Cela peut sembler fou, mais j’ai plus d’espoir pour 2021 que je n’en ai jamais eu depuis au moins deux décennies. Parce que je vois les choses changer ; les gens commencent à voir à travers toutes les conneries et veulent revenir au décorum réel dans la société. Nous pourrions simplement nous traiter gentiment et être gentiment traités en retour. Je n’ai jamais pensé que MINISTRY serait en position de prêcher les valeurs traditionnelles, mais c’est la rébellion maintenant.
La tradition mainstream ? Voilà de quoi étonner de la part de ce cher Al, qui depuis quarante ans prône d’autres concepts et chante d’autres chansons. Depuis trois ans et la sortie du plutôt réussi AmeriKKKant, les choses ont visiblement changé pour le tempétueux leader à la santé fluctuante et aux nombreuses opérations pour le débarrasser d’ulcères encombrants. Il voit la vie autrement, plus sereinement sans doute, malgré la longue période d’enfermement due à la pandémie de COVID qui nous a tous bloqués chez nous. Alors, sans rancune pour ce pauvre pangolin qui n’avait rien demandé, Al continue sa route, et croise la nôtre de nouveau avec ce Moral Hygiene au titre bienvenu et révélateur. Et l’hygiène est très importante pour le guitariste/chanteur/leader cette année, lui qui se veut loin de tout problème de drogue et autres accoutumances un peu trop tenaces.
Cela dit, nouvel homme ne veut pas forcément dire nouvelle musique. Après quarante ans de carrière, quinze albums studio, une liste de musiciens additionnels digne du bottin de Chicago, des side-projects à ne plus savoir quoi en hurler, le leader du Metal Indus ne révolutionne pas son propre parcours, mais en offre une synthèse nineties assez honorable. Avec quelques tâches en errance sur le CV, via des albums mous ou peu inspirés qui nous avaient plus ou moins déçus, Al sait désormais ce qu’on attend de lui, et nous l’offre gracieusement. Déjà, la pochette prévient, et de son graphisme dérangeant situe la barre des propos. On pense aux gimmicks graphiques du pote Jello, à cette scène Hardcore qui se mélange avec le Metal, l’Indus, le Rock et Billy, et tous les autres potes prêts à dénoncer le régime. Depuis 2018, le président a changé aussi, exit la tête orange de turc Trump, et bonjour la fadeur d’un Biden qui ne sera pas le messie attendu. Mais il n’y a au final qu’un seul messie, Al Jourgensen himself, et à l’écoute de ce Moral Hygiene, on le sent requinqué, et prêt à proposer des solutions moins radicales.
Niveau line-up, Al n’a pas lésiné sur le talent. Outre John Bechdel (ex-Prong, Killing Joke, ex-Fear Factory) aux claviers et samples, et le magique Roy Mayorga à la batterie, on retrouve aux riffs le tandem Cesar Sotto/Monte Pittman, et la bande sonne fraîche et dispo. Certes, le propos est moins lourd que par le passé, parfois franchement léger et sautillant, mais l’ambiance convient tout à fait au mode de pensée du Al version 2021. On en viendra même à excuser la reprise plutôt moyenne mais distrayante du séminal « Search and Destroy », qui cherche mais ne détruit pas grand-chose, et qui plombe un peu l’ambiance créative générale de son approche poussive et plus grabataire que vraiment Punk.
Pourtant, le Punk est là, et pas seulement à cause de la présence de ce bon vieux Jello au micro. Trop heureux d’obliger, l’ancien complice donne du gosier sur l’up tempo guilleret et primesautier « Sabotage Is Sex » qui rappelle certains délires déviants du MINISTRY des années 80. La voix de Biafra est toujours aussi mordante, et convient parfaitement à ce titre à l’ironie grinçante, et on se prend à dodeliner de la tête, chose arrivant assez rarement sur un album de MINISTRY. Beaucoup moins Heavy dans le fond et la forme, loin des productions trop massives (dont celle d’AmeriKKKant), Moral Hygiene joue le jeu du Metal Indus radiophonique, et laisse tomber la distorsion excessive et les poses Metal. On reconnaît donc l’esprit du MINISTRY pré-Psalm 69, et on apprécie ce ton badin qui sied bien à la trogne d’Al Jourgensen.
Chacun appréciera les samples comme il se doit, et celui de l’éclaireur « Alert Level » déjà matraqué sur les plateformes et réseaux sociaux de sonner comme un avertissement pour le futur :
« How concerned are you ? »
Et on se sent plutôt concerné par ce nouvel album qui nous éloigne un peu d’une trajectoire trop bien établie, et qui ose enfin prendre ses distances avec les schémas un peu trop évidents. La basse de Paul D'Amour gronde, énorme, et rappelle le meilleur de Paul Raven, et finalement, après cette entame plaisante, on se dit que la distance entre MINISTRY et les contemporains de KILLING JOKE est moins grande qu’on ne l’aurait pensé.
