Mania

Hell Fire

29/03/2019

Ridingeasy Records

Je sais qu’aujourd’hui, c’est le 1er avril (oui, j’ai pas mal d’avance sur mes chroniques…) et pourtant loin de moi l’idée de vous faire une blague en chroniquant un truc moisi. D’ailleurs, en jouant la transparence, je pourrais vous dire que je viens juste de me manger la plus grosse baffe Speed Metal depuis le « Hellpike » de LIVING DEATH ou n’importe quelle mandale de CYCLONE. Et cette affirmation n’aurait rien d’une galéjade, puisque telle est la vérité, et qu’elle émane en quelque sorte d’un spécialiste autoproclamé. Difficile pourtant en 2019 de m’impressionner avec une charge quelconque, mon organisme en ayant subi un certain nombre, et c’est pourtant la performance que viennent d’accomplir les américains de HELL FIRE. En même temps, avec un blaze pareil, il ne fallait pas s’attendre à moins, sous peine d’immédiatement se faire lapider virtuellement par tous les chroniqueurs de ce pauvre monde. Troisième album donc pour ce collectif originaire de San Francisco, qui géographiquement se rapproche donc des premières respirations adultes de METALLICA, et qui en emprunte d’ailleurs quelques souffles très marqués. Pour autant, n’allez pas croire que ces musiciens sont des affolés du riff, puisque leur spectre d’influence est assez large, et couvre en quelque sorte la quintessence du Metal des années 80. Et c’est donc sur le label national RidingEasy Records que nous les retrouvons aujourd’hui pour ce virage à la corde du troisième LP, toujours difficile à négocier, et qu’ils ont passé comme une belle ligne droite dégagée derrière les ornières. Les ornières ? Les HELL FIRE n’en connaissent pas le principe, et un simple coup d’œil à leurs références assumées permet de s’en rendre compte sans avoir à loucher. DIAMOND HEAD, IRON MAIDEN, ANGEL WITCH, METALLICA, EXODUS, DEATH ANGEL, des noms, des bornes, des légendes, auxquelles vous pouvez ajouter celles de THIN LIZZY, de TRESPASS et quelques autres, histoire d’avoir un tableau complet.

Un mélange assez hétérogène de la Bay Area, de l’Angleterre de mort à trépas, et de la seconde génération de baby thrasheurs pour ce Mania qui risque de devenir une sale manie dans votre lecteur. Une philosophie parfaitement résumée par Jake Nunn, guitariste chanteur, qui déclare à propos de ce nouveau-né :
« Thématiquement, tout sur ce nouvel album est tiré de notre propre expérience. Des grosses fêtes que nous avons données à Oakland, de la nostalgie d’écouter LED ZEP étant adolescent en mimant sur une guitare faite-main, jusqu’aux périodes de dépression et d’isolation, des problèmes personnels et de la maladie mentale. »
Mais heureusement pour nous, le résultat est plus qu’euphorique et énergique, et encore une fois, tout est dû à l’attitude d’un groupe qui ne conçoit pas sa musique autrement que comme un gigantesque exutoire :
« Au niveau du son, nous voulons que nos disques sonnent comme si vous étiez juste en face de la scène à un de nos concerts. Le souffle des Marshall en pleine face, la batterie dans les oreilles, le tonnerre de la basse et la sensation de ne faire qu’un avec la salle ».
Si avec ça, les choses ne sont pas claires pour vous, c’est à n’y rien comprendre, d’autant plus que l’impétueux guitariste/chanteur n’exagère en rien l’effet produit par Mania sur notre organisme. Mais beaucoup plus qu’une simple décharge d’adrénaline ou d’overdose sensorielle, ce nouvel album est une sorte de pèlerinage en terre sacrée, menée par des chevaliers ayant tout compris à l’éthique de leurs glorieux aînés, et refusant de s’affilier à une école particulière autre que celle généraliste d’un Metal de puriste.

