmique de premier ordre, ce cinquième album à beaucoup à offrir. Les options sont d’ailleurs admirablement bien résumées par le final étrange et discordant « Black Hearse », accroche lourde et compacte sournoise, fielleuse, qui reprend avec pertinence les arguments déjà exposés sur les onze titres précédents.
Une voix mixée upfront, une guitare qui lancine avec obsession et qui ne riffe que par obligation, et une section rythmique à l’abattage industriel, telles sont les qualités d’un groupe qui est rodé depuis longtemps, et qui sait exactement ce qu’il veut et où il va.
Les connaisseurs ne décèleront pas vraiment de surprise majeure. Le tableau habituel est reproduit presque à l’identique, et les inflexions sont toujours aussi martiales, soufflant sur les braises pour alimenter le barbecue expérimental géant. Je parlais de rythmique, et il est certain que l’axe basse/batterie/guitare est encore le point fort d’un groupe qui sait comment faire sonner ses envies. « Ancient Horror », ouverture traumatisante ne prend d’ailleurs pas de gants pour exposer son plan de bataille, s’en remettant à une redondance énorme pour chauffer les esprits. Sorte de fausse intro au thème répétitif, « Ancient Horror » est un avertissement donné à ceux s’étant égarés sur les routes, et qui hésiteraient à aller plus loin. Car le plus loin n’est pas des plus rassurants, et les nuages qui s’amoncèlent n’ont rien d’accueillant. Et pour bien assurer ses arrières, SJODOGG sort son aiguille pour sceller les lèvres via un « Sewn Mouths » traumatique et âpre.
Pour que nul mot ne soit prononcé avant la fin du parcours.
Acide, parfois psyché, pour le moins progressif, Lore est tout simplement un disque très ambitieux qui a soigné ses moindres détails. On y trouve de faux interludes acoustiques bizarres (« Baal », soudainement pulvérisé par une haine ancestrale), des progressions qui ne perdent pas de temps en conjectures et qui hurlent leurs injonctions avec bestialité et froideur (« The Descent », l’un des plus classiques du lot), de l’Ambient qui accepte de ne pas vraiment l’être (« His Abode of Demons »), et surtout, une diversité notable qui rend l’écoute encore plus passionnante.
« Mire of Depravity » fait partie de ces chapitres conséquents mais hypnotiques, qui d’un coup de double grosse caisse nous réveillent d’un trop long sommeil. Si les norvégiens acceptent le silence de façon fugace, c’est pour mieux le fracasser d’un chaos spontané. Et le principe a beau être répété à intervalles réguliers, il fonctionne toujours.
Noise (« Lepra », avec de gros bubons), « Of the Lowest Order », sentencieux et spacieux, l’enchaînement est très logique et cohérent, et l’horreur de la situation palpable. Car même si le Black a toujours été l’un des styles les plus aventureux de l’extrême, il est toujours remarquable de constater que des artistes parviennent à en garder l’essence tout en exhalant d’autres parfums.
SJODOGG n’est donc pas avant-gardiste per se. Il en a des caractéristiques, mais il a aussi gardé ses sabots sur terre pour tenir un discours compréhensible par le plus grand nombre. Un discours qui certes, laisse les acouphènes nous pourrir la vie, mais qui a le mérite de nous garder lucides.
Titres de l’album :
01. Ancient Horror
02. Sewn Mouths
03. Baal
04. The Descent
05. His Abode of Demons
06. Mire of Depravity
07. Forakt
08. Lepra
09. Of the Lowest Order
10. The Mare
11. A Corpse on Parade
12. Black Hearse
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