Double anniversaire fêté en 2021 par l’infatigable Toby Driver. D’abord, le plus important, celui du dixième album de son bébé, KAYO DOT. Deux ans à peine après le célébré Blasphemy, Toby revient aux affaires avec le dixième tome de ses aventures étranges et déconstruites, et se love au creux du Metal le plus torturé et expérimental, lui qui n’aime rien de plus que de sinuer entre les genres pour s’adapter à son environnement et ses partenaires de jeu.
Seconde célébration, les vingt ans de la doublette Bath/Leaving Your Body Map de son ancienne fratrie, MAUDLIN OF THE WELL. Prenant acte des deux décennies écoulées depuis la sortie de ces deux chefs d’œuvres aussi différents que complémentaires, Toby a eu cette idée géniale de convoquer aux agapes ses anciens partenaires, pour fêter l’occasion comme il se doit. En considérant que KAYO DOT a toujours été le prolongement de MAUDLIN OF THE WELL, ce nouvel album permet enfin de fusionner les deux entités, et d’unir dans une célébration chaotique l’aîné et le benjamin, bien que ce dernier soit devenu beaucoup plus imposant et productif que le premier avec le temps.
Voilà donc en tout vingt-six ans que Toby propose la musique la plus complexe et viscérale qui soit, et si certains passages de sa vie d’artiste ont été marqués par un éloignement prononcé de toute sonorité abrasive, ces retrouvailles permettent de renouer avec la violence d’antan, sans se départir de cette musicalité étrange qui a toujours permis aux deux groupes de se tenir à part sur la photo de famille extrême.
KAYO DOT a toujours été un groupe à géométrie variable, sous la conduction d’un seul maître d’orchestre. Et Toby a toujours avoué composer de la musique en fonction des musiciens travaillant à ses côtés. En retrouvant ses anciens partenaires, et même si Jason Byron a abandonné le micro pour se concentrer sur l’écriture, Toby dessine les contours de la transformation de 2003, et la transformation logique d’une entité à une autre. De là, avec d’anciens amis et une volonté d’enregistrer ce nouvel album là où la première démo de MAUDLIN OF THE WELL fut couchée sur bande, il serait facile de voir en Moss Grew on the Swords and Plowshares Alike le cinquième album que MOTW n’a jamais enregistré, et quelque part, c’est ce qu’il est même s’il est flanqué du nom de KAYO DOT.
Mais comme le dit Toby lui-même, KAYO DOT n’a toujours été qu’un nouveau nom posé sur une vieille carte d’identité, et les deux visages d’un même musicien : lui-même. Une fois encore, le multi-instrumentiste/compositeur s’est arrangé de tout le travail, laissant au fidèle Greg Massi le soin d’élaborer les soli de l’album. Il est donc inutile de chercher les points communs et les différences qui unissent et séparent MOTW et KAYO DOT, comme il est inutile de chercher à comprendre pourquoi le Docteur Jekyll et Mr Hyde se haïssent autant qu’ils ne se craignaient mutuellement. La transformation est liée aux circonstances, et ce nouvel album de Toby n’est qu’une histoire de plus qu’il raconte avec la verve unique qu’on lui connait.
Musicalement, Moss Grew on the Swords and Plowshares Alike ne surprendra pas grand monde, et certainement pas les fans du groupe, qui reconnaîtront en son leader le messie qu’ils ont toujours suivi aveuglément. Si certaines pistes se rapprochent de ce Doom évanescent que MOTW proposait sur certains de ses disques, si les mélodies amères sont encore très présentes, la déconstruction rythmique, la recherche d'évolutions, les textures qui s’empilent comme par magie, transforment ce dixième album en peinture qui se dévoile sous nos oreilles comme un coucher de soleil soudainement dérangé par un violent orage. Le contraste entre le rageur et puissant « The Knight Errant » et l’apaisé et pastoral « Void in Virgo (The Nature of Sacrifice) » est toutefois saisissant, mais pas plus que les anciennes transitions offertes par le musicien prolifique.
Construit une fois encore comme un voyage intérieur partagé avec l’extérieur, Moss Grew on the Swords and Plowshares Alike réserve quelques surprises magnifiques comme ce court interlude bancal et hypnotique « Spectrum of One Colour » qui unit dans un même vertige VIRUS et PORCUPINE TREE, mais il respecte globalement le cheminement qui a permis à Toby de continuer son œuvre sans donner le sentiment de trahir qui que ce soit. Les exercices instrumentaux sont toujours aussi difficiles, et à solutions multiples, les couches de voix se superposent avec une grâce unique, et cette manière de vulgariser le Progressif pour le rendre accessible aux fans d’extrême est toujours aussi intelligente et subtile.
