La plupart du temps, lorsque j’écoute un album, j’arrive assez bien à déterminer s’il s’agit d’un véritable groupe ou d’un one man band. Et parfois non. Mais alors vraiment pas. Tenez, en lâchant mes oreilles sur le premier CAVED, j’ai vraiment eu le sentiment d’avoir affaire à un groupe soudé et uni dans l’effort, alors même que le nom ne dissimulait l’identité que d’un seul membre, Ryan Wallace. L’homme vient d’Auckland, Nouvelle-Zélande, et Lost To Time est son premier effort officiel, et avec une telle entame, il sera assez difficile de ne pas remarquer son travail…Car outre son côté pluridisciplinaire, l’homme est doté d’une belle créativité et d’un sens aigu de l’originalité, qui m’empêche de rattacher sa musique à un courant particulier. Oui, ce plan-là, je vous l’ai déjà fait à maintes reprises, mais il est pourtant toujours d’actualité, tant les treize pistes proposées naviguent d’une humeur brutale à des impressions psychédéliques fatales, tout en restant attachées à des valeurs fondamentales de brutalité et d’efficacité.
Tout à tour Thrash, Death, Thrash progressif, Death progressif, Thrash Death psychédélique, ce premier LP à bien des qualités à mettre en avant, tout autant instrumentales que d’inspiration globale. On se prend à rêver d’une rencontre inopinée entre VOÏVOD, POSSESSED, PSYCHOTIC WALTZ, CYNIC, DEATHSPELL OMEGA, le DEATHROW de Deception Ignored, NOCTURNUS, GOJIRA, et quelques autres aussi qui constituent à n’en point douter une poignée d’influences admises ou non par l’auteur.
Tout ça fait beaucoup, et laisserait à penser que Lost To Time s’est un peu lost in space, mais que nenni, puisque Ryan a gardé la bride courte, et n’a pas divagué pendant presque cinquante minutes pour laisser son inconscient s’exprimer sans limites. Les morceaux sont intelligemment agencés mais libres, et l’effet percutant au possible, sans négliger de ménager de solides passages étranges, à mi-chemin entre le Techno Death le plus débridé et le Post Thrash le plus affirmé. La frontière entre les deux est la plupart du temps ténue, même si chaque segment possède son accroche propre. Et pour rester honnête, chacun distille tant d’idées à la minute qu’on se demande vraiment comment le musicien est parvenu à tout concentrer en un seul album. Beaucoup d’idées, mais aussi un art consommé pour les mettre en forme autour de structures mouvantes, et d’une orchestration organique. Chaque instrument se meut de sa propre initiative tout en suivant le mouvement général, et la première chose que l’on note est cette extraordinaire basse mutine qui parcourt toute l’étendue de son manche sans manquer de respect à une rythmique qui peut compter sur sa solidité. Des gammes parcourues, des riffs biscornus, un chant distordu, une recette éprouvée pour un impact magnifié, qui parfois se permet même quelques exactions Vintage Rock de fort bon aloi, un peu comme si les BLIND ILLUSION taillaient le bout de Blues avec les DEVIL ELECTRIC (« Life’s Corridors »).
Version courte, médiane ou longue, la litanie proposée est d’importance et inspirée, et même lorsque les cinq minutes sont allègrement franchies (« Time Warmed Up »), la muse n’est pas alanguie à attendre que la source ne soit plus tarie, et les arpèges prennent la place de l’électricité, pour une drôle de ballade dans les méandres de genres qui se noient dans un même confluent.
Dès « Killer », Wallace met les choses au point, et nous désoriente de son Death à relents Thrash efficace mais tout sauf direct, et empile les plans sans douter de leur stabilité, agrémentant la folie d’une ligne de chant versatile qui se refuse à adopter la linéarité de grognements prévisibles. La guitare se permet quelques incartades parfaitement psyché, et des riffs que Piggy lui-même aurait pu jouer, tandis que l’axe basse/batterie refuse de se fixer sur un tempo déterminé.
« You’re Gonna Die », enfonce un peu plus le clou dans le cercueil des probabilités, et ondule au gré d’un thème redondant, tandis que « Long Pig » ose la spirale d’une guitare dissonante et tournoyante, et d’une basse qui se fait plaisir en rebondissant sur une batterie qui accélère enfin les débats. Le déroulé est fluide, les enchaînements diaboliquement logiques, mais le chroniqueur à ce moment-là doute de sa capacité à décrire fidèlement ce qu’il entend, ce qui est toujours très bon signe pour un public potentiel, toujours avide de nouveautés décalées.
Difficile donc de rester concentré, mais la perte de repères est tout sauf désagréable. On se laisse alors porter par l’univers très personnel d’un musicien rebelle, qui brise les carcans et refuse toute politesse de clarté, et qui n’a d’autre maître que sa propre imagination, qu’il parvient quand même à garder cohérente tout du long. Mais de temps à autres, les choses deviennent bizarres, à l’occasion d’un break parfaitement incongru (« Filth », et ses chœurs presque grégoriens assez malsains), tandis que la prouesse rythmique laisse pantois en s’accordant aisément de délires instrumentaux en patois (« Wind », MORBID ANGEL et AKERCOCKE sont sur un bateau, le crucifix tombe à l’eau, qui le repêche avant le coup de marteau ?).
Et à l’occasion d’un final assez déjanté, Ryan pousse les choses encore plus loin en ralentissant la cadence d’un pseudo-Doom assez épais, mais toujours excentrique et mélodique (« Down At The Docks »).
Ardu à expliquer, mais facile à savourer, c’est un peu la conclusion idoine d’un premier album qui n’a d’autre raison d’être que la sienne, et qui risque d’échapper aux plus cartésiens d’entre vous, mais qui saura réjouir les plus fous.
En tout cas, et même en faisant abstraction de sa solitude de musicien, Ryan Wallace/CAVED avec Lost To Time signe un premier longue durée vraiment intrigant, qu’on écoute attentivement, et qu’on déguste avec un intérêt particulier. Je suis curieux de voir et d’entendre où tout cela va le mener, mais en attendant une suite éventuelle, jetez-vous sur ce cadeau que le Néo-zélandais vous fait, et téléchargez pour rien son album sur son Bandcamp.
Gratuité n’est pas toujours synonyme de facilité.
Titres de l'album:
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