Changement d’identité, long hiatus entre deux sorties (quoique…enfin vous verrez pourquoi), les russes d’ETERNAL STASIS ne se facilitent pas la vie. Depuis 2018, et alors qu’ils s’appelaient encore simplement STASIS, ces musiciens ont complètement reformaté leur approche et leur personnel, et nous proposent en 2025…ce qu’ils nous avaient déjà offert en 2018. En effet, Mental Decay revient à la charge cette année après avoir été lâché sur le monde sous un autre baptême, et j’avoue que je me perds en conjectures. Le nouveau Mental Decay est-il le miroir exact de l’ancien ? Est-ce un album qui a été remixé, ou complétement réenregistré ? Face à l’absence de réponse, j’ai décidé de m’en moquer, et de traiter cette sortie comme une nouveauté.

ETERNAL STASIS est sans doute le raccourci le plus intéressant entre le GATHERING d’Anneke et la tétralogie des addictions de Devin Townsend. Les deux étant reliés à la base par la collaboration entre le canadien et la hollandaise, il n’y a guère à s’étonner de leurs points communs, et les russes en profitent donc pour donner leur version des choses, une version très atmosphérique, aux sonorités modernes, et à l’ambiance évanescente. Des paysages sonores dessinés par des claviers évaporés, puis mutilés par des guitares assassines, le tout emballé dans la complexité abordable d’un Progressif modéré, voilà de quoi chatouiller l’imagination et avoir envie de quitter son salon.

Fondé par le guitariste Dmitry Ageev en 2011, ETERNAL STASIS se veut - selon son géniteur - le chantre d’un Metal atmosphérique expérimental. Sans aller trop loin justement dans l’expérimentation, Dmitry a composé des chansons que tout le monde peut apprécier, et qui restent en dehors des chemins trop balisés du Metal symphonique. Non que cet album en rejette tous les fondements, mais il nous épargne les arabesques et les envolées lyriques factices, pour que sa vocaliste reste collée à sa partition brutale et poétique à la fois. Et c’est une réussite d’une certaine façon, puisque chaque titre, lié au précédent, nous entraîne dans un univers légèrement sci-fi, très en phase avec son époque.

La voix très juste et enflammée d’Ekaterina Garbovskaya est l’un des atouts majeurs de l’œuvre. La vocaliste n’en fait jamais trop, et se met au service des morceaux, en variant ses impulsions et en évitant le tremblement opératique d’un vibrato excessif qui donne des tics. Secondé par un instrumental cohérent, Ekaterina ne pousse pas la note trop loin, et ne cherche pas à briser le cristal, ce qui nous permet de garder nos tympans intacts. Evidemment, il convient d’être clément envers les rares changements offerts sur cet album, les mélodies étant transposées d’un chapitre à l’autre sans être trop altérées.

On peut donc au choix : apprécier cette cohésion parfaite, ou faire la fine bouche en réclamant un peu plus de diversité. Je me situerais entre les deux avis, les quatre ou cinq premiers titres étant effectivement très similaires.

Mais comme par enchantement, « Bad Ending » tamise un peu la lumière, appuie sur la lourdeur, et dévie un peu de cette trajectoire trop bien tracée. La mélodie qui porte ce morceau, plus franche, nous aiguille vers un onirisme diurne, comme une rêverie introspective à la recherche de l’autre soi.

Ce qui permet donc à la fin de l’album de montrer un autre visage, parfois plus sur comme sur le puissant « Siren’s Song » qui syncope plus efficacement, ou plus complexe et indéchiffrable, via l’évolutif « Point Of No Return » qui s’intéresse enfin au chronomètre en piétinant les six minutes avec beaucoup de pertinence.

« Still On Air » abandonne le rythme, se concentre sur le chant d’Ekaterina, et a de faux airs de berceuse avant d’aller rejoindre Morphée. Perfectible mais attachant, redondant mais bien construit, un peu timide mais avec de belles choses à dire, Mental Decay méritait sans doute de revenir du passé vers la lumière du présent pour qu’ETERNAL STASIS impose sa nouvelle identité.

Le résultat est professionnel, mais manque encore un peu d’âme.        

Titres de l’album:

01. Etna

02. Circling

03. Mental Decay

04. Suppression

05. End Of Line

06. Trapped In Stasis

07. Bad Ending

08. Siren’s Song

09. Point Of No Return

10. Still On Air

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