L’enfance, les terreurs nocturnes, les cauchemars, les monstres du placard, les tueurs se cachant dans l’ombre, les toiles d’araignée qui effleurent le visage, les zones d’ombre…Nous avons tous nos phobies, nos peurs, et en jouer peut s’avérer un processus créatif très riche pour peu qu’on parvienne à les surmonter. Il en va de même avec les aversions, que l’on sait parfois mettre de côté pour essayer d’avancer, et offrir à sa vie un petit côté inédit. En acceptant la mission que je me suis moi-même confiée, je décidais donc de pénétrer dans un univers parallèle, à base d’histoires réelles ou fantasmagoriques, de trips intérieurs à la recherche de la vérité, et pourquoi pas, d’une quête très personnelle m’emmenant à la lisière de ma perception…Tout ceci semble hautement philosophique, et pourtant, l’origine de ce laïus d’intro reste très prosaïque. Pas d’autohypnose, pas d’enfermement dans une vieille armoire pour combattre des traumas d’enfance, juste une chronique, mais pas n’importe laquelle. Celle du nouvel album des allemands de BRAINSTORM, sorte de monument national érigé en l’honneur d’un Metal épique aux entournures presque symphoniques, soit ma Némésis absolue en termes de critique musicale. Pourtant, et en admettant mon refus de plonger mes ouïes dans un bain de fusion avec une indécrottable obstination, j’ai trouvé non la révélation aujourd’hui, mais une bonne raison de me contredire. Car si le Power Metal de tradition fait assurément partie de mes phobies les plus tangibles, cet album ne mérite rien de moins que des louanges, et pour de multiples raisons. Et la raison étant parfois d’admettre qu’on peut avoir tort, je l’affirme bien haut, Midnight Ghost m’a fait passer un bon moment, un très bon moment même, en se révélant sous un jour non novateur, mais en étalant toutes les qualités intrinsèques qu’un fan et qu’un néophyte sont en droit d’attendre d’une œuvre de cette ambition.
Cela dit, en m’attaquant au cas de BRAINSTORM, je ne prenais pas grand risque. Autant conseiller à un chaland un peu perdu de tendre ses oreilles sur IRON MAIDEN pour découvrir le Heavy Metal des années 80, puisque nos cousins germains sont une référence dans le style depuis la fin des années 80. Fondé en 1989, ce quintette (Andy B. Franck - chant, Dieter Bernert - batterie, Milan Lonacaric & Torsten Ihlenfeld - guitares et Antonio Ieva - basse) a quand même mis près de dix ans avant de s’exprimer en version longue-durée, après avoir accumulé les démos. C’est donc en 1997 par l’entremise de Hungry, au nom si révélateur que nous avons fait leur connaissance, connaissance qui a résulté d’un coup de foudre pour bon nombre d’adeptes de la cause Power, dont la passion ne s’est jamais démentie depuis. Il faut dire qu’en onze albums, les originaires d’Heidenheim de la région de Bade n’ont jamais trahi la cause, ni usé un potentiel qu’on devinait énorme à leurs débuts. Un parcours constellé de travaux tous aussi essentiels les uns que les autres, et un petit dernier il y a deux ans, Scary Creatures, que le groupe avait défendu sur toutes les scènes européennes. Deux ans donc pour accoucher d’une suite, et autant dire que Midnight Ghost sonne en dix morceaux les douze coups de minuit, et nous invite au bal sans nous refiler des pantoufles de vair. Si Scary Creatures avait légèrement déçu les fans les plus exigeants, gageons que ces derniers sauront s’enthousiasmer pour ce nouveau chapitre que la presse spécialisée a déjà encensé, pointant du doigt le savoir-faire des allemands en termes d’hymnes plein de panache et de mordant. Et une fois les quelques écoutes nécessaires avalées, le verdict tombe. Ce douzième tome des aventures de nos chevaliers préférés se place au sommet de leur abondante discographie, grâce à des compositions qui ont non seulement peaufiné le son, mais aussi les thématiques, qui font partie des plus accrocheuses que le quintette a pu nous proposer.