Il y a du bon, du très bon, du passable et de l’acceptable sur Moral Hygiene, la foire à la nouveauté, et au petit jeu du chien dans le jeu de quilles, « Good Trouble » fait merveille avec son beat peinard et ses stridences soudaines. La voix posée tranquille, Al égrène donc ses nouvelles litanies et propose des psaumes plus aérés. Même les inserts les plus violents et concentrés donnent le sentiment d’avoir pris l’air avant d’être couchés sur bande, à l’image de l’agressif mais souple « Disinformation ». Le chant plus nuancé, quelques parties de guitares moins prévisibles, des breaks bien amenés, et des ambiances moins feutrées, pour un résultat qui s’il n’atteint pas les sommets de la carrière du groupe, lui permettent de rester d’actualité et toujours aussi probant.
On pourra regrette l’insistance un peu déplacée du redondant « Broken System », plus pénible que vraiment hypnotique, mais tout le monde s’accordera du bond en arrière Electro « We Shall Resist » hymne à la résistance grondant et rampant comme les pas de millions d’âme en perdition.
Avec quelques plaisirs mineurs, comme le hold-up Hop de « Death Toll » qu’on aurait pu trouver sur un album de b-sides de CONSOLIDATED, et un final aussi apocalyptique que « TV Song #6 (Right Around The Corner Mix) », Moral Hygiene est un instantané assez fidèle du Al Jourgensen de 2021, plus enclin désormais à voir l’avenir en blanc que le passé en noir.
Titres de l’album:
01. Alert Level
02. Good Trouble
03. Sabotage Is Sex
04. Disinformation
05. Search and Destroy
06. Believe Me
07. Broken System
08. We Shall Resist
09. Death Toll
10. TV Song #6 (Right Around The Corner Mix)
Chronique qui, encore une fois, vise juste.
Du Ministry soft, comme sorti d'une cure de désintoxication, et qui n'est pas s'en rappeler sa meilleure période, celle des années 90. Par conséquent l'album du groupe qui, pour l'instant, m'intéresse le plus depuis "Animositisomina".
A voir, maintenant, si l'album sera juste un fix ou résistera au temps.
Je partais plus que défaitiste à l'écoute cet album...
Et bah non !!!
Niveau Indus pour vieux con nostalgique (dont je suis forcément), quand FEAR FACTORY n'est plus bon à rien, Al si !
"Pour un résultat qui s’il n’atteint pas les sommets de la carrière du groupe, lui permettent de rester d’actualité et toujours aussi probant"
Tout est dit.
de cet album*
Alors, j'ai vu les prix et, effectivement, c'est triste de finir une carrière musicale emblématique sur un fistfucking de fan...
20/02/2025, 19:08
J'avoue tout !J'ai tenté avec un pote d'avoir des places le jour J...Quand on a effectivement vu le prix indécent du billet, v'là le froid quoi...Mais bon, lancé dans notre folie, on a tout de même tenté le coup...
20/02/2025, 18:52
Tout à fait d'accord avec toi, Tourista. En même temps, on a appris qu'Ozzy ne chanterait pas tout le concert de Black Sabbath. Du coup, faut essayer de justifier l'achat d'un ticket à un prix honteux pour un pétard mouillé.
20/02/2025, 09:27
Tout est dit.Que ce soir devant 50 personnes dans une salle de quartier ou dans un festival Hirax et en particulier Katon assuré à l'américaine. Parfait.L'album précèdent reste terrible. A voir celui ci.
19/02/2025, 17:51
Hell Yeah!!! Voilà ce que j'appelle une bombe bien métallique.P.S: Il serait bien que ce site passe en mode sécurisé: https car certains navigateurs refusent son ouverture car il est considéré comme malveillant.
19/02/2025, 16:32
Pareil, vu au Motoc l'année dernière plus par curiosité qu'autre chose : et bah c'était excellent ! La passion qui transpire, la nostalgie d'une époque aussi et puis cette énergie !
17/02/2025, 21:39
Oui, Keton de Pena est une légende encore vivante avec son Thrash reprenant pas mal les codes du Heavy. Il y met cette ambiance jubilatoire en forte communion avec les fans (il a dû vous faire le coup du drapeau). Je l'ai vu deux fois il y a une dizaine d'années, c&a(...)
17/02/2025, 13:18
Vu pour la toute première fois en live l'été dernier.Il était grand temps pour moi au vu que j'adore ce groupe...Le concert était laaaaaargement au-dessus de ce que j'en attendais : Ambiance, prestation, joie communicative, ultra-res(...)
17/02/2025, 06:50
C'est un groupe assez ancien en fait, ils ont bien vingt ans de carrière derrière eux. Martin Mendez les a recrutés pour son propre groupe parallèle à Opeth, White Stones, car il est installée à Barcelone. Ils avaient commenc&eacut(...)
15/02/2025, 18:14
Âge oblige, j'ai connu à fond cette époque et elle était formidable. Evidemment, aujourd'hui, il y a internet mais le gros avantage du tape-trading, c'était que, par défaut, un tri s'effectuait, copie après copie (de K7). Aujourd(...)
14/02/2025, 05:50
AAAAh Benediction... Toujours un plaisir de les retrouver. Et en live c'est du bonheur (efficacité et bonne humeur!)
13/02/2025, 18:38
Dans son livre "Extremity Retained", Jason Netherton met en lumière l'importance énorme que ce phénomène a eu lieu dans la naissance de la scène. Tous les acteurs isolés dans leurs coins du monde échangeaient par ce moyen, et cela le(...)
12/02/2025, 01:30