Memento Mori est à la fois un audacieux bond en avant, un pas de côté calculé et un regard nostalgique en arrière. Cela signifie que nous avons innové sans pour autant oublier notre héritage ou le voyage qui nous a menés jusqu’ici.
Cette déclaration sans ambages de Mortuus nous avait mis l’eau à la bouche, d’autant que MARDUK s’était montré particulièrement silencieux ces dernières années. Cinq ans sans album, longues années meublées par quelques EP’s, lives, et autres boxsets, de quoi éprouver la patience des plus mesurés qui se demandaient quand même quand Morgan allait nous offrir un successeur au martial Viktoria, qui renouait avec la thématique de la seconde guerre mondiale, l’obsession majeure du groupe.
La pandémie de COVID est passée par là certes, le line-up a été renouvelé une fois de plus, avec le départ avec pertes et fracas de Joel Lindholm (suite au « scandale du salut nazi de mai 2023) et l’arrivée derrière le kit de Simon Schilling, et pourtant, la prise de contact est immédiate, fonctionnant au premier degré d’une brutalité que le temps n’a toujours pas émoussée. C’est donc le duo historique Morgan/Mortuus qui tient toujours la barre, le premier recyclant ses riffs morbides pour que le second vomisse sa haine, duo épaulé dans sa tâche par l’ancien/nouveau bassiste Magnus « Devos » Andersson qui s’est occupé de la production.
Mais alors, comment interpréter les propos enthousiastes de Mortuus sans tomber dans la contradiction ? Un bond en avant qui s’accompagne d’un regard nostalgique sur le passé, tout ceci semble contradictoire, et si quelques expériences sont menées pour se renouveler, c’est surtout cette optique old-school qu’on retient, comme si Heaven Shall Burn revenait à la vie. Mais un Heaven Shall Burn sans Legion et avec Mortuus, de quoi titiller la curiosité des fans historiques.
Et si les deux premiers morceaux de ce quinzième album ne sont que haine et ressentiment, résumant en cinq minutes le parcours le plus violent du groupe, l’ambiance change rapidement pour retrouver cette humeur malsaine qui animait les premiers albums de MARDUK post Legion, et notamment Rom 5.12 et Wormwood.
Le volet « regard en arrière » est donc évident, et facile à souligner. Le pas de côté est plus énigmatique, puisque la route du quatuor est bien tracée depuis les années 90, mais la projection laisse dubitatif. Car après tout, Memento Mori ne déroge aucunement à la logique mise en place depuis les années 2000, avec son lot de violence crue à peine perturbée par des lancinances plus sadiques et une lourdeur moite qui obstrue les pores.
Alors, autant dire les choses comme elles sont : Memento Mori est un solide album des suédois, mais ni plus, ni moins. Ce qui est déjà exceptionnel, au vu de tout ce que le groupe a pu apporter à la cause Black Metal.
Relativement peu d‘arrangements, une brutalité soutenue de bout ne bout, largement de quoi contenter la fanbase sans chercher à s’attirer les faveurs de la nouvelle génération. La production simple et sèche, les morceaux aux structures classiques, le chant de Mortuus, sans aucune nuance et les riffs traditionnels découpés par Morgan, tout contribue à renforcer cette sensation de déjà-vu, certes agréable, mais un peu gênante lorsqu’on espère de son groupe préférée une distance prise avec son histoire. Visiblement, la mort a entrainé MARDUK sur les traces de son passé glorieux, et notamment la première partie de son histoire, celle qui l’a mené sur le trône de Suède.
Moins roboratif évidemment que le linéaire Panzer Division Marduk, mais aussi moins morbide et puant que l’immonde mais délicieux Rom 5.12, Memento Mori honore les morts de la façon la plus classique qui soit, sans ornementation inutile ou fleurs déposées sur une tombe que plus personne ne vient visiter. Rentrant dans le moule old-school en relisant ses propres discours, MARDUK se fait plaisir, et retrouve ses impulsions de jeunesse, n’évitant la redondance fatale que grâce au jeu incroyable de Simon Schilling, qui a déjà prouvé en live tout son talent et sa rapidité incroyable.
Quarante-deux minutes d’agression, voici tout ce que ce nouvel album vous propose. Pas d’expérimentation, encore moins de fantaisie, pour un retour aux sources certes généreux et furieux, mais qui laisse sur sa faim. Les titres sont tous plus ou moins bâtis sur le même moule, avec blasts jusqu’à plus soif, voix vomie des entrailles de l’enfer, et guitare acide et tournoyante dans la plus grande tradition du BM scandinave. Et pour humer un air différent et plus vicié, il faut attendre le final dramatique de « As We Are », emphatique comme une litanie en rimes, et dont la majesté morbide pèse sur les oreilles.
