Meat Machine

Obsidian Kingdom

25/09/2020

Season Of Mist

OBSIDIAN KINGDOM fait partie de ces rares groupes qu’on aime instantanément. Non parce qu’ils déclenchent une hype qui vous obligent à les suivre, non qu’ils proposent une musique si populaire que les masses y adhèrent sans retenue, non qu’ils soient des putaclics et des traqueurs de like sur les plateformes sociales, mais pour la simple et bonne raison qu’ils font partie de cette caste rare de combos inclassables. On connaît l’astuce depuis FAITH NO MORE, on a poursuivi l’aventure avec VIRUS, et aujourd’hui, les barcelonais font partie de la même race de musiciens qui à chaque album, redéfinissent les contours de leur philosophie, sans que quiconque ne puisse les taxer d’opportunistes ou de midinettes versatiles. Admettons quand même que les espagnols sont capricieux, mais au nom de leur art : ils ne se refusent rien, aucune allusion, aucun Crossover, à tel point que les webzines sont toujours un peu ennuyés au moment de les cataloguer dans leurs colonnes. Alors ils biaisent, parlent de Post Metal progressif, d’Alternatif inventif, et tout autre qualificatif ne voulant pas dire grand-chose, et laissant le champ libre à une chronique ouverte. Mais depuis leur émergence dans les années 2000, ils n’ont eu de cesse de nous prendre à contre-pied, chaque LP contredisant en quelque sorte le précédent, avec beaucoup d’intelligence. L’aventure avait commencé sous des auspices plutôt violents et âpres, et Mantiis n’avait pas vraiment fait dans la dentelle de Calais, mais plutôt dans le bulldozer ibère, détruisant tout sur son passage, et ne laissant que des ruines fumantes derrière lui. A contrario, A Year With No Summer se tournait vers des horizons plus lumineux, des interventions plus mélodiques, et une sorte de Proto-Metal qui butinait presque toutes les fleurs, Metalcore, Indus, Progressif, Alternatif, Heavy Metal, Black, j’en passe et des moins évidents. Alors, il fallait évidemment s’attendre de la part du quintet à une énorme surprise pour négocier le virage dangereux du troisième album, celui qui assoit sur le trône ou qui fait chuter du piédestal.

Et évidemment, sans aucune surprise justement, OBSIDIAN KINGDOM est allé chercher l’inspiration ailleurs, se montrant plus allusif, encore plus versatile, pour nous offrir une tranche de vie découpé sur la table d’opération d’un boucher qui se prend pour le docteur Frankenstein.

Annoncé comme le travail le plus sauvage de la formation.

Avec de telles manchettes à l’emporte-pièce, la partie est presque gagnée d’avance. Mais au-delà de cette assertion promotionnelle un peu facile, se cache une réalité des faits. Meat Machine et sa pochette signée Elena Gallén et Ritxi Ostáriz qui mise sur les RESIDENTS, la butcher cover des BEATLES, et le Apex Predator de NAPALM DEATH, est encore une fois une somme de travail incroyable, qui empêche toute comparaison à des groupes existants, réels ou fictifs. Les espagnols sont des gens intelligents, et refusent qu’on dresse un parallèle entre leur unicité et celle des autres, et mélangent les harmonies, les styles, pour affiner le leur et rester dans la ligne des leaders, de ceux qu’on suit et que personne n’essaie de précéder. Et ne vous fiez surtout pas à la franchise presque Metalcore de « The Edge » pour juger du potentiel d’un travail de titan, ni sur aucun des autres morceaux d’ailleurs, pas plus « The Pump » que les autres. Car c’est l’ensemble qui définit les détails, et non l’inverse, comme presque toujours dans le cas du quintet.

