Je dois concéder que j’étais plutôt réticent à l’idée d’aborder cet album. Tout ça sentait l’arnaque absolue d’un côté, ou le projet titanesque de l’autre, mais dans tous les cas, le genre d’œuvre qu’on ne peut traiter de façon lapidaire ou s’en tirer avec quelques formules toutes faites. Pensez-donc, un trio français, se revendiquant d’un Death Metal symphonique et Progressif, plus d’une heure de musique, cinq ans de conception, pas le genre de produit qu’on traite à la chaine comme tous les témoignages nostalgiques qui frappent à notre porte virtuelle chaque semaine. Mais en écoutant quelques passages de l’album pris à la volée, j’ai réalisé qu’il était impossible de passer sous silence cette sortie dantesque, qui prouvait à qui voulait bien le lire que l’ambition excessive n’est pas forcément l’ennemie de la qualité intrinsèque et de la puissance. Pour résumer l’affaire, admettons que le concept EXANIMIS est né de l’impulsion de trois musiciens très capés par le solfège, et tous issus d’une école prestigieuse. A l’image de DREAM THEATER et ses étudiants de la Berklee School of Music, EXANIMIS propose la concrétisation d’une vision énorme, celle d’une musique en confluence de plusieurs styles exigeants, ne supportant que très peu les errances ou les copies malhabiles. Et si le projet a dû subir de nombreux contretemps, ou au contraire prendre le sien pour retrouver l’inspiration, il va aujourd’hui pouvoir profiter de la satisfaction d’un album résolument unique, aux proportions exagérées, mais au propos très clair et précis.
Après quelques ajustements de line-up, le groupe ne recèle en son sein qu’un seul membre originel de l’aventure, Alexandre Dervieux, guitariste/chanteur aux desseins bien clairs. Après avoir travaillé avec le premier guitariste, il a du se faire aux méthodes d’un nouvel arrivant, Julien Marzano, avec qui l’osmose a été quasi immédiate. Avec l’apport de Julien Prost à la basse, le trio renouvelé a donc pu reprendre le travail et l’achever, dans une ambiance électrique. En résulte aujourd’hui un partenariat fameux avec Klonosphere et Season of Mist, après un financement participatif leur ayant permis d’atteindre leurs objectifs, et bien au-delà. Sortis de nulle part, les musiciens ont réussi à convaincre leur public potentiel que Marionnettiste était non seulement un projet viable, mais aussi un projet hors-normes, capable de transcender d’anciennes influences pour proposer une musique osée, sinon vraiment originale.
Le combo affiche clairement ses influences, scindées en deux camps. D’un côté, la puissance de la brutalité avec le parrainage de FLESHGOD APOCALYPSE, SEPTICFLESH, et CARACH ANGREN, de l’autre, la subtilité du Metal progressif avec l’ombre lourde de sens de DREAM THEATER et OPETH. Au centre, l’œuvre originale de tous ces anciens élèves de la Music Académie Internationale de Nancy, qui se propose d’incarner un crossover gigantesque entre ces deux écoles, pour fonder un mouvement unique, celui du Death progressif et symphonique, refusant toute barrière d’inspiration, et toute limite d’ambition. On retrouve dans cet album toute la morgue de la scène française des années 90/2000, et cette volonté d’aller plus loin sans se soucier d’une quelconque querelle de clans, en jouant la musique la plus baroque et barrée possible. Le résultat, tangible dès les premières mesures - et une fois passée l’intro superbe de « Prélude du Songe avant le Cauchemar » - est impressionnant de puissance, mais aussi de précision. Pas question ici de tomber dans le chaos agencé, mais bien de développer des idées claires et définitives. Peu de place a donc été laissée à l’improvisation, et tous les détails brillent de mille feux comme dans la salle de bal d’un hôtel cinq étoiles abandonné quelque part en Suisse, mais qui a accueilli les familles les plus nobles et dépravées d’Europe.
Basé sur une dextérité incroyable d’un trio de musiciens connaissant les partitions par cœur, et ayant noué une relation particulière avec leur instrument, Marionnettiste ne doit évidemment rien à Pierre Bachelet, mais semble emprunter la voie d’une ancienne relation extra-conjugale entre EMPEROR et STRAPPING YOUNG LAD. On retrouve ce sens de la démesure si cher à Devin, mais aussi ces aspirations symphoniques si caractéristiques d’un album comme Anthems to the Welkin at Dusk. La rigueur quasi militariste de CNK n’échappe pas non plus au spectre des respirations, spécialement lorsque les nombreux arrangements orchestraux se confrontent à un militarisme des percussions, mais il y a quelque chose d’unique qui émane de ce premier long et qui le rend si particulier. D’abord, la longueur excessive de certains de ses morceaux, qui n’hésitent pas à flirter ou à dépasser le quart d’heure, mais aussi cette volonté de museler le silence pour le réduire à la portion congrue de transition de fin de morceau. Chaque vide est comblé par une mélodie, par un riff, une voix évanescente, ou au contraire un déluge de bruit symphonique qui absout le concept de tout dilettantisme. Beaucoup ne supporteront pas cette débauche d’effets et ces enchainements permanents qui étouffent parfois l’oreille. J’en veux pour exemple l’écrasant et suffocant « Stampede of the 10.000 » qui n’est qu’une attaque interrompue des sens, et qui superpose les couches comme un maçon empile les briques ou les parpaings.
« Cogs, Gears & Clockworks », le premier très gros morceau du disque est lui aussi assez difficile à digérer, malgré une entame sobre et plutôt calme. EXANIMIS a utilisé ses possibilités de trio à plein, mais n’a pas non plus hésité à convier au banquet un nombre conséquent d’invités, dont Clément Denys à la batterie, Morgan Koch pour un solo, Nathalie Theveny au piano, Flavien Morel aux chœurs, Raphaël Jeandenand à l’orgue Hammond, Lorine Pauget aux chœurs, et Antoine Duffour, Yann Roy, François Toussaint & Kermheat qui ont posé quelques voix pour l’occasion.
Mais ces participations ne sont qu’un glaçage sur un gâteau déjà énorme et posé sur la table des mariés. Des mariés - trois - qui se fendent d’un très long discours pour évoquer leur amour et leurs passions communes. Via « Cathedral », qui selon ce que son nom indique, est une véritable cathédrale sonore qui justifie le moindre sou consacré à la noce, et la passion qui unit ces trois hommes. Soli, cassures, reprises, orchestrations certes synthétiques mais séduisantes, riffs sombres et gigantesques de l’école floridienne repris à la sauce avant-gardiste européenne, strates vocales évanescentes, tout y passe, et achève de transformer ce projet de l’ombre en réussite solaire.
Il est tout à fait possible que comme moi, vous ne sachiez pas par quel bout aborder ce monolithe qui impressionne. Alors, je ne saurais que trop vous conseiller de vous y immerger complètement et totalement et d’y oublier la normalité ambiante. Seule la folie vous aidera à rester sain d’esprit en écoutant Marionnettiste, qui tire les ficelles d’une dimension alternative faite de bruit, de beauté et de fureur.
Titres de l’album:
01. Prélude du Songe avant le Cauchemar
02. The Wrathful Beast
03. Throne of Thorns
04. Stampede of the 10.000
05. Entracte du Sommeil pendant le Cauchemar
06. Cogs, Gears & Clockworks
07. The Slow Flow of the Spume on the Shore
08. Cathedral
09. Epilogue de l’éveil après le Cauchemar
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