Monnier

Monnier

21/01/2018

Autoproduction

MONNIER tu dors, ton moulin va trop vite.

Voilà, comme ça on évacue d’emblée le calembour désastreux que de toute façon vous ne pouviez pas éviter, et nous pouvons donc nous concentrer sur le cœur du problème. Le premier problème étant l’absence absolue d’informations à propos de ce groupe, qui ne possède qu’un Bandcamp sans bio, pas de page Facebook, encore moins de site officiel, et qui officie donc dans un anonymat relatif, que quelques malandrins en quête perpétuelle de boucan ont brisé de leur intérêt. Que vous dire donc sur ce projet sorti de nulle part, mis à part qu’il nous en vient visiblement du Japon, pays réputé pour ses tarés bruitistes notoires, qu’il est constitué d’un duo (Makiko - chant, FLAGITIOUS IDIOSYNCRASY IN THE DILAPIDATION, et Jasper - guitare/basse/batterie, INFESTED ART) et qu’il nous offre donc gratuitement les fruits de sa première réflexion, histoire que nous en propagions la bonne parole aussi vite qu’un poisson ? Pas grand-chose malheureusement, puisque ce duo presque fantôme reste très discret sur ses ambitions, et préfère donc laisser parler sa musique plutôt que de l’ouvrir pour rien. Et question musique, nous sommes servis, sur un plateau, débordant de riffs requin-marteau, de blasts de cachalots, d’enchaînements déments et brutaux, et surtout, d’une dualité vocale carburant plein pot. Vous avez dit Grind ? Vous avez la bonne réponse, et pouvez donc passer à l’étape suivante. Celle de la confirmation.

Qui dit Grind, dit forcément analyse assez simple d’un contenu somme toute très honnête. Les MONNIER toutefois ne se contentent pas de balancer une dizaine de salves interchangeables histoire de justifier leur existence, et jouent un barouf performant qui tient largement la distance face à ses concurrents. Lesquels ? Selon les avis avisés, ABORTED, mais aussi de mon propre avis les THE KILL, NAILS, BRUTAL TRUTH, INFECTED, ASSUCK, et même par moments plus intenses, les TOTAL FUCKING DESTRUCTION, pour cette façon très intelligente et ludique de traiter le chaos comme un art à part entière. Pas de stagnation à la base donc, ni de contentement du minimum, mais le meilleur boucan que vous pourrez trouver sur le marché, et qui s’articule sur l’art nippon séculaire du chant vraiment schizo et méchant. Alternance de grognements gravissimement ignobles et de cris de souris à la queue coincée dans un sac Monoprix, pour une symphonie en outrance majeure, qui ne crache pas sur un brin de technique et de malice pour nous entraîner dans son délire interdit aux mineurs. Et en tant que fin spécialiste de la chose mutine, je reconnais au duo des qualités indispensables à tout bon fouteur de merde qui se respecte, et qui a l’amour du gag bordélique élaboré et organisé. Ici, pas de foutoir même pas habilement déguisé, mais beaucoup de flair, et surtout, un paquet de riffs d’enfer, purement Death par instants, et salement Grind la plupart du temps. Alors évidemment, ça cartonne comme un tir de rafale en automne, mais ça tire précis, et ça compte les corps tombés vers midi. Pile.

De vrais morceaux donc, et de qualité, pour une dualité confrontant le bruit le plus absolu à l’efficience la plus dévolue. Mais une simple écoute du monstrueux et lapidaire « Unwritten Letters » en dit beaucoup plus en une minute et quarante-neuf secondes que bien des discours, et résume tout ce qui a fait du Grind l’un des plus brillants exutoires des flingués modernes, proposant dans un temps imparti relativement bref toutes les idées les plus pertinentes et les plans les plus entrainants. Pour faire court (comme le LP, qui dure treize minutes je le rappelle), MONNIER joue le Grind comme il devrait toujours être joué, comme une envie et non un palliatif ou une facilité, ajoutant de çà et là quelques dissonances (« Doosmday », pour demain, pas plus tard), des chœurs sombres intuitifs, des breaks expéditifs, des crises rythmiques épileptiques (« Dim Light », mais ça éclaire quand même quelques lanternes), et des accès de rage mâtinés d’écrasement en plein pilotage (« Burning Disgrace » et son pont purement Death, morbide et stable en même temps). En gros, la quintessence, l’essence, la dégénérescence (« Excruciation », ou comment NAPALM percute de plein fouet le trente-huit tonnes des INFEST), l’instinct, de bon matin, et une telle énergie qu’une fois l’effort fini, on en redemande et on repart pour un tour la nuit. Et les résultats se ressentent, puisqu’après avoir écouté la chose une bonne dizaine de fois pour pouvoir chroniquer, je m’en retrouve galvanisé, et prêt à affronter la plus terne des soirées en restant éveillé. La preuve par deux que le Grind est aussi une question de talent, et non pas un simple exercice de style pour handicapés des ligaments.

Alors, oui, MONNIER ton moulin va trop vite. Mais tu ne dors pas, et c’est un euphémisme. J’attends juste la suite des évènements pour éventuellement te rendre la Monnier de ta pièce. Mais je préfère m’arrêter là avant de devenir trop drôle.


Titres de l'album:

  1. The Abyss
  2. Writhe in Agony
  3. Unwritten Letters
  4. Doomsday
  5. Dim Light
  6. Burning Disgrace
  7. Excruciation
  8. Depletion

Bandcamp officiel


par mortne2001 le 09/02/2018 à 18:06
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