Mais je ne peux nier que les barcelonais ont quelque part raison en parlant du travail le plus sauvage de leur formation. Les répétitions sont assénées avec puissance et fermeté, les guitares sont sauvages, et même lorsque le groupe ne sait résister à une accommodation plus Pop, il garde son ADN expérimental dans l’éprouvette, et nous sort un accrocheur « Mr. Pan », dansant comme un tube suédois, mais abrasif comme un résidu de la vague de Seattle des années 90. La voix de Rider G Omega, toujours aussi fluide et avide de métamorphoses permet à l’instrumental de revisiter la musique moderne en papillonnant sans ailes, approchant parfois une rencontre entre Chester Bennington et Manson, et refusant obstinément de hurler pour conserver son emprise sur le calme ambiant. Un calme très relatif d‘ailleurs, puisque Meat Machine ressemble à s’y méprendre au Miss Machine de DILLINGER ESCAPE PLAN, une échappatoire superbe, et une façon de prononcer les différences, sans faire appel à des facilités quelconques. Comme d’habitude dans le cas des OBSIDIAN KINGDOM, il faut du temps pour appréhender la richesse et la réalité des faits, et deux ou trois écoutes, même attentives, ne vous feront pas apprécier la complexité du projet qui se veut électronique, analogique, froid mais humain, et surtout, voyage aux confins du possible puisque le groupe peut se permettre un tel trip sans se griller les neurones.

Alors quand résonne l’évanescent « Naked Politics », personne n’est surpris d’y retrouver du DEFTONES, travesti en gang moins centré sur lui-même et plus ouvert sur le monde qui l’entoure. Et d’ailleurs, autant être franc et ferme, ce troisième LP des OBSIDIAN KINGDOM est bien plus intéressant dans le fond et la forme que le dernier DEFTONES, faux évènement qui nous fait regarder dans la bonne direction, celle de l’Espagne. Une Espagne que le néophyte va découvrir sous un autre jour, moins brûlant mais plus brillant, en tombant sur les plans dessinés par le stellaire « Meat Star » qui sonne comme un inédit de PINK FLOYD repris par les JANE’S ADDICTION. Enregistré, produit et mixé par Jorge Mur aux Ax studios, masterisé par Magnus Lindberg aux Redmont studios de Stockholm, Meat Machine est tout sauf une grossière machine à broyer qui laisse passer le cartilage et les os. La purée qui sort de la machine est fine, et prête à être dégustée crue, en carpaccio, sur une tranche de rêve d’une musique autre, différente, agressive mais pas tant que ça finalement, et en direct prolongement des travaux antérieurs. Mais il est difficile d’attirer l’attention de fans potentiels vers un disque qui ne fait pas grand-chose pour se laisser amadouer. Peut-être convient-il de se laisser prendre dans le tourbillon et de faire confiance à ses sens pour comprendre le but du voyage, et ces cinq musiciens presque sortis de nulle part            

(Viral Vector Lips - guitare, Rider G Omega - guitare/chant, Om Rex Orale - basse, Jade Riot Cul - claviers/chant, et Ojete Mordaza II - batterie) possèdent tous les visas du monde et sont connus de tous les aéroports.

Ce sont des gens en « Vogue », mais qui refusent de se contenter de cette hype qu’ils ont eux-mêmes créé. Alors peu importe de quelle façon vous les voyez et les entendez, ils ne ressemblent à personne. Même pas à eux d’ailleurs, puisque les trois visages qu’ils nous ont présentés n’ont pas grand-chose en commun, si ce n’est cette expression de liberté et cette douce folie.

Annoncé comme le travail le plus sauvage de la formation.

Pas forcément finalement. Mais aussi créatif que les autres.                     

                                               

Titres de l’album:

01. The Edge

02. The Pump

03. Mr. Pan

04. Naked Politics

05. Flesh World

06. Meat Star

07. Spanker

08. Vogue

09. Womb Of Wire

10. A Foe


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par mortne2001 le 07/11/2020 à 14:31
88 %    856

Commentaires (1) | Ajouter un commentaire


POMAH
membre enregistré
15/11/2020, 00:09:40

J'avais adoré Mantiis, que j'avais trouvé très en décalage par rapport à ce qui se faisait à l'époque, ensuite l'album suivant m'avait laisser vraiment dubitatif par la direction prise, la c'est mieux, mais la voix quoi... 

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