Une destination exotique ce matin pour un style classique, et une rencontre très sympathique avec les slovaques énervés de PERFORMED. La Slovaquie n’est en effet pas le premier pays auquel on pense lorsqu’on se penche sur le cas du Thrash old-school, et pourtant, ce quatuor infernal fait partie du patrimoine national depuis de longues années. Peter Chalupčík (batterie), Martin Majdan (guitare/chant), Marian Lukáč (basse) et Martin Sukenik (guitare) nous proposent donc leur premier album via un label national, et autant dire que les deux membres fondateurs restant attendaient ce moment de guitare et baguettes fermes. Peter Chalupčík et Martin Majdan ont en effet débuté leur carrière sous ce nom en 2003, arpentant les scènes locales avec leur répertoire de reprises empruntées à METALLICA, avant de se mettre en hiatus entre 2011 et 2016. Cette premier partie de carrière, étalée sur huit années ne leur aura donc permis que de se faire un petit nom dans l’underground grâce à des prestations explosives, et de laisser une petite trace personnelle via le EP Thick Fume of Dependencies, lâché en 2009. Mais avec un line-up des plus instables, des préoccupations personnelles assez chronophages, le duo de tête a donc décidé de faire une longue pause avant de remettre sa machine en route, et attendre encore quelques années avant de pouvoir prouver sa véritable valeur.
Dès la pochette, le ton est donné, et les obsessions thématiques lâchées. Cette foire aux esclaves aux tonalités verdâtres et rougeâtres donne le sentiment d’un grand cirque dans lequel l’attraction principale reste l’être humain, réduit à l’état de produit à vendre contre une bonne rémunération. Le quatuor se veut donc engagé socialement, à l’image de ses modèles, et il n’est pas difficile en écoutant ces huit morceaux de comprendre que le modèle de METALLICA est toujours d’actualité. Mais les slovaques ne sont pas que des clones habiles de la bande à Hetfield et Ulrich, et le prouvent au détour d’une puissance accrue qui n’est pas sans rappeler les DEATHROW ou DEATH ANGEL. Un Thrash résolument formel donc, aux références européennes mais surtout américaines, qui joue l’efficacité, mais qui ne se prive pas d’insérer quelques prouesses techniques évoquant un techno-Thrash humble, mais efficace.
Enregistré au Typhoid sound lab studio par Jozef Flimel, au Whatever studio par Vladislav Leškovský, et au Peter Kravec studio par Peter Kravec en 2019, produit par Adam Mičinec & PERFORMED, mixé et masterisé par Adam Mičinec, Moronia est donc doté d’un son qui n’est pas sans se montrer allusif aux productions de Flemming Rasmussen, mais nous ramène aussi à cette seconde vague de Thrash à tendance Heavy européenne que les suédois d’AGONY prônaient en leur temps. De la mesure donc, mais énormément de talent pour agencer les idées, et des morceaux évolutifs à tiroir révélant leur richesse au fur et à mesure des écoutes. En se reposant sur un duel de guitares permanent et une solidité rythmique accentuée par la frappe efficace et créative de Peter Chalupčík, Moronia joue donc l’old-school à fond la caisse, sans chercher à se démarquer autrement que par ses capacités individuelles et collectives. Les années passées à ruminer puis à reprendre d’assaut la scène (expérience dont témoigne le Live in Diwadlo paru en 2010 juste avant le split) trouvent donc une concrétisation solide au travers de ce premier LP qui évite les fautes de goûts et les erreurs de jeunesse. Il faut dire qu’avec bientôt vingt ans de carrière au compteur, Peter Chalupčík et Martin Majdan sont rodés à l’exercice, ce qu’ils prouvent dès l’entame franche de « Good Mood Stealer ».
On sent même quelques réminiscences de la scène Crossover new-yorkaise lorsque la basse parvient à se tailler une place au premier plan, et « Mammonist » de nous proposer un cocktail revigorant à base de METALLICAMETAL et d’OVERKILLCORE. Ça claque sévère, la voix de Martin est parfois proche de celle de James, et si les morceaux reposent souvent sur un mid tempo malin, ils n’en rejettent pas moins l’idée de vitesse que l’on retrouve au détour d’un break qui s’envole ou d’un couplet qui s’affole. « Mental Leech » en est la preuve la plus formelle, et cavale bon train, nous dévoilant le visage d’un groupe précis et soudé. Mais c’est plus vraisemblablement « War » - qui malgré son titre ultra cliché - nous offre une démonstration de savoir-faire et de précision. Arythmie ponctuelle, guitares qui se déchaînent dans le déroulé des riffs, et si les ambitions restent modestes, le résultat n’en est pas moins impressionnant de maîtrise.
Carré, soigné, le Thrash des slovaques n’a de leçon à ne recevoir de personne, puisque les musiciens ont largement eu le temps d’en assimiler tous les secrets. Mais entre un lourd et oppressant « Killing Past » et le progressif « Uzzur », très syncopé et parfois proche de CORONER ou BELIEVER, le tracklisting fait preuve d’une ouverture sur tous les sous-genres d’une extension, et propose un résumé exhaustif des tendances en vogue dans les années 80, allant jusqu’à oser le coup de la basse slappée si chère aux MORDRED.
« Thick Fume of Dependencies » retrouve une seconde jeunesse, et « Moronia » referme les débats sur le bon tempo, ce qui permet à Moronia de taper le sans-faute. Une vraie révélation sur la scène vintage, qui mérite qu’on s’y attarde, et qui sanctionne une carrière justifiant bien un tel brûlot. Du grand art, et un groupe à suivre, qui, s’il insiste et persiste sur cette voie, pourrait bien rejoindre le peloton de têtes des formations nostalgiques les plus respectées.
Titres de l’album:
01. Good Mood Stealer
02. War
03. Mental Leech
04. Mammonist
05. Killing Past
06. Uzzur
07. Thick Fume of Dependencies
08. Moronia
Si l adage tout vient a point a qui sait t attendre a un sens alors Performed en est le parfait exemple merci pour la découverte.
Quand on se souvient du petit son des années 80... Mais la prod ne fait pas tout, ça reste du pilotage automatique. C'est pas avec un truc pareil que je vais me réconcilier avec eux, et ça fait 20 piges que ça dure.
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Le who's who des tueurs en série. Un plus gros budget pour l'artwork que pour le clip, assurément. (...)
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