Ainsi, « Get Out of the Tower » peut faire penser à du OPETH en pleine crise de cauchemars, avec ce chant scandé et hurlé qui se pose sur une structure mouvante et déformée, mais les cassures harmoniques, les déviations soudaines et pourtant logiques, ces petits détails en arrangements d’arrière-plan qu’on ressent plus qu’on ne les entend font de ce dixième chapitre le sommet d’une carrière pourtant riche en évènements et avènements.
Les retrouvailles sont donc émouvantes, et riches comme cette musique toujours aussi unique qui se sert de performances individuelles incroyables pour nourrir un collectif égalitaire. Ainsi, les percussions en intro de « The Necklace » sont autant de perles enfilées sur le collier de l’étrangeté, et le fait de les répercuter sur l’ensemble du morceau prouve que KAYO DOT ne se rangera jamais des voitures à vapeur.
On se concentrera évidemment sur l’énorme bougie qu’incarne « Epipsychidion », le long final qui se souffle en plusieurs étapes. Archétype de ce que l’extrême progressif devrait toujours être, ce long épilogue scelle les retrouvailles, et nous rappelle s’il en était besoin que Toby a toujours été un musicien d’exception, bien plus fascinant que d’autres dont le succès est pourtant régulièrement célébré. KAYO DOT, MAUDLIN OF THE WELL, peu importe le nom que vous pourriez employer, puisque le seul à retenir est celui de Toby Driver.
Titres de l’album:
01. The Knight Errant
02. Brethren of the Cross
03. Void in Virgo (The Nature of Sacrifice)
04. Spectrum of One Colour
05. Get Out of the Tower
06. The Necklace
07. Epipsychidion
Haaaa le Rock est tout sauf négociable !! Merci pour cette belle critique.Chazz (2Sisters)
17/01/2025, 22:44
Non putain ça fait chier ! Je m'en fout de revoir Rob derrière le micro de mon groupe préféré d'amour !
17/01/2025, 17:03
J'ai cru comprendre que Zetro se retirait pour problème de santé.J'espère que ça ira pour lui.En tout cas avec Dukes sur scène, ça va envoyer le pâte.
16/01/2025, 18:21
Super nouvelle pour moi, le chant de Zetro m'est difficilement supportable. Celui de Dukes n'a rien d'extraordinaire mais il colle assez bien à la musique et le gars assure sur scène.
16/01/2025, 12:15
Eh beh... Étonné par ce changement de line-up. Vu comment Exo était en forme sur scène ces dernières années avec Souza ! Mais bon, Dukes (re)tiendra la barque sans soucis aussi.
16/01/2025, 10:22
Super. L'album devrait être à la hauteur. Beaucoup de superbes sorties sont à venir ce 1er semestre 2025. P.S. : le site metalnews devrait passer en mode https (internet & connexion sécurisé(e)s) car certains navigateurs le reconnaisent comme(...)
15/01/2025, 12:58
Je viens de tomber dessus, grosse baffe dans la gueule, et c'est français en plus!Un disque à réécouter plusieurs fois car très riche, j'ai hâte de pouvoir les voir en concert en espérant une tournée pour cet album assez incr(...)
14/01/2025, 09:27
Capsf1team + 1.Je dirai même plus : Mettre cela directement sur la bandeau vertical de droite qui propose toutes les chroniques. En gros faire comme pour les news quoi : Nom du groupe, titre de l'album et entre parenthèse style + nationalité.
13/01/2025, 08:36
Oui en effet dans les news on voit bien les étiquettes, mais sur la page chronique on a juste la première ligne de la chro, peut-être que ce serait intéressant de le mettre dans l'en-tête.
13/01/2025, 07:59
Capsf1team : tu voudrais que l'on indique cela où exactement ? Dans l'entête des chroniques ? En début de chronique ?Aujourd'hui le style apparait dans les étiquettes que l'on met aux articles, mais peut-être que ça ne se voit pas d&(...)
12/01/2025, 17:38
Poh poh poh poh... ... ...Tout le monde ici à l'habitude de te remercier pour la somme de taf fournie mortne2001, mais là... Là, on peut dire que tu t'es surpassé.Improbable cette énumération.Et le pire, c'est qu'a(...)
12/01/2025, 14:27
Jus de cadavre, putain mais merci pour la découverte Pneuma Hagion. C'est excellent! Du death qui t'envoie direct brûler en enfer.
11/01/2025, 12:16
Merci pour tout le travail accompli et ce top fort plaisant à lire tous les ans. Moi aussi je vieilli et impossible de suivre le raz de marée des nouvelles sorties quotidiennes... Suggestion peut-être à propos des chroniques, est-ce que l'on ne pourrait pas indique(...)
10/01/2025, 09:12
J'aurais pu citer les Brodequin et Benighted que j'avais bien remarqués en début d'année, aussi, mais il faut choisir... Quant au Falling in Reverse, cette pochette ressemble trop à une vieille photo de J-J Goldman dans les années 80, je ne peux p(...)
09/01/2025, 19:49