Enrobé dans une production gigantesque, ce fantôme de minuit bat des chaînes pour nous convaincre de son potentiel fédérateur. Loin d’être un spectre de bas étage uniquement destiné à effrayer les masses et les enfants en mal de frissons bon marché, Midnight Ghost pourrait se concevoir comme un grimoire ancien, retrouvé dans un vieux grenier un soir de Samain, truffé de contes et de légendes, horrifiques comme il se doit, mais ancré dans un inconscient collectif et trouvant ses racines dans les civilisations anciennes. En témoigne un morceau de la trempe de « Jeanne Boulet (1764) », première victime de la dite « bête du Gévaudan », et qui ose une certaine forme de progressif puissant et racé, à la croisée des chemins entre IRON MAIDEN, BLIND GUARDIAN, ICED EARTH et METALIUM, avec cette petite touche celtique dans les mélodies le rendant parfaitement irrésistible. Outre cette science de la composition qui fait mouche, le groupe au grand complet se présente sous un jour technique immaculé, la voix d’Andy B. Franck se montrant plus lyrique et puissante que jamais. Les deux guitaristes ne sont pas en reste, mais bien en verve, et nous agressent constamment de riffs puissants, de soli flamboyants, jouant l’alternance pour doper la puissance, sans jamais donner le sentiment d’user de gimmicks déjà usés. Et c’est bien ce qui fait la force de ce nouvel album, qui synthétise toutes les modalités d’usage du style sans jamais donner le sentiment de sombrer dans la facilité. Et lorsque l’ambiance se veut lourde et oppressante, les licks collent comme de la glue aux pavillons, dans une volonté de durcir le ton en flirtant avec un Thrash de saison (« Divine Inner Ghost »). Lorsqu’elle dégénère pour accélérer les débats, l’explosion n’en est que plus retentissante, et « The Pyre » de jouer avec un tempo d’enfer, unissant dans un même élan le HELLOWEEN des débuts et le QUEENSRYCHE le plus décomplexé, agrémentant le cocktail d’un refrain une fois de plus entêtant comme un slogan.
Mais avec une ouverture comme « Devil's Eye », le ton était donné, et le tocsin sonné. Minuit, déjà, et une nuit qu’on pressentait longue et éprouvante, pour un déluge de plomb sous l’oreiller et quelques songes de plus pour nous tourmenter. En sinuant dans le dédale des pensées nocturnes, les allemands ont donc joué la carte de la diversité dans l’homogénéité, et revisitent les grands classiques, donnant à ce nouvel LP des allures de best-of caché, signant dix compositions relevées, et toutes aussi diversifiées. Ainsi, après une intro délicate et ouvragée, « Revealing the Darkness » sort de l’ombre pour nous bousculer d’un Heavy Metal mélodique mais appuyé, et signe un hit instantané, de ceux que l’on reprend en concert les poings levés. Chœurs unifiés, harmonies modelées et modulées, pour un passage en revue d’un art pas si mineur que ça, et qui refuse les poncifs pour mieux les transcender. Impossible de ne pas se montrer admiratif face au travail accompli par les BRAINSTORM, qui même lorsqu’ils amènent un morceau d’apparence traditionnel (« When Pain Becomes Real »), s’arrangent pour le détourner et nous leurrer d’une intro purement Heavy Metal se travestissant soudain d’un costume Hard-Rock à la scandinave. En acceptant de ne pas brider leur inspiration, mais en respectant un timing de raison, les cinq pourfendeurs de facilité ont fait le bon choix, qui leur permet d’exposer leurs idées sans les condamner à des répétitions, et ainsi, même les titres les plus formels prennent une autre dimension, à l’image de ce diabolique « The Four Blessings » aux chœurs une fois de plus sombres mais enchanteurs. Véritables orfèvres du refrain qui tue, les BRAINSTORM nous quittent la tête haute, et clôturant cette nouvelle saga d’un superbe « The Path », chemin presque intimiste qui leur pave une voie royale vers un nouveau succès.
S’il est encore un peu trop tôt pour dire si oui ou non Midnight Ghost est leur meilleur album, ou tout du moins s’il mérite le même respect qu’Unholy ou Soul Temptation, on peut d’ores et déjà affirmer que ce douzième LP se hisse sans souci dans le top des meilleurs disques de l’année, en nous offrant l’une des plus belles nuits d’automne. Parfois, l’enfance se prolonge jusque tard dans l’âge adulte. Mais avec des conteurs de la trempe des BRAINSTORM, nous pouvons continuer de croire que nous n’avons jamais grandi.
Titres de l'album :
1.Devil's Eye
2.Revealing the Darkness
3.Ravenous Minds
4.The Pyre
5.Jeanne Boulet (1764)
6.Divine Inner Ghost
7.When Pain Becomes Real
8.The Four Blessings
9.Haunting Voices
10.The Path
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