C’est ainsi que de morceau en morceau, vous aurez l’impression de fouler une nouvelle fois la terre de l’âge d’or du Heavy des eighties, puisque les HELL FIRE n’hésitent jamais à passer d’une ambiance à une autre, accentuant parfois les harmonies pour mieux défoncer la rythmique l’instant suivant, sans paraître opportuniste ou trop versatile. Tony Campos (guitare), Herman Bandala (basse), Jake Nunn (chant/guitare) et Mike Smith (batterie) nous offrent donc un beau voyage dans le temps et l’espace, passant sans vergogne mais avec beaucoup de flair de l’Angleterre de l’orée des années 80 à l’Amérique de la transition 83/84, sans oublier quelques clins d’œil typiquement européens. Si évidemment les deux influences les plus marquantes du combo restent IRON MAIDEN (celui de Iron Maiden et Killers) et METALLICA (intro Kill ‘Em All, voir suite presque logique Ride The Lightning), on sent aussi que le gang de feu Phil Lynott n’a pas mouliné dans le vide, mais d’autres pistes se dégagent aussi, par instants fugaces, mais notables. C’est ainsi que le quatuor n’oublie pas de mentionner l’importance des RIOT, de UFO, d’HELLOWEEN, de JUDAS PRIEST, ou d’OVERKILL, et loin de n’être qu’une énumération d’idoles, cette liste se veut exhaustive dans son recensement, et synthétise assez bien les réflexes des américains. On pourrait même y ajouter une pincée de MANILLA ROAD dans les moments les plus progressifs, et un très léger soupçon de l’école Speed allemande, lorsque le tempo grimpe au rideau. Et si vous cherchez une illustration de ce grand écart permanent, écoutez à la suite l’intro bombardier de « Warpath », qui renvoie presque le classique des classiques « Overkill » dans les cordes (sans aucune exagération, même le TANK des grands jours n’a jamais réussi à faire aussi cramé et intense), et le plus évolutif et nuancé « Transcending Evil », aux accents Doom immédiatement nuancés de tierces symptomatiques de l’industrie anglaise de la fin des années 70. Arpèges délicats, mélodies en appât, pour un résultat qui dépasse les espoirs les plus fous placés en ce mouvement de revival qui souvent, peine à nous faire croire que.

Extraordinaires musiciens, les HELL FIRE peuvent surtout se reposer sur le talent incroyable de leur frontman, capable de nous caresser les oreilles à la Ronnie James Dio avant de nous crever les tympans à la Cronos. La voix de Jake est si versatile qu’il nous entraîne dans un univers onirique dans lequel DIO croise le fer avec SATAN, sans que l’un des deux ne trépasse. Inventant une sorte de Retro-proto-Metal, Mania réconcilie les différents mouvements de cette époque glorieuse, pour en retirer la substantifique moelle et nous unir sous une simple bannière Metal, décoré des armes du grandiloquent mais puissant « Mania ». Mais en se permettant des incartades régulières en terrain boogie (« On The Loose »), en radicalisant leur son pour flatter l’ego d’un PRIEST qui à l’époque n’avait pas grand rival, jusqu’à ce que la vague Thrash US ne menace son règne de terreur radicale (« Born To Burn », entre Painkiller et The Dark), en accélérant encore un peu plus pour revitaliser le souvenir d’un Speed/Thrash qui balbutiait sa violence via une Allemagne en transe (« Lashing Out », encore plus HELLOWEEN que leur premier mini-LP), ou en copiant les tics les plus caractéristiques du grand MAIDEN (« Knights Of The Holy »), Mania se pose en nostalgie majeure, qui ne se contente pas d’évoquer, mais qui transcende, qui sublime, qui renforce et qui justifie. Et alors qu’on croyait toute cette vague à la dérive, les HELL FIRE remettent le cap sur la qualité, nous livrant l’un des meilleurs albums de cette première partie d’année. Et ça non plus, ça n’a rien d’un poisson d’avril.             

               

Titres de l'album :

                        1.Warpath

                        2.Mania

                        3.On The Loose

                        4.Born To Burn

                        5.Transcending Evil

                        6.Lashing Out

                        7.Isolator

                        8.The Dreamer

                        9.Knights Of The Holy

                        10.Masochist

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par mortne2001 le 05/03/2020 à 18:01
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