En dehors de cet épilogue monstrueux - dans tous les sens du terme - Memento Mori se montre très prudent, et surtout, sans autre ambition réelle que d’ajouter une nouvelle entrée au dictionnaire de MARDUK. Et si le disque reste de très bonne qualité, il ne fait que répéter des strophes déjà entendus des dizaines de fois, et ne possède ni le charme martial en casque à pointe de Viktoria, ni les accroches vicieuses et irrésistibles de Serpent Sermon, ni la chaleur en fournaise de Frontschwein.
Roue libre, pause créative, ou désir sincère de retrouver une seconde jeunesse basée sur la première ? Un peu tout ça, mais une satisfaction en déception qui installe un paradoxe intéressant. MARDUK déçoit en effet en proposant un album convenu, mais satisfait en piochant dans son répertoire nineties de quoi raconter ses histoires du nouveau siècle.
Il n’y a aucun mal à rendre hommage à son illustre passé, mais autant garder ça pour une compilation plutôt que pour un nouvel album studio. Dommage, mais le tout reste très recommandable, du fait du talent naturel du groupe pour composer des titres efficaces. Espérons que ce quinzième tome ne soit pas le premier d’une dernière série, tant on sait que Morgan et les siens ont encore des choses à hurler avec plus d’audace.
Titres de l'album :
01. Memento Mori
02. Heart Of The Funeral
03. Blood Of The Funeral
04. Shovel Beats Sceptre
05. Charlatan
06. Coffin Carol
07. Marching Bones
08. Year Of The Maggot
09. Red Tree Of Blood
10. As We Are
Marduk lèvera t-il le pied un jour ?
Après, même si c'est toujours très bon, il y a clairement le sentiment d'un groupe en roue libre sur cet album.
"la cause black metal"
Alors, j'ai vu les prix et, effectivement, c'est triste de finir une carrière musicale emblématique sur un fistfucking de fan...
20/02/2025, 19:08
J'avoue tout !J'ai tenté avec un pote d'avoir des places le jour J...Quand on a effectivement vu le prix indécent du billet, v'là le froid quoi...Mais bon, lancé dans notre folie, on a tout de même tenté le coup...
20/02/2025, 18:52
Tout à fait d'accord avec toi, Tourista. En même temps, on a appris qu'Ozzy ne chanterait pas tout le concert de Black Sabbath. Du coup, faut essayer de justifier l'achat d'un ticket à un prix honteux pour un pétard mouillé.
20/02/2025, 09:27
Tout est dit.Que ce soir devant 50 personnes dans une salle de quartier ou dans un festival Hirax et en particulier Katon assuré à l'américaine. Parfait.L'album précèdent reste terrible. A voir celui ci.
19/02/2025, 17:51
Hell Yeah!!! Voilà ce que j'appelle une bombe bien métallique.P.S: Il serait bien que ce site passe en mode sécurisé: https car certains navigateurs refusent son ouverture car il est considéré comme malveillant.
19/02/2025, 16:32
Pareil, vu au Motoc l'année dernière plus par curiosité qu'autre chose : et bah c'était excellent ! La passion qui transpire, la nostalgie d'une époque aussi et puis cette énergie !
17/02/2025, 21:39
Oui, Keton de Pena est une légende encore vivante avec son Thrash reprenant pas mal les codes du Heavy. Il y met cette ambiance jubilatoire en forte communion avec les fans (il a dû vous faire le coup du drapeau). Je l'ai vu deux fois il y a une dizaine d'années, c&a(...)
17/02/2025, 13:18
Vu pour la toute première fois en live l'été dernier.Il était grand temps pour moi au vu que j'adore ce groupe...Le concert était laaaaaargement au-dessus de ce que j'en attendais : Ambiance, prestation, joie communicative, ultra-res(...)
17/02/2025, 06:50
C'est un groupe assez ancien en fait, ils ont bien vingt ans de carrière derrière eux. Martin Mendez les a recrutés pour son propre groupe parallèle à Opeth, White Stones, car il est installée à Barcelone. Ils avaient commenc&eacut(...)
15/02/2025, 18:14
Âge oblige, j'ai connu à fond cette époque et elle était formidable. Evidemment, aujourd'hui, il y a internet mais le gros avantage du tape-trading, c'était que, par défaut, un tri s'effectuait, copie après copie (de K7). Aujourd(...)
14/02/2025, 05:50
AAAAh Benediction... Toujours un plaisir de les retrouver. Et en live c'est du bonheur (efficacité et bonne humeur!)
13/02/2025, 18:38
Dans son livre "Extremity Retained", Jason Netherton met en lumière l'importance énorme que ce phénomène a eu lieu dans la naissance de la scène. Tous les acteurs isolés dans leurs coins du monde échangeaient par ce moyen, et cela le(...)
12/02/2025, 01:30